La promesse était alléchante : tout juste récompensé du César du meilleur acteur, Pierre Niney incarnait dans Un Homme idéal (2015) un écrivain en mal d'inspiration, avant de connaître le succès grâce à une usurpation d'identité. On s'attendait à un thriller à la française, paranoïaque, littéraire et sinueux. Mais le film de Yann Gozlan, sorti en mars dernier, s'était avéré en dessous de nos attentes. Sa sortie en DVD nous a-t-il réconcilié avec cet Homme idéal ?
Synopsis : Mathieu ( Pierre Niney), 25 ans, aspire depuis toujours à devenir un auteur reconnu. Un rêve qui lui semble inaccessible car malgré tous ses efforts, il n'a jamais réussi à être édité. En attendant, il gagne sa vie en travaillant chez son oncle qui dirige une société de déménagement... Son destin bascule le jour où il tombe par hasard sur le manuscrit d'un vieil homme solitaire qui vient de décéder. Mathieu hésite avant finalement de s'en emparer, et de signer le texte de son nom... Devenu le nouvel espoir le plus en vue de la littérature française, et alors que l'attente autour de son second roman devient chaque jour plus pressante, Mathieu va plonger dans une spirale mensongère et criminelle pour préserver à tout prix son secret...
Critique du film : Après la découverte par hasard - et le plagiat - du journal d'un soldat pendant la guerre d'Algérie, Mathieu devient l'écrivain en vue du tout Paris littéraire. Mais le voilà bien embêté : il lui faut écrire son deuxième roman. D'autant qu'il s'est amouraché d'Alice ( Ana Girardot), professeure/conférencière/critique littéraire - on ne sait pas trop et c'est bien ça le problème - et riche héritière d'une grande famille bourgeoise avec une grande maison sur la Côte d'Azur. Une grande partie de l'action du film s'y déroulera, une fois que Mathieu aura démissionné de son job de déménageur (et oui, Pierre Niney en déménageur, il fallait oser.)
La suite des événements constitue un polar un peu trop attendu : Mathieu, empêtré dans ses mensonges, sombre dans la paranoïa, entre hallucinations prévisibles et cadavres difficiles à faire disparaître. Les fils blancs du scénario se voient de loin et, au-delà de celui de Pierre Niney, les personnages ont peu de relief. Et encore, Mathieu n'intrigue pas autant que le Chris de Match Point (2005), dans le genre héros de polar contemporain sinueux et schizophrène.
Sans être un navet, Un Homme idéal n'est pas non plus un bon film : les acteurs sont assez doués et l'histoire est plutôt divertissante. La mise en scène est propre mais ne révolutionne à aucun moment l'histoire du cinéma. Enfin, les références littéraires sont très minimes - bonjour la photo de Romain Gary, pour bien souligner la double identité de l'auteur. Le film constitue donc un bon téléfilm du dimanche soir, parfait pour " se vider la tête " sans se la prendre.
Critique du DVD :- Comparaison entre le storyboard et les scènes du film
Quatre scènes sont comparées, sur un même écran : storyboard originel (réalisé par Deemoes) versus scène tournée. Malheureusement, sans aucun commentaire, il est difficile d'y trouver un intérêt : certes, les scènes montrées sont des scènes importantes, mais pourquoi avoir suivi le storyboard à la lettre ici ? ou pourquoi s'en être écarté là ? ou encore : quel intérêt d'une telle symétrie dans cette scène ? Sans explication, cette comparaison storyboard/film, au-delà de nous rappeler cette importante étape dans la construction d'une œuvre cinématographique, n'apporte pas grand chose à cet Homme idéal.
- court-métrage du réalisateur Yann Gozlan : Écho (2006), 23′
Le deuxième bonus est plus intéressant : couronné d'un Grand Prix au festival de Gérardmer, Écho raconte l'histoire de Laurent ( Samuel Jouy) et de Carole ( Lubna Azabal), qui viennent d'emménager dans un appartement à Bordeaux et qui attendent leur premier enfant. Ce court-métrage dévoile d'une part que Yann Gozlan sait s'entourer d'acteurs talentueux, et d'autre part qu'il est obsédé par au moins deux choses : les bruits (ou le son, ou la musique, au choix), et la paranoïa. Sans en laisser entendre trop sur ce film de 23 minutes, disons que le réalisateur aime faire peur et questionner sa propre identité. La musique, très voire trop présente dans Un Homme idéal, a plus de sens ici, où elle devient inquiétante et obsessionnelle.
Sans être renversant, ce court-métrage prometteur montre le goût de Yann Gozlan pour les mises en scène paranoïaques et suffocantes. Si un Homme idéal manquait d'originalité et de souffle créatif, espérons que le prochain film du réalisateur - s'il s'en tient au thriller - saura nous tenir en haleine jusqu'au bout.
En savoir plus :