Je me souviens encore de cette époque où je découpais les coupures de presse qui parlaient d’elle comme une natural born psychopathe, où je lisais en sous-marin ses mots en me disant qu’un jour, je voudrais écrire comme elle – avant de comprendre qu’on écrit comme on vit, comme on respire, chacun-e à notre manière, qu’il faut juste le temps de laisser mûrir les émotions et les mots qui les disent, et que c’est très bien comme ça toute cette diversité.
Et puis voilà, les années passent, les internets magiques et ses Birkenstock léopard dans ma cuisine un dimanche, les cris les rires de la ribambelle d’enfants qui emplissent la maison. Les vieilles maisons de la campagne ont ça de merveilleux qu’elles semblent attendre endormies ces moments de vie intense qu’elles gardent ensuite gravés dans leurs murs, elles sont faites pour les tablées chahuteuses, les courses effrénées, les verres renversés et l’odeur du gâteau qui cuit dans le four.
Les piques à brochettes destinées à confectionner de ravissantes brochettes apéritivo-diététiques ont disparu au dernier rangement de la cuisine ? Qu’à cela ne tienne, elle arrive les bras chargés de gâteaux salés, gagnant ses galons de meilleure mère de l’univers – les chips à l’oignon se marient très bien, paraît-il, à la pâte à gâteau aux mirabelles crue (sondage réalisé sur un échantillon représentatif d’un enfant de moins de trois ans).
Il fait moche un dimanche d’août? Nous mangerons dedans. L’eau de la piscine est un peu froide, un peu trouble, nous laissons la marmaille à ses plongeons et nous nous réfugions à la cuisine pour boire des litres de thé, reprendre un peu de gâteau aux mirabelles cueillies ce matin au jardin, comparer nos culottes et nos vies de mères de famille nombreuse. Chez elle tout pareil, le panier à linge sale n’est jamais vraiment vide, les papiers d’emballage n’arrivent jamais tout à fait jusque dans la poubelle, le sol de la cuisine est à nouveau sale avant même que la serpillère n’ait fini de sécher, les chambres en bordel et la petite dernière un peu relou des fois, mais c’est ça qui est chouette, un peu, aussi. Surtout.
Et on n’échangerait nos vies pour rien au monde pour d’autres plus photogéniques.