Les clients de celle qui est présentée comme la plus grande banque du monde peuvent donc désormais profiter d'un retrait d'argent au distributeur pour acheter un produit d'assurance, en quelques minutes, sans aucune intervention humaine. Naturellement, avant de parvenir à une solution viable, il a fallu rendre les contrats non seulement extraordinairement simples à comprendre mais aussi suffisamment attractifs pour devenir susceptible de convaincre l'utilisateur d'adhérer sur une impulsion.
Avant de s'interroger sur la possibilité de transposer une approche de ce genre dans nos contrées, il convient de remarquer que l'assurance-vie n'est apparue en Chine que très récemment. Les opportunités commerciales sont donc aujourd'hui colossales pour les acteurs qui s'aventurent sur le marché, comme le souligne, entre autres, l'objectif d'AXA d'atteindre 100 millions de clients d'ici 2030 ! Une telle ambition justifie largement d'expérimenter des méthodes de distribution inédites, plus adaptées à une population découvrant cette nouvelle classe de produits.
Alors, certes, le contexte local est très particulier et peut laisser croire que l'exemple chinois n'offre aucun enseignement pour les pays occidentaux. Il me semble que ce serait commettre là une grave erreur. En effet, ce que démontrent AXA et ICBC est au contraire universel : en partant d'une situation vierge, dans laquelle aucune habitude ne s'est déjà formée, ni chez les clients, ni dans les institutions financières, il s'avère possible de transformer une assurance-vie – généralement perçue comme un support complexe – en un produit accessible en libre service.
Les implications de ce renversement de perspective sont considérables. Ainsi, l'initiative souligne – par contraste – les dérives auxquelles cèdent nos institutions financières, qui élaborent des solutions impossibles à comprendre par un être humain normalement constitué. Elles peuvent légitimer l'existence de conseillers, dont le rôle est d'expliquer les subtilités d'un contrat (si, toutefois, ils les maîtrisent eux-mêmes), mais il est pour le moins douteux qu'elles aient une quelconque valeur ajoutée pour les clients.
Le jour où les consommateurs réussiront à se libérer de la croyance – ancrée par des décennies de relations avec des banquiers s'affichant comme les experts incontournables – que « la finance, c'est compliqué » et qu'ils auront à leur disposition des présentations de produits claires, en langage courant, la vente d'assurance-vie sur un GAB (ou sur internet) cessera d'être considérée comme une incongruité. Or, en explorant des offres alternatives, les jeunes générations sont en bonne voie de réaliser cette vision.