Grâce à la crise de la zone euro, l’Etat allemand a économisé 193 milliards d’euros depuis 2008

Publié le 16 juillet 2015 par Blanchemanche
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GUILLAUME DUVAL16/07/2015
Le comportement du gouvernement allemand dans la crise grecque a surpris – et inquiété – beaucoup d’observateurs : comment se fait-il qu’il soit, avec le soutien manifeste de son opinion publique, d’aussi mauvaise volonté ? Pourquoi n’est-il prêt à aucune concession de nature à résoudre – enfin – la grave crise que traverse la zone euro depuis cinq ans maintenant ? Ne mesure-t-il pas le risque que son intransigeance fait courir non seulement à l’euro mais à la construction européenne elle-même ? Il y a cependant une explication rationnelle à ce comportement étrange : pour l'instant, la crise de la zone euro est une bonne affaire pour l’Allemagne.Depuis 2010, Angela Merkel a refusé dans un premier temps toutes les réformes indispensables pour sauver l’euroCette interrogation est en fait récurrente depuis 2010 : à chaque fois, le gouvernement d’Angela Merkel a commencé par refuser les réformes qui étaient pourtant manifestement indispensables pour sauver l’euro. Heureusement, sauf dans l’affaire grecque (qui est loin d’être terminée), Angela Merkel a jusqu’ici fini par les accepter du bout des lèvres, à la dernière minute. Tout en les assortissant de conditions toujours plus restrictives en matière de politiques budgétaires. Résultat, la crise perdure en dépit des réformes mises en œuvre à cause de l’effet récessif de ces politiques contre-productives.Il y a beaucoup d’explications possibles à ce comportement en apparence irrationnel, notamment de caractère culturel : l’esprit moralisateur protestant… Mais il ne faut sans doute pas négliger un facteur objectif et bien réel : jusqu'ici, la crise de la zone euro a été en pratique une bonne affaire pour l’Allemagne et en particulier pour l’Etat allemand.Une valeur refugePourquoi ? Parce qu’elle fait des titres de dettes allemands une valeur refuge, ce qui, associé à la politique monétaire laxiste de la Banque centrale européenne, permet à l’Allemagne de profiter de taux d’intérêts exceptionnellement bas.

Grâce à la crise de la zone euro, l'Allemagne paiera en 2015 deux fois moins d'intérêts sur sa dette

Alors que nos voisins payaient 69 milliards d’intérêts sur leur dette publique en 2008, ils ne devraient plus en payer que 48 cette année bien que cette dette se soit accrue de 490 milliards d’euros depuis. Si les Allemands avaient dû servir cette année les intérêts de leur dette publique au taux où ils le faisaient en 2008, ils auraient dû payer au contraire 93 milliards d’euros, deux fois plus, selon les chiffres fournis par la Commission européenne.Loin de coûter quoi que ce soit à l’Allemagne, la crise de la zone euro lui rapporte beaucoup
LoinAu total, entre 2008 et 2015 les contribuables allemands ont économisé ainsi 193 milliards d’euros ! Malgré les aides apportées par l’Allemagne à la Grèce, à l’Irlande, à Chypre et au Portugal (qui ne sont en réalité que des prêts à des taux plus élevés que ceux de la dette allemande), la crise, et sa poursuite, sont donc une excellente affaire pour l’Etat allemand. Sans compter bien sûr qu’elle permet de résoudre le problème démographique du pays en important les jeunes grecs, italiens, portugais, espagnols qualifiés et bien formés. Tandis que la crise et la politique monétaire laxiste de la BCE font baisser le cours de l’euro par rapport au dollar, ce qui permet à l'industrie allemande de compenser hors de la zone les exportations qu’elle perd dans la zone euro du fait de sa crise…Pas de complot mais…Il ne s’agit pas, bien entendu, de prétendre ici qu’au sein du ministère des Finances de Wolfgang Schäuble existerait une cellule secrète qui aurait fait ces calculs et chercherait sciemment à prolonger la crise. Mais le fait que la crise soit pour l'instant une bonne affaire pour l’Allemagne n’incite évidemment ni ses dirigeants ni son opinion publique à chercher vraiment à la résoudre…Il ne s'agit bien sûr que d'une politique à courte vue : si la crise de la zone euro se prolonge et s'aggrave, si l'euro et la construction européenne se défont, cela aura de lourdes conséquences négatives pour l'Allemagne et son économie. A commencer par la perte de ses créances sur les autres pays européens. Mais en Allemagne, comme ailleurs, les dirigeants politiques raisonnent avant tout à court terme, l'oeil rivé sur les sondages et sur la prochaine échéance électorale... GUILLAUME DUVALhttp://www.alterecoplus.fr/infographies/grace-a-la-crise-de-la-zone-euro-letat-allemand-a-economise-193-milliards-deuros-depuis-2008-201507161243-00001799.html