Difficile de ne pas celer une déception globale. Plutôt que de feindre une nostalgie émue, le réalisateur Chris Colombus livre une vision blafarde où les jeux type Arcade s’idéalisent et se chargent de clichés. Ce n’est pas tant une mauvaise idée mais bien une réalisation opportuniste où peu ou prou distingue Pixels d’autres comédies candides à la morale bien américaine.
Le bon sentiment des années 1980.
Donkey Kong constitue le jeu le plus difficile d’après les personnages de Pixels. Fort Boyard est une marelle en comparaison …
En 1982, les jeux vidéo acquièrent un statut médiatique et social lors de la compétition mondiale du jeu vidéo. Le premier public visé, ce sont les enfants des années 1980 désireux de se distinguer, de s’amuser et d’éventuellement faire carrière grâce à la coupe du monde sur bornes arcades. A l’issue de l’événement, une VHS d’enregistrement est envoyée dans l’espace par la NASA pour établir un contact divertissant avec d’autres formes de vie. 30 années plus tard, 4 enfants devenus adultes, rêvent tendrement sur ces bons souvenirs. De mystérieux envahisseurs, mal définis, se sont mépris sur le contenu de la cassette vidéo et imposent trois parties sur l’ensemble de la planète Terre.
Initialement, les premières jalons posés par le court-métrage de Patrick Jean (Disponible ici sur Dailymotion.), s’annonçaient prometteurs. A l’écran, le film divague d’idées reçues en images préfabriquées : c’était mieux avant et être un paumé socialement va de conserve avec le jeu vidéo comme loisir. L’humour, puisqu’il en est question, coudoie des schémas pris plus au sérieux jusqu’à l’indigestion : Adam Sandler rencontre une femme, seule, qui s’avère conforme à la propre solitude du joueur d’arcade.
Le créateur de Pac Man, joué par l’acteur Akiyawa Denis, impressionne le temps d’un instant l’équipe des joueurs d’Arcade …
Sans reliefs, Pixels progresse en toute linéarité. Du point A jusqu’au point B du récit, un plan sans accroc défile, non sans agacement tant le potentiel est gâché de monologues en monologues ou d’échanges plats en phrases simples. Pire que Terminator Genisys, rares seront les saillies marquantes en dehors des grossièretés inédites dans la part d’ Eddie Plant aka Peter Dinklage.
La platitude décriée parait peut-être facile : elle est néanmoins le fruit d’un constat agacé. Par définition, Pixels avait les moyens d’élever son intérêt, les partenaires majoritaires étant dûment payés, afin de rendre ces quelques 1h46 divertissantes. Un statut visiblement impossible à propos du film Pixels.
Une réalisation promotionnelle et sponsorisée ?
Une star de Game of Thrones peut en cacher d’autres : Sean Bean aka Eddard Stark dans la série est, lui aussi, de la partie.
Les bribes scénaristiques laissaient songer à un mélange suffisant entre la science-fiction, une bonne dose de références baignées dans les années 1980 et un fameux optimisme final prévisible. En quelques mots, un bon équilibre appelait à croiser un divertissement à la manière de Paul, des références ajustées à la manière de Scott Pilgrim V.S. The World et des fins héroïques dont Ghostbusters a démontré l’efficacité. A chaque minute, Pixels s’installe un peu plus de ces références citées en reprenant épisodiquement quelques éléments clefs : un coup d’épuisette dans la culture pop et science-fiction la présence de high-score à l’écran, la formation d’une équipe à priori improbable … Tout ceci sans atteindre l’étape de divertissement pour, finalement, se limiter à être un véritable film sandwich. Rarement les allusions publicitaires supposées subliminales n’auront été si criantes, forçant alors notre regard à voir la marque Sony comme le partenaire numéro un, nos oreilles à entendre ici et là le mot PlayStation 4 et pour finir, à reconnaitre plusieurs extraits de The Last of Us. Fort heureusement, plusieurs partenaires sont en compétition et se disputent l’occasion d’un espace publicitaire d’1h46. Le résultat, lui, perd le sens littéral du divertissement, à savoir de nous détacher de préoccupations quotidiennes : Pixels se cantonne à être un publicitaire constant.
Côté budget, l’essentiel se plaçait également du côté des acteurs à la mode et de quelques stars du monde sportif.
Peut-on en vouloir vertement aux acteurs de Pixels ? Une fois de plus, la réalisation de Chris Colombus a choisi de répartir son budget en engageant des acteurs illustres dans la comédie (Adam Sandler), des visages (re)connus de toutes et de tous dans la série Game of Thrones puisque Sean Bean et Peter Dinklage deviennent un peu plus que des invités dans ces péripéties hollywoodiennes. Une certaine Serena Williams n’a pas su décliner l’invitation, rappelant maladroitement le souvenir d’un certain Asterix : Aux Jeux Olympiques où le budget des invités du monde sportif explosait disproportionnellement à la qualité finale du film … Un peu désespéramment, Pixels n’a pas su créer une interaction maligne à tout ce beau petit monde. L’acteur, habituellement dans la peau du plébiscité personnage de Tyrion Lannister se réserve quelques tirades dignes d’un sale gosse, une place gardée qui tend à coller à la peau de Peter Dinklage.
Visuellement, le film dégage pourtant quelque chose. Une qualité insuffisante pour rehausser la totalité du film mais qui mérite d’être soulignée.
Malgré des efforts visuels louables, rien n’empêche la chute. Esthétiquement, là, Pixels a trouvé un équilibre capable de rendre hommage à l’apparence 8 Bits et à des pixels d’ombres et de lumières ce qui, en soi, relève d’une qualité. En dehors de cela, seuls quelques milliers de dollars différencient Pixels d’un confrère cinématographique assumant clairement son statut de nanar pour le revendiquer haut et fort : Sharknado ! L’absence de rebondissements donne naissance à un résultat sirupeux où la légèreté d’une époque et son prétexte sont dans l’incapacité d’être dotés de quelconques nuances …
Avec Pixels, l’on espérait au minimum un divertissement plus référencé, plus audacieux. En lieu et place, Pixels miroite une époque, en partie imaginée. En se restreignant aux années 1980, Pixels manque probablement une partie essentielle du public : ceux qui, à la place de Galaga ont joué plus tard à Street Fighter, celles qui ont préféré Mario Bros à Donkey Kong et surtout, une audience un peu plus jeune. Le game-overdose est là …
On a aimé :
+ L’aspect visuel, plutôt réussi.
+ Une réplique grossière taillée sur mesure pour Peter Dinklage : « Pac Man ? J’en ai fait ma pouffiasse perso’! »
On a détesté :
– Le scénario. Ou le manque de scénario.
– Des clichés à la pelle plutôt que des références bien trouvées.
– Des dialogues plats.
– Des références limitées aux années 1980.