Petit Poilu, tome 17 – de Céline Fraipont et Pierre Bailly (Dupuis)
Pour ce deuxième week-end du mois de juillet, Case Départ vous propose une petite sélection. Les vacances, c’est aussi l’occasion de rattraper notre retard, sur un nombre important de sorties. En vous ouvrant sa bibliothèque, le blog met en lumière de très bonnes bandes dessinées. Nous passons au crible, les albums suivants : L’étrange vie de Nobody Owens est un album fantastique très réussi de Neil Gaiman, la dix-septième aventure de Petit Poilu signée Céline Fraipont et Pierre Bailly, le cinquième volume du formidable manga Erased, Lolita la taupe qui cherche l’amour à la loupe : un album pour enfant de Néraudeau et Méhée, le premier volet du thriller Ajin, le carnet de bord dessinée du Procès Carlton et le premier tome de la série Mission Osirak. Bonnes lectures.
L’étrange vie de Nobody Owens
Neil Gaiman adapte son propre roman L’étrange vie de Nobody Owens (éditions Albin Michel) avec l’aide de P. Craig Russel, un conte gothique étonnant, édité par Delcourt.Résumé de l’éditeur :
Nobody Owens serait un garçon normal. S’il ne vivait pas dans un cimetière, élevé par des fantômes, avec un gardien qui n’appartient ni au monde des vivants, ni à celui des morts. De nombreuses aventures attendent le petit garçon dans le cimetière : un homme Indigo, un portail vers une cité abandonnée envahie par des goules, l’étrange et terrible Sleer. Mais à l’extérieur, Jack attend pour le tuer.Jack, un tueur se rend dans une maison familiale. Là, il égorge les parents et la fille du couple, mais il laisse s’échapper le plus petit, un garçon de 3-4 ans. Apeuré, il se réfugie dans le cimetière voisin. Alors que le tueur réussit à s’introduire dans le lieu, il est accueilli par Silas, sorte de vampire qui le raccompagne à la sortie. Entouré de fantômes et d’esprits, le petit garçon n’est absolument pas affolé. Ses parents biologiques mués en fantômes, expliquent qu’ils viennent de mourir. Attendrie par la situation, Dame Owens décide de l’adopter. Le couple, décédé depuis plus de deux siècles, devient alors ses nouveaux parents, avec l’assentiment des autres pensionnaires du cimetière. Il est alors rebaptisé : Nobody Owens.A partir de ce moment-là, Nobo grandit entouré d’une grande famille, apprend à lire à partir des pierres tombales, reçoit des cours de Silas, cet être fantastique qui a la possibilité de parcourir le monde la nuit tombée, devient ami avec Scarlett, une petite fille vivante ou découvre le plus vieux personnage du cimetière Caïus Pompeius.
Auteur de l’excellent comics Sandman, Neil Gaiman réussit parfaitement l’adaptation de son roman. Même si le récit est un peu poussif dans les premières pages, il s’avère accrocheur, intelligent, poétique et teinté d’un bel humour. L’univers du cimetière est finalement pas si glauque que cela, plutôt empli de vie, amusant par certains personnages, très dans l’entraide et l’amitié. Tous apportent quelque chose à Nobo, le font grandir. Une vraie famille pourtant étrange et décalée s’installe autour de lui. Alors que le lieu pourrait rapidement tourner au gore, il est ici positif, d’une belle chaleur (un comble pour des êtres décharnés). Le point fort de ce premier livre est donc cette opposition, cette ambivalence entre le réel et le surnaturel, entre la vie et la mort, mais qui se rejoignent en la personne du petit garçon. Les créatures surnaturelles et fantastiques sont au rendez-vous : vampires, loup-garou et revenants. D’ailleurs Nobody est souvent menacé par des esprits malveillants au fil des pages. Admirateur de récits du 19e et 20e siècle, Neil Gaiman rend hommage ici à Rudyard Kipling en mettant en scène un très jeune garçon élevé dans un univers inconnu de lui (cimetière et fantômes) comme l’avait fait son illustre aîné en mettant en scène Mowgli accueilli par des animaux dans Le livre de la jungle. Une belle transposition pour un beau clin d’œil.L’étrange vie de Nobody Owens fut lauréat de nombreux prix (la Médaille Newbery de la fiction jeunesse 2009, le Prix Hugo en 2009, le Prix Locus du meilleur livre pour jeunes adultes 2009 et la Médaille Carnegie de la fiction jeunesse 2010), notamment grâce à la partie scénaristique mais aussi la partie graphique. Philip Craig Russel est chargé de coordonner les différents dessinateurs (Tony Harris, Scott Hampton, Galen Showman, Jill Thompson et Stephen B. Scott), se contentant d’illustrer le premier chapitre. Les ambiances atypiques et différentes voulues par l’histoire sont portées par les univers des 6 auteurs.
- L’étrange vie de Nobody Owens, livre 1/2
- Scénariste : Neil Gaiman
- Dessinateurs : Collectif sous la coordination de Philip Craig Russel
- Editeur: Delcourt, collection Contrebande
- Prix: 19.99€
- Sortie: 20 mai 2015
Petit Poilu
Dans la galaxie des albums jeunesse, Petit Poilu tient une place à part. La série muette pour primo-lecteurs de Céline Fraipont et Pierre Bailly est un petit bijou. Elle met en scène un drôle de petit personnage noir et tout plein de poils, espiègle et facétieux, à qui il arrive de nombreuses aventures, très bien écrites et qui font réfléchir (et ce n’est pas le cas pour toutes les séries). A nous deux ! est le dix-septième volume de la série.Résumé de l’éditeur :
Petit Poilu explore les coulisses d’un théâtre de marionnettes. Il y rencontre les mains de Nono le marionnettiste qui, très inspiré, fabrique une marionnette à l’image de notre Petit Poilu fort intrigué… Et plus encore quand ce double de chiffon se met à copier toutes ses attitudes, provoquant chez notre petit héros des réactions pour le moins étonnantes ! Une fable muette et burlesque qui parle de l’image de soi, pour les tout jeunes lecteurs, dès 4 ans.
A l’instar de la formidable série Anuki (Maupomé et Sénégas, La Gouttière), l’univers de Petit Poilu est riche, varié, intéressant et d’une grande intelligence. Ce monde poétique, merveilleux et décalé est porté par la personnalité forte du petit héros de papier : Drôle d’être vivant qui ne ressemble à aucun animal connu, il est poilu de la tête aux pieds ; son visage est barré d’un large sourire et d’un gros nez rouge, qui le rendent tout de suite sympathique aux yeux des enfants. Il vit dans un petit pavillon avec son papa, sa maman et sa grand-mère. Tous les matins, il part pour l’école, sac sur son dos, mais comme pour chacun des volumes de la série, il n’arrive jamais à l’école, attiré par la curiosité d’un objet ou d’un personnage.Petit bonhomme muet comme ses aventures, il s’adresse aux primo-lecteurs à partir de 4 ans. Par sa soif de découvrir le monde qui l’entoure, il entraîne les lecteurs dans ses pas. Malice, intelligence et poésie sont au cœur des scénarios de Céline Fripont. Pour son dix-septième volume, le petit être est attiré par un grand miroir psyché posé là sur une pelouse. Alors qu’il grimace pour s’amuser, il est happé de l’autre côté. Il arrive alors dans l’atelier d’un marionnettiste, ; qui surpris, décide de confectionner une poupée à son effigie. C’est le début des facéties devant un public entre l’homme et Petit Poilu.L’humour subtil visible au début de l’album (la belle osmose entre le marionnettiste et le héros) se transforme en légère humiliation lorsque l’homme le singe, se moque de lui : Petit Poilu est ridiculisé. Furieux, il ira jusqu’à se battre. Voilà la grande force de la série : aborder des thèmes forts de la vie et les confronter aux émotions que pourraient ressentir les enfants dans de telles situations. L’introspection et la quête d’identité sont donc traitées avec humour et subtilité.Pierre Bailly démontre encore une fois tout son talent dans cet album. L’auteur du formidable Ludo (Denis Lapière, Dupuis) propose un découpage quasi cinématographique en gaufrier de 9 grandes cases où son trait d’une belle simplicité permet de la fluidité dans la lecture. Les décors a minima dans ces grandes vignettes mettent magnifiquement en valeur les personnages, qui doivent être de suite identifiés par le jeune lectorat.
Petit Poilu : un bijou, une perle pour les tout-petits !
- Petit Poilu, tome 17 : A nous deux !
- Scénariste : Céline Fraipont
- Dessinateur : Pierre Bailly
- Editeur: Dupuis
- Prix: 9.50€
- Sortie: 12 juin 2015
Erased
Le manga-addictif Erased est de retour dans les bacs des libraires. Edité par Ki oon, Kei Sanbé dévoile le cinquième volume de ce formidable thriller temporel.Pour vous rafraîchir la mémoire, vous pouvez relire les différentes chroniques de 4 précédents tomes, en cliquant ici.
Résumé de l’éditeur :
Satoru décide de cacher Kayo pour la mettre à l’abri et alerter les autorités sur la maltraitance dont elle est victime. Avec l’aide de son ami Kenya, il installe la fillette dans un bus désaffecté. Mais voilà qu’un inquiétant visiteur fait son apparition, les forçant à déménager !Grâce à leurs efforts, ainsi qu’à l’intervention de M. Yashiro et de la mère de Satoru, Kayo est confiée à la garde de sa grand-mère. À présent que sa camarade est sauvée, le jeune garçon relâche un peu sa vigilance, cependant le tueur en série court toujours…
La suite, vite !
- Erased, volume 5
- Auteur: Kei Sanbe
- Editeur: Ki oon
- Prix: 7.65€
- Parution: 25 juin 2015
Lolita la taupe
qui cherche l’amour à la loupe
Alexandra Néraudeau et Loïc Méhée, deux auteurs poitevins dévoilent leur troisième album en commun : Lolita la taupe qui cherche l’amour à la loupe, un album pour enfants édité par Les 400 coups.Pour lire la suite de la chronique sur Comixtrip, cliquez ici.
Ajin
Après une mort accidentelle violente, par une magie puissante, Kei ressuscite devant les yeux ébahis des passants. Ajin, comme le nom de ces mystérieuses créatures revenues à la vie, est le titre de la nouvelle série Glénat, un manga de Tsuina Miura, mis en image par Gamon Sakurai.Résumé de l’éditeur : Renversé par un camion en rentrant de l’école, le jeune Kei meurt sur le coup. Mais quelques instant plus tard, il ressuscite mystérieusement. Dès lors, sa vie de lycéen bascule. Une étrange organisation gouvernementale tente par tous les moyens de le capturer afin de mener des expériences scientifiques sur lui. Rapidement, il apprend qu’il n’est pas le seul être dans cette situation périlleuse, et qu’il semble être ce que certains nomment un Ajin. Personne ne sait exactement comment ils sont apparus ni pourquoi ils existent. Mais les services spéciaux du gouvernement sont prêts à user de tous les moyens pour le découvrir, car rien à leurs yeux n’est plus dangereux pour l’humanité… qu’un être immortel !Prépublié dans la revue Good Afternoon des éditions Kôdansha depuis 2012 au Japon, le récit de science-fiction de Tsuina Miura est formidable et très accrocheur. Pas très neuf dans sa thématique (des personnes ressuscitent et qui restent sur terre) mais plutôt dans son traitement narratif : le manga devient rapidement un thriller, porté par un héros attachant. Kei est un jeune lycéen promis à un bel avenir, celui de médecin ; pour cela il travaille avec beaucoup d’acharnement. Poli, organisé, il ne sort jamais et se consacre à ses études. Après son décès et sa résurrection, il devient un Ajin, froid et calculateur. Même s’il reste quelques bribes d’être humain en lui, il est l’opposé de sa vie de lycéen.Traqué par une organisation secrète, il tente de s’échapper par tous les moyens et c’est ce qui fait le sel de ce premier volume de la série. Le lecteur suit donc ce road-trip rapide et violent dans la deuxième partie du manga et c’est d’une grande efficacité et d’une belle aisance scénaristique. Il faut souligner que les Ajin, tout le monde en parle mais personne n’en a vu. D’ailleurs Kei est le troisième de cette espèce en 17 ans. Il y aurait 46 Ajin dans le monde et deux au Japon. Immortels mais très mystérieux, ces êtres fantastiques seraient aussi traqués par le reste des humains pour la gloire et la richesse. On comprend bien que l’un des seuls visibles depuis plusieurs années pourquoi il est pris en chasse par tout le monde.Le dessin de Gamon Sakurai restitue idéalement l’atmosphère angoisse-thriller du récit. Les courses-poursuites donnent envie grâce à des planches au découpage nerveux du mangaka. Le lecteur appréciera les vignettes où les humains se transforment en Ajin avec leurs bandelettes, très réussies.
Le manga est un véritable succès au Japon avec un million d’exemplaires vendus pour les trois premiers tomes publiés. De plus, cette réussite sera déclinée en trois films animés.
- Ajin, volume 1
- Scénariste : Tsuina Miura
- Dessinateur : Gamon Sakurai
- Editeur: Glénat Manga, collection Seinen
- Prix: 7.60€
- Sortie: 1er juillet 2015
The New York Four
Riley, jeune lycéenne brillante part faire ses études supérieures à New-York. Tout est nouveau pour elle : elle retrouve sa sœur et décide d’emménager avec trois autres étudiantes dans un bel appartement. La vie des ses quatre jeunes filles est racontée dans The New-York Four, un comics signé Brian Wood et Kelly Ryan et publié par Urban Comics.Résumé de l’éditeur :
La brillante et timide Riley est sur le point de faire son entrée à la prestigieuse université de New York, à Manhattan. Bien qu’elle ait toujours vécu à Brooklyn, c’est un tout nouveau départ que prend la jeune fille. Sa rencontre avec Marissa, citadine décontractée, Lona, sombre et quelque peu lunatique, et Ren, les pieds scotchés à son skate, font de cette première expérience une véritable aventure. Mais bientôt, les petits problèmes du quotidien estompent l’euphorie des premiers temps. Conflits de famille, colocation animée, difficultés scolaires et peines de cœur. L’amitié naissante du groupe survivra-t-elle à la découverte de la vie d’adulte ?
Découpé en chapitre, comme dans tout bon comics, l’album de Brian Wood est une sorte de guide pour touriste. Il en profite au passage pour nous faire découvrir New York, les endroits qu’il apprécie ou ceux incontournables, le tout dans des petits cartouches en haut de certaines cases où l’on distingue ces lieux. Par ce biais, il montre tout l’amour qu’il a pour Big Apple. En plus de cela, le scénariste distille par-ci par-là des ambiances musicales, en annotant les début de chaque chapitre par une chanson qu’il apprécie.
La partie graphique confiée à Ryan Kelly est elle aussi d’une grande qualité. Le trait en noir et blanc du dessinateur restitue admirablement l’ambiance chaleureuse du récit.
- The New York Four
- Scénariste : Brian Wood
- Dessinateur : Ryan Kelly
- Editeur: Urban Comics, collection Urban Indies
- Prix: 22.50€
- Sortie: 10 juillet 2015
Le procès Carlton
Après l’Affaire du Sofitel de New-York (qui s’est achevé par une transaction financière entre les deux parties, sans procès public), Dominique Strauss-Kahn n’avait pas terminé ses déboires judiciaires. En effet, il était inculpé dans l’Affaire du Carlton de Lille. A la demande de l’éditeur Le Lombard, François Boucq était invité à suivre le dénouement dans les prétoires aux côtés de Pascale Robert-Diard, une journaliste spécialisée du Monde. Ces événements sont compilés dans Le Procès Carlton, un journal de bord commenté et mis en image.Résumé de l’éditeur :
Pendant trois semaines, devant le tribunal correctionnel de Lille, assis côte à côte sur le banc des prévenus, ils ont été accusés, confrontés et se sont défendus : Dominique Strauss- Kahn, l’homme qui fut « le plus puissant du monde », Dodo la Saumure et sa gouaille, et une dizaine d’autres — chefs d’entreprise, avocat, directeur d’hôtel — que l’affaire du Carlton a brutalement exposés au regard public. Les débats furent âpres, tendus, parfois obscènes, drôles aussi.
- Le procès Carlton
- Scénariste : Pascale Robert-Diard
- Dessinateur : François Boucq
- Editeur: Le Lombard
- Prix: 15€
- Sortie: 03 juillet 2015
Et pour quelques pages de plus…
Pour compléter notre sélection de la semaine, Case Départ vous conseille aussi les albums suivants :
Mission Osirak
La bombe de Saddam est le premier volet de Mission Osirak, un album fondé sur une histoire vraie , celle d’un raid aérien pour empêcher le dictateur Saddam Hussein qui voulait coûte que coûte récupérer l’arme nucléaire. Cette série en deux tome est signée Jean-Claude Bartoll et mise en image par Ramon Rosanas.Résumé de l’éditeur :
En juin 1981, l’aviation israélienne détruisit l’unique centrale nucléaire du monde arabe, en Irak. La mission des F-16 était d’empêcher Saddam Hussein d’obtenir l’arme nucléaire avec laquelle il menaçait d’effacer Israël de la carte. Une opération précédée à la fois par les coups tordus – dont certains en France – de différents services secrets, et par la préparation par des pilotes d’exception de ce raid aérien qui reste, dans les annales de l’aviation militaire, un modèle d’attaque préventive.
- Mission Osirak, tome 1/2 : La bombe Saddam
- Scénariste : Jean-Claude Bartoll
- Dessinateur : Ramon Rosanas
- Editeur: Dargaud
- Prix: 13.99€
- Sortie: 10 juillet 2015