Ca se passe en Afrique du Sud et nous sommes en août 2015, c’est la journée nationale des femmes. Bic lance sur ses réseaux sociaux une publicité destinée à promouvoir une gamme de stylos auprès des femmes actives. Jusqu’ici, tout va bien, la marque fait usage de la publicité dans un but commercial.
Oui mais voilà, le message posté à côté de la photographie d’une jeune femme à l’allure de cadre d’entreprise et du mot-clef #BonneJournéedesfemmes est quelque peu déroutant… “Sois féminine, agis comme une dame, pense comme un homme et travaille comme un patron”. Comprenez, soyez belles comme des femmes et performantes comme des hommes…
Web power & cyberactivisme :
Bic aurait pu s’en tirer avec quelques remarques de femmes interpellées par ce message aux allures sexistes si le pouvoir du web et la globalisation de l’information, deux phénomènes contre lesquels on ne peut rien, n’était pas aussi omniprésents qu’ils le sont aujourd’hui !
Exemple de cyberactivisme qui ébranle à l’échelle international une marque jusqu’ici plutôt appréciée des consommateurs.
Et ce bien qu’elle ait déjà connu un bad buzz sur le marketing genré aux USA, lorsqu’elle a eu l’idée fabuleuse de lancer son Bic pour filles : « les femmes ont enfin leur stylo ! ».
A voir ou à revoir cette chronique délectable où Ellen Lee DeGeneres, humoriste et animatrice star d’un talk show ultra regardé par les américains ne se prive pas de se moquer de ce stylo. « Je pense qu’il y a eu plein de progrès pour les droits des femmes, nous avons le droit de voter depuis 1982 maintenant, dit-elle sur le ton de l’humour. On peut porter des pantalons, conduire la nuit, et là je viens de voir un truc qui me laisse penser qu’on peut aller plus loin. C’est un nouveau produit de Bic. L’entreprise qui a créé les stylos a imaginé « Bic for her ». Ce sont des stylos réservés aux femmes. Je sais ce que vous vous dites : il était largement temps que les femmes aient accès aux stylos ! ».
Là aussi, la mauvaise idée de marketing genré avait fait naître un bad buzz international.
«Mes dessins de chatons et de poneys se sont beaucoup améliorés.»
«A quoi doit-on s’attendre ensuite? Des femmes allant à l’université? Nous vivons dans un monde de fous!»
«Peut-être que Bic pourrait aussi sortir une nouvelle gamme de clés à molette, tournevis, perceuse électrique et ponceuses féminins, roses (ou violets), pour que je puisse faire mon boulot de réparatrice de vélo en arrêtant de me ridiculiser.»
Le marketing genré : un créneau pour se faire remarquer ?
A en croire cette nouvelle campagne de Bic, tout prête à penser que le bad buzz sexiste est une stratégie publicitaire pour la marque ! Très vite, les réseaux sociaux à travers le monde se sont emparés de cette publicité jugée sexiste pour s’insurger contre la marque avec des messages de revendication féministes. La marque est plus visible que jamais sur le web social !
Mais à en juger l’attitude des communicants de la marque face à leur (mauvaise) gestion de crise, il semblerait que le message ait volontairement été conçu dans l’idée d’une démarche d’empowerment féminin !
{Note pour le département marketing qui a validé cette publicité, changez d’agence conseil !}
Devant cette mobilisation internationale qui l’a très vite dépassée, la marque Bic a dans un premier temps tenté de se défendre en expliquant que ce slogan avait été emprunté à un blog consacré à des femmes chefs d’entreprise. Mais la déferlante de commentaires négatifs sur le web social se poursuit…
La stratégie de réponse à la crise menée par Bic ne s’est pas avérée concluante… aussi, très vite la marque a décidé à nouveau de supprimer ses premières excuses pour ENFIN, adopter une attitude conseillée en cas de crise sur les réseaux sociaux : s’excuser !
Comme dans la vie réelle lorsque des personnes s’estiment blessées par des propos, avant de se justifier, il convient de s’excuser ! Il est important dans une logique de gestion de crise sur le web social de savoir adopter une attitude civilisée et de faire des excuses lorsque de nombreuses personnes s’estiment blessées.
Ensuite viendra le temps des explications !
La société a finalement présenté ses excuses dans un communiqué. « Nous tenons à dire que nous sommes absolument navrés d’avoir offensé qui que ce soit. Cela n’a jamais été notre intention, mais nous comprenons tout à fait que nous nous sommes trompés. Cette publicité ne sera jamais réutilisée. Les commentaires qu’elle a suscités nous aideront à veiller à ce que quelque chose comme tel ne se reproduise plus jamais, et nous vous remercions pour cela. »
Malgré ses excuses, Bic n’en sortira pas indemne : un parti sud-africain a en effet annoncé son intention de saisir l’autorité nationale de la publicité. Et Bic y perdra sans doute aussi quelques « plumes » auprès des consommatrices du monde entier… pas sure que le bad buzz sexiste soit actuellement la stratégie de communication la plus payante…