Voici le texte de la déclaration dite " de Mainau " publiée par le journal Le Monde le 3 juillet 2015 :
"Nous soussignés, scientifiques lauréats du prix Nobel, avons rejoint les rives du lac de Constance dans le sud de l'Allemagne afin d'échanger nos points de vue avec de jeunes chercheurs prometteurs qui viennent comme nous du monde entier. Il y a près de soixante ans, ici, à Mainau, une assemblée similaire de lauréats du prix Nobel de sciences a publié une déclaration sur les dangers inhérents à la nouvelle technologie des armes nucléaires - une technologie résultant des avancées dans les sciences fondamentales.
Jusqu'ici, nous sommes parvenus à éviter une guerre nucléaire, même si la menace demeure. Nous pensons que notre monde est aujourd'hui confronté à une autre menace d'une ampleur comparable. Des générations successives de chercheurs ont contribué à créer un monde de plus en plus prospère. Cette prospérité s'est faite au prix d'une augmentation rapide de la consommation des ressources de la planète. En l'absence de maîtrise, notre demande sans cesse croissante en produits alimentaires, en eau et en énergie finira par dépasser la capacité de la terre à satisfaire les besoins de l'humanité, et mènera à une tragédie humaine générale. Déjà, les scientifiques qui étudient le climat de la terre constatent l'impact des activités humaines.
En réponse au changement climatique généré par l'homme, l'Organisation des Nations unies a créé le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) afin de fournir aux décideurs mondiaux un résumé de l'état actuel des connaissances scientifiques pertinentes. Bien que loin d'être parfaits, les efforts qui ont conduit à l'actuel cinquième Rapport d'évaluation du GIEC représentent, à notre avis, la meilleure source d'information concernant l'état actuel des connaissances sur le changement climatique. Nous ne le disons pas en tant qu'experts dans le domaine du changement climatique, mais plutôt comme un groupe diversifié de scientifiques qui ont un profond respect et une compréhension de l'intégrité du processus scientifique.
Bien qu'il subsiste une incertitude quant à l'étendue exacte du changement climatique, les conclusions de la communauté scientifique contenues dans le dernier rapport du GIEC sont alarmantes, en particulier concernant le maintien de la prospérité humaine, en cas d'une augmentation de plus de 2 °C de la température moyenne mondiale. Le rapport conclut que les émissions anthropiques de gaz à effet de serre sont la cause probable du réchauffement climatique actuel de la Terre. Les prévisions formulées à partir des modèles climatiques indiquent que ce réchauffement va très probablement, au cours du prochain siècle, augmenter la température de la Terre de plus de 2 °C par rapport à son niveau préindustriel, à moins que des réductions spectaculaires ne soient faites dans les émissions anthropiques de gaz à effet de serre au cours des prochaines décennies.
D'après les évaluations du GIEC, le monde doit faire de rapides progrès dans la réduction des émissions actuelles et futures de gaz à effet de serre afin de minimiser les risques importants de changement climatique. Nous pensons que les nations du monde doivent profiter de l'occasion donnée par la Conférence sur les changements climatiques des Nations unies à Paris, en décembre 2015, pour prendre des mesures décisives afin de limiter les futures émissions mondiales. Cet effort exigera la coopération de toutes les nations, développées ou en développement, et il devra être poursuivi à l'avenir, en accord avec les évaluations scientifiques actualisées. L'inaction soumettra les générations futures de l'humanité à un risque inadmissible et inacceptable."
La COP21 : un rendez-vous décisif pour l'avenir
"Nous avons peu de temps avant que la possibilité de rester sous les 2°C ne disparaisse" ont averti les experts du GIEC (Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat) dans un rapport de synthèse publié fin 2014 à Copenhague. Pour cela, les émissions mondiales de gaz à effet de serre devront être réduites de 40 à 70% d'ici 2050, et disparaître à l'horizon 2100, auquel cas le changement climatique aura des " impacts graves, étendus et irréversibles" selon les experts.
Les dirigeants du monde entier sont ainsi appelés à prendre leurs responsabilités face au réchauffement climatique qui menace la planète, lors du prochain Sommet sur le climat des Nations Unies (COP21) qui aura lieu à Paris - Le Bourget du 30 novembre au 11 décembre 2015. L'enjeu est de taille : il s'agit d'aboutir, pour la première fois, à un accord universel et contraignant permettant de lutter efficacement contre le dérèglement climatique et d'impulser/d'accélérer la transition vers des sociétés et des économies résilientes et sobres en carbone. Espérons que cet ultime cri d'alarme soit entendu par nos dirigeants car il sera bientôt trop tard pour éviter la "tragédie humaine générale" que redoutent les scientifiques et experts du Climat. Et on ne pourra pas dire qu'ils ne nous avaient pas prévenu.
ME