Grâce au nouveau spectrographe GPI du télescope Gemini-South, des astronomes ont obtenu la meilleure image directe d’une exoplanète de la masse de Jupiter autour d’une étoile âgée de seulement 20 millions d’années. C’est parce qu’elle est très jeune et encore en cours de refroidissement que le défi a pu être relevé. Quelque 600 jeunes étoiles similaires dans notre voisinage seront ainsi sondées dans l’infrarouge au cours des prochains mois. Distante de 100 années-lumière, 51 Eridani b arbore les traits de Jupiter dans sa jeunesse.
Avec le nouveau spectrographe GPI (Gemini Planet Imager) installé au foyer du télescope géant Gemini-South de 8,1 m de diamètre, au sommet du Cerro Pachón (2.722 m) au Chili, conjugués à l’optique adaptative, les chasseurs d’exoplanètes sont en mesure d’observer quelques « proies » directement par la lumière qu’elles émettent. Une technique différente de la détection par transit qui permet de caractériser ces outres mondes. Certes, ces objets lointains sont noyés dans la lumière de leur étoile-parent, plus d’un million de fois plus brillantes, mais l’instrument mis au point offre aux chercheurs de disséquer simultanément plusieurs longueurs d’onde dans le domaine de l’infrarouge.
Dans le cadre du programme GPIES (GPI Exoplanet Survey), les chercheurs ont ainsi prévu de sonder trois ans durant, un panel de 600 jeunes étoiles susceptibles d’avoir des planètes, dans un rayon de 300 années-lumière du Soleil, c’est-à-dire dans le même quartier que nous au sein de notre Galaxie, la Voie lactée. A ce jour, 20 % des observations ont été réalisé depuis la mise en service du nouveau GPI.
L’une d’elles, la très jeune 51 Eridani — 20 millions d’années seulement — tient au chaud sous son aile, une planète géante et gazeuse, deux fois plus massive que notre Jupiter. C’est la meilleure image directe réalisée à ce jour d’une planète de cette taille (on n’a pas encore vu plus petit). Cela se passe à environ 100 années-lumière de chez nous, en direction de la constellation de l’Éridan.
Illustration de la jeune 51 Eridani b observée dans l’infrarouge. L’exoplanète géante et gazeuse, formée il y a moins de 20 millions d’années, est deux fois plus massive que Jupiter — Crédit photo : Danielle Futselaar & Franck Marchis, Seti Institute
« Depuis mon enfance, je rêve de planètes autour d’autres étoiles et les possibilités d’y trouver de la vie, raconte Fredrik Rantakyro, membre de l’équipe de GPI. En tant qu’astronome, il est commun de travailler avec les télescopes [Pour la traduction de ce passage, je ne suis pas sûr de moi : « it’s common to work with state-of-the-art telescopes » ; > state-of-the-art telescopes ? ] mais pas de faire battre votre cœur plus vite. C’est exactement ce qui s’est passé avec cette découverte-qui-devient-réalité d’un frère de Jupiter ».
Nous découvrons en quelque sorte, et quasiment en direct (enfin, avec un siècle de retard), ce qui s’est passé avec Jupiter autour de notre Soleil (lorsqu’il était très jeune), il y a 4,5 milliards d’années. 51 Eridani b, c’est son nom, gravite à près de 2 milliards de km de son étoile. Cela représente 13 unités astronomiques (13 fois la distance Terre-Soleil), soit un peu plus loin que l’orbite de Saturne.
Elle évoque aux chercheurs qui ont publié leur étude dans l’édition du 13 août 2015 de la revue Science, notre plus grosse planète gazeuse, vraisemblablement la première à se former dans le Système solaire primitif. Chauffée par les multiples collisions de planétésimaux, cette planète est à présent en train de se refroidir progressivement. Cela peut durer une centaine de millions d’années et la période est donc propice pour la rendre détectable dans l’infrarouge avec cette nouvelle technologie. Sa température actuelle affiche 430 °C.
L’étude de son atmosphère a révélé la présence importance de méthane, une caractéristique commune avec nos géantes gazeuses, ce qui la rapproche donc un peu plus de ses vieilles cousines du Système solaire.
« La plupart des exoplanètes que les astronomes ont imagées auparavant ont une atmosphère qui ressemble à celle d’étoiles très froides. Celle-ci ressemble à une planète », indique Bruce Macintosh (université de Stanford) qui a dirigé la construction du GPI. Pour son collègue, James Graham (UC Berkeley) en charge de l’instrument : « C’est exactement le genre de système que nous envisagions de découvrir lorsque nous avons mis au point le GPI ».