Mike Krol – Turkey

Publié le 20 juillet 2015 par Hartzine

Mike Krol a sans doute compris quelque chose de la vie que d’autres ne font que survoler ou cherchent encore. Espiègle comme un graphiste et blasé comme un punk, il a choisi de foutre sa vie en l’air en passant de l’un à l’autre et de sortir en septembre un troisième album, Turkey, aussi foutraque que ses punchlines. Dans son premier LP I Hate Jazz en 2011, à la texture lo-fi complétée par une voix aussi nasillarde que sa guitare, des lyrics balancés comme une mauvaise récitation de CE2 et bourrés de préoccupations aussi superficielles que son approche de la composition, le kid nous vendait avec fraîcheur le quotidien futile d’un Milwaukee lycéen et désabusé. Deux albums et un déménagement plus tard, le désormais Angeleno n’a pas changé sa recette d’un ingrédient, débitant des morceaux de rock potache dépassant rarement la minute et demie dans un enthousiasme acharné et communicatif à ne rien prendre au sérieux, jusqu’à la neuvième et ultime piste, une courte mélodie pianotée à la conclusion volontairement bâclée.

L’adulescent cherche la facilité séduisante d’une approche brute et impudique, dévergondée comme une teenager californienne s’ébrouant ivre et topless dans les vagues nocturnes d’une série B avant de se faire bouffer le cul par un squale — ou un surfeur. Le fuzz crépite de sentiments contradictoires et capricieux, c’est la crise à retard d’un ado soupe-au-lait, indocile, qui refuse de rentrer chez lui dans Suburban Wasteland: “And when I’m in the streets late at night / I start to think too much about my life”. Inférieur à 20 minutes, Turkey ne se sirote pas mais se boit cul-sec comme une Budweiser ouverte avec les dents pour épater les filles: c’est un album du show-off, de la démonstration, dans lequel Krol ne se cache pas derrière la saturation et la réverb mais les revendique comme une posture, une charte mélodique dans sa copy strategy musicale. Frais et accessible, ce nouvel album, à paraître à la rentrée chez Merge Records et dont on peut déjà écouter un extrait ci-dessous, ne révolutionnera pas l’histoire du garage rock mais réjouira les nostalgiques de Jay Reatard, dont on se rappellera qu’il a claqué comme il a vécu: en refusant de quitter l’adolescence.

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