Stefan Zweig voue une admiration notoire au célèbre poète Rainer Maria Rilke. Au point d'en ressentir quelque inhibition ainsi qu'il s'en ouvre à son amie, l"écrivain suérois Ellen Key:
Vienne,
I.Rasthausstraße,17
9.II.06
Très chère et honorable amie,
C’est curieux : voilà deux jours, j’ai vidé mon bureau de tous les livres qui l’encombraient et il ne reste sous mes yeux qu’un mince volume, le Livre des heures de Rilke Je le lis sans cesse et j’ai souvent pensé à lui et à vous. J’ai même écrit une longue lettre à Rilke, puis je l’ai déchirée. Elle était trop intime, trop personnelle, et je ne sais pas je suis pour Rilke davantage qu’un vague nom, entaché de surcroît du mauvais renom du littérateur. Je viens de vivre eux jours dans sa vie-l’a-t-il senti ? S’il ne risquait pas de me suspecter de vouloir lui présenter quelque requête, je lui irais bien des choses sans aucun motif extérieur."
Stefan Zweig, Correspondance 1897-1919, Préface, notes et traductions de l’allemand par Isabelle Kalinovski, Ed. Grasset, 2000, 384 pp ( In Le Livre de Poche, 2005, 480 pp)