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Vendredi 16 juillet 1915, aéroplane de 6 à 7 h.

Par Cantabile @reimsavant

J'ai espoir aujourd'hui de te revoir, comme je ne l'ai jamais eu. Je suis allée voir une voyante et voici ce qu'elle m'a dit :

" Vous êtes mariée et depuis longtemps vous êtes sans nouvelles de votre mari. Je le vois en soldat ; il a été malade mais de lui vous aurez bientôt des nouvelles car la grande peine que vous avez en ce moment ne sera que passagère ".

Elle a ajouté :

" Votre mari est grand, brun ; il a le front dégagé, il se tient bien droit et naturellement il cause beaucoup ".

Tu vois que c'est ton portrait. Elle m'a dit aussi que j'avais un commerce et que j'aurai des ennuis mais que je triompherai. Tu penses ma bonne chipette, en sortant de chez elle je ne voyais plus la vie de la même façon. Il me semblait que tout paraissait plus gai et je repensais à cette femme là, à la foire, qui t'avait dit que tu aurais une période malheureuse mais qu'après tu serais encore plus heureux que tu ne l'avais jamais été.

Si tu voyais ta Juliette, c'est la première fois depuis dix mois qu'elle sourit un peu. Mais cette fois-ci je vais m'ennuyer à attendre de tes nouvelles. Il me paraîtra qu'elles n'arriveront pas assez vite. Et je me dis que tu manques peut-être de tout ; quel contentement si je pouvais t'envoyer quelque chose. Enfin un peu de patience et tu vois mon Charles, mon cœur me le disait. On avait l'air de ne pas comprendre pourquoi j'avais espoir. Mais je t'aime tant.

Tous mes baisers. Juliette.

Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) - Lettres prêtées par sa petite fille Sylviane JONVAL

De sa plus belle écriture, Sylviane Jonval, de Warmeriville a recopié sur un grand cahier les lettres écrites durant la guerre 14-18 par sa grand-mère Hortense Juliette Breyer (née Deschamps, de Sainte-Suzanne) à son mari parti au front en août 1914 et tué le 23 septembre de la même année à Autrèches (Oise). Une mort qu'elle a mis plusieurs mois à accepter. Elle lui écrira en effet des lettres jusqu'au 6 mai 1917 (avec une interruption d'un an). Poignant.(Alain Moyat)

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