La revue Po&sie publie des poèmes du poète ukrainien Mikhaïl Sémenko, (traduits par Eléna Kassirova). Elle consacre un dossier à ce poète, avec une présentation d’Irina Emelianova Kozovoï et un article de Jean-Claude Marcadé,« le panfuturiste ukrainien Sémenko ».
l’expressovent
Avec l’expressovent on se voit toujours.
On est devenus de bons copains.
J’entends sa voix muette qui court
et me perce, et tu connaîtras mon âme.
Embrasser le silence de nuit c’est encore mieux.
On n’entend que des cordes lointaines qui claquent
Les sorcières se cachent dans tous les lieux.
Les ressacs
1914
Le Conducteur
Je voudrais être
un conducteur dans un train de marchandises
et toute la nuit
la nuit triste
froide et pluvieuse
rester près du frein
en touloupe
se blottir et se pencher
regarder l’abîme qui court.
évoquer les jours passés
mais restés dans le cœur
comme des clairs rayons
évoquer de chers visages
endormis à jamais dans le cœur
à jamais
évoquer
évoquer
en cherchant dans le noir
(1916)
Un petit feu
Il attirait en mourant au loin ce petit feu
Toute la nuit il était au sommet.
…Il était loin au-delà de la rive opposée…
Il clignotait d’un rayon arrivant jusqu’à l’eau
Son inaccessibilité m’a étouffé.
Il se passait des chutes des étoiles
qui superrapides perçaient les nues.
…Il était loin au-delà de la rive opposée…
Il allait disparaître dans de grosses toiles
Il attirait par des sosies inconnus.
Comme un signe atavique de la joie subconsciente
Le petit feu caressait doucement la nuit.
…Il était loin au-delà de la rive opposée…
Le feu attirait par une petite tache tremblante
mais il a dû se faner devant l’infini.
Mikhaïl Sémenko, in revue Po&sie, n°151, pp. 12, 17 et 30.
Mikhaïl Sémenko est né en 1892 dans une famille cosaque et il est mort fusillé en 1937. Il est l’auteur de plus de trente recueils de poèmes rassemblés aujourd’hui en trois volumes.
On peut lire ici une biographie détaillée de l’écrivain.