de Paul Auster
(Éd. Actes Sud - 1993)
C'est une course de vitesse qui s'engage dès le premier chapitre de Léviathan.
En effet, quand Peter Aaron (P.A. comme Paul Auster) lit dans les journaux que, sur une route du Wisconsin, on a retrouvé le corps défiguré d'un homme qui s'est tué en manipulant un engin explosif, il n'hésite pas: il s'agit à coup sûr de Benjamin Sachs qui fut son très proche ami.
Et il entreprend aussitôt de reconstituer et d'écrire l'histoire de Sachs, pour que l'on sache quelles interrogations sur l'identité américaine ont conduit celui-ci à cette fin quasiment prévisible, et pour prévenir ainsi les mensonges des enquêteurs.
Dès lors, P.A. se lance sur toutes les pistes qui s'ouvrent, explore les étrangetés de conduite qu'il découvre (en particulier celles des couples et des femmes) et relève avec soin chacune de ces coïncidences qui ont quelque chose d'un rictus du destin.
Et soudain l'on comprend que l'une des clefs essentielles dans l'art de ce romancier si "différent", c'est sa manière d'être moins le portraitiste que le biographe de chacun de ses personnages. Le délire parfois mortel qui les anime nous devient aussi présent que si nous vivions parmi eux et, du coup, les lignes de fuite du récit, à la manière d'un trompe-l'oeil, s'inscrivent dans la perspective des nôtres.
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