Un verbe aux sens contradictoires, exprimant à lui seul l'ambivalence de l'être et l'une des clés de notre époque maniaco-dépressive. Ce terme, c'est " revivre " : renaître à nouveau mais aussi se replonger en soi-même, ou se laisser rattraper " par un passé qui ne passe pas ". Une double expérience en plein coeur du dernier livre de Frédéric Worms, dont la lecture tombe à pic en cette période estivale si propice à la méditation et à la découverte de soi. " Chaque année, sans se lasser, le merveilleux printemps raconte à nouveau l'histoire de cette résurrection ", notait Vladimir Jankélévitch dans son Traité des vertus.Et à l'été d'amener le sentiment " d'être vivant " à son comble ... sans pour autant oublier l'hiver. En ce sens, le sous-titre choisi par le philosophe, " éprouver nos blessures et nos ressources ", est lourd de signification. Quiconque a connu la mort, la maladie ou le chagrin, a déjà été traversé par cette sensation troublante lorsque la vie " reprend " avec un immense soulagement. Un nouveau départ. Cette tension permanente, entre résistance et délivrance, fait tout l'objet de la pensée de l'auteur, pour qui " l'avenir n'est pas un horizon, toujours reculé, mais une avancée, incessamment reprise. C'est le fait de marcher et de voir qui suscite l'horizon du monde et de l'action ". Ainsi, ses nombreuses références à Dante, Nietzsche ou Kierkegaard ne présentent pas seulement l'occasion de réviser ses classiques, mais bien de renouer avec l'intensité de son existence malgré l'agitation du monde contemporain. Pour prendre " soin des blessures de chacun mais aussi des ressources de tous ". Un art de " revivre " qui pourrait bien être le seul possible aujourd'hui.
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