Titre : Mort au tsar, T1 : Le gouverneur
Scénariste : Fabien Nury
Dessinateur : Thierry Robin
Parution : Août 2014
Fabien Nury est un de mes scénaristes préférés. J’ai été conquis par chacun de ses travaux que j’ai eu le plaisir de dévorer. Une de ses spécialités est de jouer avec les grands événements de l’Histoire. Il a offert une vision passionnante de la période de l’Occupation avec « Il était une fois en France ». Il s’est immergé dans la France de la Première Guerre Mondiale dans « Silas Corey ». Enfin, sa première plongée dans l’univers russe a eu lieu lors du diptyque « La mort de Staline ». Son aventure slave connaît un nouveau chapitre avec la sortie l’été dernier du premier tome de « Mort au Tsar » intitulé « Le Gouverneur ».
Je dois vous avouer que je me suis offert cet album sur la seule présence de Nury sur la couverture. En découvrant la quatrième de couverture, j’ai appris qu’il s’agissait d’une histoire en deux tomes. Cette structure de parution est décidément très à la mode actuellement. Les dessins sont l’œuvre de Thierry Robin dont j’avais apprécié le style dans « La mort de Staline ». Il possède une réelle identité graphique et participe fortement à l’atmosphère que dégage la lecture.
Une marche inévitable vers un destin tragique.
La trame nous fait partager les derniers jours du Grand-Duc Sergueï Alexandrovitch avant l’attentat dont il a été victime. L’issue fatale est annoncée dans un prologue. Cela influence évidemment la lecture puisque chaque parole du personnage principal ou chaque événement qu’il vit sont perçus par un prisme particulier. La montée en tension est savamment dosée. La marche inévitable vers son destin tragique ne laisse pas le lecteur indifférent. Le Grand-Duc accepte son sort irrémédiable avec un fatalisme marquant.
L’intensité ne fait qu’augmenter au fur et à mesure que les pages défilent. Le fait de voir cet homme allait vers la mort avec nonchalance met presque mal à l’aise. Une chose est sûre, notre intérêt ne cesse de croître. Le scénario monte en puissance sans changement de vitesse brutal. Cette finesse dans l’accélération dramatique est la preuve d’un talent narratif certain. Le suspense atteint un paroxysme lors de la dernière planche qui offre une perspective passionnante pour le prochain tome.
L’histoire se bâtit intégralement autour de son protagoniste principal. Les personnages secondaires n’existent pas réellement. Leurs présences se justifient uniquement par leurs interactions avec le gouverneur moscovite. Cela n’est pas une faiblesse. C’est un choix scénaristique pleinement assumé et qui se défend parfaitement. L’intrigue veut nous plonger dans le quotidien et dans l’intimité de cet homme blessé en route vers l’échafaud. Nury a développé une humanité touchante chez le Grand-Duc alors qu’on peut objectivement affirmer que les dirigeants russes ne sont pas réputés pour leur grandeur d’âme et leur altruisme. La dimension politique est mise de côté et cela donne un ton particulier à la narration.
Pour conclure, « Le gouverneur » est un album réussi. Je l’ai lu avec beaucoup de plaisir. Je me suis très vite passionné pour le Grand-Duc. Mon intérêt n’a cessé de grandir au cours de ma lecture. Chaque planche m’a captivé. Je trouve que c’est une performance d’entretenir un suspense alors que le dénouement est annoncé avant que ne débute les événements. Tout cela est bien enrobé par le style de Thierry Robin. Je vous conseille donc cette découverte. De mon côté, j’attends la suite…