Max | Cours-y vite

Publié le 07 août 2015 par Aragon
How could you be so heartless ?
Comment pouvez-vous être aussi impitoyable ?
Christine and the Queens (Paradis perdus)

Madame s'était enfuie, seul à présent, monsieur pleurait dans son grand lit.

Madame s'était enfuie n'en pouvant plus de vivre ainsi : mortel ennui. Au fil du temps leur mariage - piètre accolage - de son pinceau tout rabougri avait couvert murs et plafonds de couleur d'encre, d'un affreux gris.

Madame s'était enfuie emportant son sourire, ses fossettes et ses mimis que lui, monsieur, depuis lurette ne voyait plus chez elle, n'arborait plus chez lui, sa vie se résumant ainsi : Sa Ferrari et son bizness, son chien Kiki, puis ses manies, sa queue de pie et son whisky.

Madame s'était enfuie la voix fluette la voix pressée la voix lui avait dit, laissé entendre, qu'il était temps de réagir, que ce n'était point-là, la vie. Monsieur n'avait rien vu venir, madame était sa chose, son pays conquis, dans le beau monde s'est ainsi : très chère épouse est vitrine, parfois gri-gri, ventre fécond puis bibelot qui s'empoussière en cagibi et dans la cage du ménage un canari.

Madame s'était enfuie, nue, une nuit, elle courait légère et vive dans la prairie pour retrouver enfin la vie. Monsieur git à présent dans son grand lit semblant surpris. Près de lui, encore fumant, son beau fusil d'argent, son hallali.

Madame s'était enfuie nue dans la nuit mais revêtue de ses envies, de son désir et de sa force, de sa folie. C'est ça me direz-vous la vie ? Bien mal acquis bien mal aimé reprend sa route, s'envole, preste, au paradis, ce paradis qui est en nous si on sait voir si son sait faire si on dit " oui ", si on sait dire que rien de pire dans la vie que tout ce gris couleur d'ennui.

Madame s'était enfuie...