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Le mot vient du latin perineum qui veut dire "autour des voies évacuatrices", et interpelle jusque dans son écriture. Ce nom masculin et singulier se moque des conventions orthographiques habituelles de genre et de nombre. En effet, il correspond non pas à un, mais à plusieurs muscles de l’entrejambe, présents, aussi bien chez la femme, que chez l’homme.
Également nommé plancher pelvien, il soutient la partie terminale des voies digestives, les voies urinaires et les organes génitaux qui sont logés dans le bassin osseux. Le périnée est donc sollicité automatiquement à chaque fois qu’il y a émission d’urines, de selles ou rapport sexuel.
Il est fréquemment évoqué pour la première fois par une sage-femme pendant la période périnatale, car ce sont les muscles qui le constituent qui sont étirés par le passage du bébé. D’autres fois, il est cité par les professeurs de sport consciencieux, car il fonctionne conjointement avec les abdominaux et le diaphragme (muscle de la respiration).
Encore de nos jours, force est de constater dans le secret des consultations médicales, que cette partie du corps liée à la sexualité et à l’intime, reste méconnue par tout un chacun et que l’approche mécanique de l’anatomie et des fonctions périnéales ne suffit pas pour découvrir cette zone.
La périnatalité permet d’investir émotionnellement la zone pelvienne. Le périnée soutenant l’utérus, devient le nid dans lequel germe la vie.
Si une femme n’en a pas eu l’occasion plus tôt dans sa vie, la période périnatale lui offre un espace pour découvrir avec bienveillance et curiosité son périnée et sa capacité à y accueillir son enfant.
L’enjeu permet de dépasser tous les tabous puisqu’il s’agit d’apprendre comment aider son bébé à naître.
Elle apprendra à se saisir volontairement des mouvements de sa respiration, de son bassin osseux et de son sexe pour y libérer ou créer un espace qui peut être celui de la naissance mais aussi de la sexualité.
Si elle est uniquement envisagée de manière mécanique, la sexualité pendant la grossesse prive le couple d’une intimité unique et l’enfant à venir du ressenti de plénitude qu’une sexualité aboutie offre à sa mère.
Anatomiquement, hormis en cas de contre-indication médicale (menace d’accouchement prématuré, décollement ovulaire…), la sexualité est tout à fait possible pendant la grossesse. Il est important pour une femme que son périnée ne soit pas uniquement approché lors des examens médicaux pendant 9 mois!
La périnatalité permet de découvrir et respecter davantage son périnée, de respecter son intimité, puisqu’il est alors reconnu comme le lieu de l’affectivité grâce à la présence du bébé. En fait, la sexualité est porteuse des mêmes valeurs humaines fondamentales que celle de la grossesse: l’amour, l’affectivité, le lien à l’autre…
Les premiers à ne pas pouvoir considérer le périnée mécaniquement sont bien souvent les hommes, soucieux de ne pas "perturber" le bébé.
Fort de ce constat, il est alors encore plus évident d’envisager l’acte sexuel non pas comme un acte limité aux organes sexuels qui sont extrêmement sollicités pendant la phase périnatale mais comme un acte lié à l’être tout entier. En effet, une femme enceinte, venant d’accoucher ou encore allaitant son bébé vit de nombreuses et rapides modifications corporelles et a besoin de beaucoup de douceur, de patience et d’attention pour ressentir son sexe et sa poitrine comme des organes de plaisir.
Un partenaire ne limitant pas ce plaisir aux organes sexuels en s’intéressant au corps entier dans une approche plus sensuelle que sexuelle dans un premier temps mais surtout en prenant en compte l’enjeu affectif porté par l’acte sexuel, aidera sa compagne à vivre pleinement sa sexualité. Peut être de manière encore plus complète qu’avant, car il sera sécurisant.
A contrario, la violence des dégâts engendrés par les abus sexuels sur le vécu intérieur des victimes, étaye cette thèse du potentiel émotionnel habitant la sphère périnéale.
La zone pelvienne est considérée par bien des approches comme étant le lieu de la sécurité de base de l’être. C’est le cas de l’haptonomie, véritable science de l’affectivité, visant la confirmation affective de l’être, c'est-à-dire la possibilité pour lui de vivre ses potentialités.
Cette pratique décrit le périnée comme appartenant au "giron" ou "nid affectif" car il correspond au lieu de vie du fœtus et invite donc les professionnels de santé haptothérapeutes à être particulièrement attentifs à leur manière d’entrer en contact avec cette zone dans les soins, tant elle est porteuse de symboles. Les touchers vaginaux effectués par la sage-femme par exemple se veulent respectueux des tissus pour un vécu physique et intérieur plus doux.
Être porté par sa base permet de vivre dans la rencontre avec la personne qui soutient, son assise affective, fondement même de notre capacité à se tenir droit dans la vie, à être digne.
Plusieurs méthodes de développement personnel permettent la découverte de soi et de sa capacité à interagir dans le respect avec l’autre. A titre d’exemple, la sophrologie et l’haptonomie en font partie et sont aujourd’hui pleinement intégrées à la pratique professionnelle des soignants formés pour offrir un accompagnement de qualité.
Permettre à un patient de considérer le périnée comme base de sa sécurité et de sa dignité, peut l’amener à découvrir, par exemple, que ce qui se joue dans sa sexualité, va bien plus loin que le ressenti purement charnel. La recherche de la fusion est certes liée à des pulsions physiques mais aussi émotionnelles, parce qu’elle est profondément sécurisante.
Devenir conscient de ce double enjeu, physique et affectif qui existe dans le rapport intime, offre la possibilité d’améliorer la relation à soi-même et donc la qualité des relations humaines toutes entières.
Jasmine IDIR, sage-femme, Cagnes sur Mer
* wim.mc
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