Souvenirs, souvenirs !
En 1865, c'est Liebig qui avait fondé cette manufacture. Déjà la mondialisation capitaliste ! On estime d'ailleurs qu'avec cet investissement, Liebig se transforma en toute première société internationale qui arrosa la planète entière avec ses produits.
En 1924, la compagnie Anglo-Meat Packing Plant racheta à Liebig les installations et développa encore le commerce de viande congelée, pour alimenter (déjà) les industries agro-alimentaires européennes avec la production bovine qui ne servait désormais plus beaucoup à l'industrie du cuir, devenu largement inutile, mise à part la chaussure et la maroquinerie, à cause de la motorisation complète de l'armée pendant la Première Guerre mondiale (les besoins en sellerie n'existent désormais plus que pour des pratiques de loisir, les sports équestres et la cavalerie militaire de fonction honorifique).
Carte du site classé extraite du site Web du projet
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Jusqu'en 1979, année de la fermeture définitive du site, on y produisit toute sorte de dérivés, y compris du suif alimentaire ou non, et du savon à base de graisse animale... A partir de 1984 (c'est-à-dire à la fin de la dictature militaire qui s'acheva en 1986), les pouvoirs publics ont lancé des politiques de protection patrimoniale sans pouvoir redonner une affectation quelconque à ce vaste friche industrielle qui avait compté outre l'usine, des enclos pour le bétail, un abattoir, un stade de football pour tout le monde, surtout les ouvriers, un golf pour les ingénieurs et les directeurs, un village, des manoirs pour les classes dirigeantes, des infrastructures de santé et de petite enfance, etc.
Le quartier d'habitations
Depuis 2008, l'Uruguay travaillait à l'inscription du site au Patrimoine industriel de l'Humanité. Le vote obtenu a été fêté de toutes les manières possibles tant à Fray Bentos, sur la côte fluviale, comme à Montevideo, et des programmes de tourisme culturel se mettent déjà en place pour redonner vie aux 275 hectares incluant les bâtiments de production, les installations portuaires, avec son quai dédié à l'usine, les logements des cadres et des ouvriers et les parcs de loisir qui forment une sorte de cité ouvrière, quasiment autarcique, comme il s'en construisait alors un peu partout en Europe en forme de rêve utopique d'un petit monde autosuffisant à l'origine des plus fortes cultures d'entreprise du vieux monde industrialisé...
Les pays d'Amérique du Sud ont peu de patrimoine industriel, cette déclaration est donc tout à fait exceptionnelle. Traditionnellement et culturellement, le capital local n'aime pas investir dans l'industrie qui est considérée comme peu prestigieuse. Seule la propriété agraire bénéficie de ce prestige. Aussi le peu d'installations industrielles qui existent correspond-il le plus souvent à des investissements étrangers qui prennent assez vite une tournure néocoloniale ou impérialiste. Et aujourd'hui ce lieu est connu comme Fray Bentos ou Liebig-Anglo. C'est tout dire !
Les bureaux d'administration, incroyablement désuets
Pour aller plus loin : lire l'article de El Observador du 5 juillet lire l'article de El Observador du 7 juillet Dans El Observador, vous trouverez des courts-métrages documentaires sur l'histoire des lieux lire l'article de El País du 6 juillet lire l'article de El Espectador du 5 juillet lire le communiqué de la réunion des musées uruguayens lire le communiqué de la direction du Patrimoine de l'Uruguay, celui qui a suivi le 6 juillet lire le communiqué de l'UNESCO (représentation à Montevideo) consulter le site Internet consacré à ce patrimoine (beaucoup de photos, des cartes, de l'information institutionnelle en veux-tu en voilà) lire l'article de ce jour dans Clarín.
(1) J'avais laissé de côté l'info pour une autre occasion eu égard à mon programme à Toulouse qui a été suivi immédiatement par la semaine de tournée pontificale en Amérique du Sud qui était aussi celle des festivités pour le 9 juillet en Argentine... Un article de Clarín ce matin me rappelle à l'ordre. Merci à ce quotidien. Je le critique bien assez pour le remercier quand il y a lieu de le faire ! (2) C'était le fameux charqui, qui a nourri l'Armée des Andes en 1817 pendant la campagne de libération du Chili, conduite par le général José de San Martín. Une préparation qui n'est pas sans rappeler la viandes de Grisons, qui est aujourd'hui un luxe de la tradition suisse.