Depuis dimanche, les éleveurs bloquent plusieurs routes de l'ouest de la France, paralysant notamment une partie des accès à la ville de Caen. Depuis plusieurs mois, et après de nombreuses réunions, ils demandent des mesures fermes du gouvernement pour une hausse des prix de leurs produits. Mais quelles sont les raisons exactes de leur colère ? Francebleu.fr fait le point.
par Julien Baldacchino, France Bleu
Dans la filière agroalimentaire, il y a trois principaux acteurs : les producteurs, éleveurs ou cultivateurs, d'un côté, qui fournissent les matiètres premières ; les distributeurs, et en particulier la grande distribution, qui revendent les produits aux consommateurs ; et entre les deux, les industries de transformation, comme les abattoirs ou les laiteries.
Sur le prix que vous payez pour acheter, par exemple, un steak de boeuf, une partie correspond au prix que l'industrie a acheté la viande à l'éleveur, une autre à la marge que touche l'industrie au moment de la revente au distributeur, et enfin, la dernière partie est la marge du magasin.
Quel est le problème ?
Ces prix sont fixés par différents mécanismes, comme par exemple le marché de Plérin (Bretagne) pour les prix du porc, ou des accords avec des entreprises privées et des coopératives pour le lait. Or, ce que reprochent les éleveurs, c'est justement que leurs matières premières ne leur sont pas achetées assez chères.
Concrètement, les éleveurs sont actuellement obligés de vendre leurs produits moins cher que ce qu'ils coûtent à produire. Le porc coûte 1,38 euro le kilo, alors qu'il coûte 1,40 euro à produire. Le lait est pour sa part payé 300 euros par tonne, alors que, pour couvrir les coûts de production, il devrait être acheté 340 euros par tonne.
Quant au boeuf, il faudrait que son prix atteigne 4,50€/kg : le 17 juin dernier, les abatteurs et les distributeurs se sont engagés à faire monter le prix de la viande de cinq centimes par semaine. Pour l'heure, l'augmentation totale n'est que de cinq centimes.
A qui la faute ?
Les distributeurs et les industriels se rejettent la faute : la grande distribution assure avoir respecté ses engagements sur le prix de la viande, mais note que "l'argent ne va pas dans la poche des éleveurs", accusant de façon tacite les industries de transformation. Un rapport doit être rendu ce mardi après-midi sur cette question.
Un autre secteur est dans le collimateur des éleveurs : la restauration collective, notamment les cantines. Alors que la viande importée ne représente que 20% de la consommation de viande en France, elle représente 70% des viandes cuisinées dans la restauration collective.
Et ce n'est pas tout : d'autres circonstances internationales, comme l'embargo russe sur la viande depuis août 2014, ou la crise grecque qui a causé la fermeture des banques, ont aggravé la situation (la France fournit en effet un tiers de la viande consommée en Grèce).
Quelles solutions ?
Faut-il forcer l'augmentation des prix d'achat de la viande ? C'est l'une des solutions envisagées... Mais elle ne suffirait pas. Car les exploitations agricoles sont embourbées dans de nombreuses difficultés de trésorerie et d'endettement. Selon la FNSEA, elles ont en tout un milliard d'euros de dettes. Le syndicat demande la mise en place d'une "année blanche", où l'Etat paierait à leur place les intérêts des dettes.
Ce mardi, pour faire face aux blocages des éleveurs, François Hollande a annoncé qu'un "plan d'urgence" serait annoncé mercredi en Conseil des ministres, sans préciser ce qu'il prévoirait.
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