Il était temps que j’y aille : l’exposition se terminait le 19 juillet. Et c’est peut-être à cause d’une certaine vision de l’Arcadie que j’ai eu envie de la visiter, une vision différente, évidemment, de celle de Bonnard (on verra une toile de Lüpertz représentant une statue de Maillol, comme on a vu une statue de Maillol dans l'exposition de Bonnard). La présentation de cette rétrospective de Markus Lüpertz choisit une chronologie à rebours. C’est un parti-pris que je ne cherche pas à comprendre, sinon qu’il nous embarque immédiatement dans un bateau avec Ulysse, et impose ces statues en bronze peint qui font souvent référence à l'antiquité, notamment par des torses sans bras. Mais les références ne s’arrêtent pas là : dans la peinture aussi, on trouve David, Poussin, Goya et d’autres. Ce qui donne à l’ensemble une impression de familiarité. On se dit que ces oeuvres s’inscrivent bien dans l’histoire de l’art (et j’ai plusieurs fois pensé à Cueco). Mais, bien sûr, la personnalité de Markus Lüpertz, son travail, son exploration de la sculpture et de la peinture s’expriment avec évidence soit par l’allure de ses nus qui marchent, soit par les couleurs et les formes qu’il étale sur ses toiles. Les coques de bateaux, les coquilles d’escargots, les casques m’ont semblé des crânes (ou l’inverse) et j’ai passé beaucoup de temps dans la salle intitulée « Hommes sans femmes, Parsifal », sans doute à cause de ces crânes qui apparaissent sous les visages. La perruque de Mozart, le coq au poing d’un soldat, le triangle dans une façade d’immeuble, il fallait entrer dans les détails, bien que la toile ou la sculpture semble résister à cette pénétration, de même qu'il fallait accepter cette façon d'inachever qui particularise cet artiste (c'est peut-être aussi pour ça que j'ai pensé à Cueco), et ne pas trop s’arrêter aux citations posées ici et là sur les murs du Musée qui risquaient de détourner de l’oeuvre elle-même.