Oui, donc, comme je le disais hier, avec Dorian, nous avons fêté nos retrouvailles. Pensez, deux semaines sans dire du mal du milieu. Argh ! C'était insupportable.
Rendez-vous dans un restaurant de la rive gauche dont je tairai le nom étant donné que nous y avons fait pas mal de rencontres... et que nous tenons à rester anonymes encore un long moment. Il y a des rapprochements faciles.
Outre nos histoires de nanas, nous avons rapidement conversé sur le sujet du moment, la rentrée littéraire.
Dorian : A Casablanca, j'ai lu une dizaine de livres, pas plus. Et toi ?
Rasti : Sur les 727 romans français et étrangers qui sortent à la rentrée, j'en ai lu 15. Je n'ai pas pu faire plus. Pas assez de temps.
Dorian : Comment veux-tu faire mieux ? Même si tu voulais lire uniquement les français, ce serait impossible en un été. Il y en a 493... Je déteste les critiques qui prétendent tout lire. Ils ont une journée de 172 heures ou quoi ?
Rasti : Tu sais bien qu'ils sont cons et suffisants !
Dorian : Et nous, nous sommes intègres ? Ne me fait pas rire et passe moi encore un peu de vin.
Rasti : Tiens ! Sinon, tu as aimé quoi, toi ?
Dorian : Le dernier Philippe Claudel, Le rapport de Brodeck. Une écriture élégante, rien de scabreux et une quête de vérité stupéfiante. En plus, le type est resté simple. Un vrai gentil.
Rasti : Moi aussi, je l'aime beaucoup. Mais le livre que j'ai préféré est celui d'Olivier Adam, A l'abri de rien. Belle histoire que cette femme déçue de son existence et qui va briser sa vie pour aider des réfugiés kosovars de Sangatte. Un roman très sensible.
Dorian : C'est parce que toi, tu es un grand sensible, mon ami. Tiens, bois un coup, on va pouvoir parler du livre des frères d'Arvor, J'ai tant rêvé de toi. Ils vont obtenir un prix important cette année, tu vas voir.
Rasti : Oh non ! Pitié, épargne moi ça ! Tout le monde dit du bien de ce roman malsain. Moi, les bras m'en sont tombés. Parler d'anorexie, de boulimie sexuelle, de rapports à la paternité, quand on connaît la vie de Patrick. Là, il déconne à plein tubes. La prochaine fois que je le croise, tu peux être certain que je ne lui dirais pas.
Dorian : Pourquoi tu éclates de rire ?
Rasti : C'est le vin. Ca me rend gai, ressers moi ou je te parle du dernier Nothomb, Ni d'Eve ni d'Adam.
Dorian : Tu n'en diras pas grand mal. C'est plutôt un bon cru.
Rasti : Oui, c'est vrai. Je suis passé la voir tout à l'heure au Virgin de Champs. C'était bourré. Comme elle.
Dorian : Comment va-t-elle ?
Rasti : Visiblement bien, mais comme elle était en pleine représentation d'elle-même, du coup, je ne sais pas trop. Complètement fofolle en tout cas. Elle veut venir dans mon émission.
Dorian : Et tu as accepté ?
Rasti : Je réfléchis à la question. Je n'aurai que huit invités. Je dois faire une sélection draconienne.
Dorian : Et Yasmina Reza ? Tu l'invites. Tu es l'un des rares à avoir reçu le SP (service de presse).
Rasti : Oui, mais je connais bien X chez Flammarion... Son livre L'aube, le soir ou la nuit n'est pas dénué d'intérêt même s'il n'y a aucun scoop ni révélations fracassantes. Elle a voulu peindre le portrait littéraire d'un " homme de convictions " mais " bourré de paradoxes ". C'est réussi. Comme tous les médias dissèquent en long en large et en travers, je ne vois pas ce que je peux apporter de bien nouveau. Et puis, tu veux que je te dise la vérité. Je ne l'aime pas. Je la trouve antipathique.
Dorian : Pas très déontologique cette raison.
Rasti : Je t'emmerde. Sers moi du vin et parle moi de la cousine de Frédéric.
Dorian : Hors de question ! Géraldine Beigbeder, quelle imposture ! Ecoute le titre : Nema problema ou Petites chroniques transbalkaniques au pays des Sponsors. Ca pue le marketing à plein nez. C'est censé être un road-movie burlesque et débridé, c'est juste un scénario mal ficelé et absolument pas littéraire.
Rasti : Tu dis ça parce qu'elle est scénariste.
Dorian : Oui, mais pour des films de Luc Besson et Fabien Onteniente, tu vois le genre.
Rasti : Des films d'auteurs quoi !
Dorian : Sinon, je me demande si Nuit Ouverte de Clémence Boulouque est aussi bon que Mort d'un silence ... Je ne l'ai pas encore lu.
Rasti : Pas lu non plus. Par contre, la Boulouque, hum !!!
Dorian : Bois encore un peu pour oublier qu'elle ne sera jamais pour toi.
Rasti : 'Tain ! Je suis rond comme une queue de pelle.
Dorian : Sérieusement, j'espère que Mazarine Pingeot ne va pas se faire congeler avec son bouquin Le cimetière des poupées qui ne " serait " pas inspiré de l'affaire Courjault.
Rasti : Bon, ça va, tu es aussi bourré que moi.
Dorian : On écrit quoi sur notre blog ? Je n'ai pas envie que l'on fasse le bilan des sorties, comme tous les blogs littéraires qui se respectent. Ils racontent tous la même chose.
Rasti : Ben, on est quand même bien obligé. Je suppose qu'on attend de nous quelques appréciations remarques et tacles bien sentis sur certaines nouveautés.
Dorian : Pfff. Tu vas voir que l'on finira par dire du bien. C'est proprement écoeurant.
Rasti : Si c'est pour évoquer le dernier Jean Hatzfeld, La stratégie des antilopes, ça ne me dérange aucunement.
Dorian : N'en parle pas alors ! Il faut rester incisif.
Rasti : Tu ne parleras pas du nouveau Modiano, Dans le café de la jeunesse perdue, alors ?
Dorian : Non, promis Mais il faudra évoquer le gros scandale chez POL.
Dorian : Tu n'es pas au courant ? Camille Laurens s'est fait virer de chez POL parce qu'elle accuse Marie Darrieussecq et son roman Tom est mort de plagiat .
Rasti : Mais c'est dingue !
Dorian : C'est vraiment n'importe quoi, cette rentrée littéraire. Ah, Casablanca... Et vivement que Ripley rapplique.
Rastignac