Panique dans le monde littéraire. Daniel Brun, le célèbre romancier, auteur d’un roman sulfureux si célèbre qu’on n’en prononce même plus le nom, fait l’objet de lettres de menaces: un mystérieux corbeau qui se fait appeler “l’horloger”, annonce son intention de punir le provocateur. Et ça commence avec l’assassinat de la femme de son éditeur, dont le cadavre est déposé à l’endroit même où, jadis, on brûla Jacques de Molay, chef des Templiers. Quel croustillant secret essaie-t-on de protéger? C’est ce que va essayer de découvrir le commissaire Guillaume Suitaume en essayant de décrypter les messages laissés dans les tableaux du célèbre et facétieux Léonard de Vinci…
Je ne résiste pas à une enquête de Guillaume Suitaume. Je me suis profondément attachée au personnage, à ce Viking placide du 36, Quai des Orfèvres, qui résout les crimes les plus tordus sans que cela défrise sa moustache rousse. Rien ne peut le faire sortir de ses gonds, à part peut-être son imposante soeur Colchique et bien sûr, sa sculpturale mais virginale collègue Purdey Prune qui met tous les mâles en émoi lorsqu’elle traverse la ville dans sa petite voiture rose. J’ai même pris goût aux éclats de colère du chef Hercule Comenvetu, et aux chamailleries des officiers Habib Lioteck et Achille Pendule. Bref, je me sens comme chez moi parmi eux et encore une fois, je me suis régalée à les suivre chacun de leur côté.
On envoie donc Suitaume enquêter sur le cadavre et le corbeau, et Purdey analyser les graffitis laissés sur les tabeaux de De Vinci, sans se douter au départ que les deux affaires sont liées. Les pièces du puzzle se mettent donc en place indépendamment et j’ai beaucoup apprécié que Purdey ait tout le champ libre, parce que j’aime bien les personnages féminins forts et celle-ci, il faut le dire, fait forte impression. On se lance alors dans un jeu de piste dans la capitale, jalonné de formules à décrypter pour essayer d’anticiper le prochain crime. L’occasion pour nous de réviser un peu d’histoire de France, et d’Histoire des Arts, puisqu’on verra passer les Templiers bien sûr, mais aussi pas mal d’explication sur les symboles et les dessins utilisés (et reproduits) dans le livre, dans lesquels il est parfois difficile de décerner la frontière entre l’érudition réelle et la franche rigolade.
Parce que le plus gros avantage de ce livre, c’est qu’il se tourne lui-même en ridicule en parodiant les polars ésotériques dont il fait pourtant indéniablement parti. Les Dangereux Illuminés jurent comme des charretiers, le Tueur en titre attaque avec un terrible coq de combat et surtout, le secret de Da Vinci, exposé dès le prologue avec une ingéniosité remarquable et relancé grâce à une superbe chute, a de quoi faire jubiler tant il est à la fois pertinent et léger. On se délecte à tourner en ridicule les soi-disant grands mystères historiques et mystiques cachés depuis des siècles et au passage, ous les romans qui prétendent utiliser ou révéler ces théories. Et ça fait un bien fou.
La note de Mélu:
Réussi!
Un mot sur l'auteur: Gordon Zola est un auteur spécialisé dans le roman humoristique. Il mène notamment la série des enquêtes du Commissaire Suitaume et celle des aventures de Saint-Tin. D’autres de ses œuvres sur Ma Bouquinerie: