Adapté de Rambo, un roman au ton particulièrement agressif écrit par David Morel, un auteur canadien qui en trouva l'inspiration alors qu'il enseignait la littérature à des jeunes combattants fraîchement revenus du Vietnam, le script de First Blood fut voué à stagner pendant presque dix ans sans jamais trouver de sérieux acquéreur prêt à prendre le risque d'adapter le brûlot. Trop sulfureux, trop problématique, le projet aurait pu prendre la poussière éternellement sur une étagère quelconque et c'est bien ce qui faillit arriver tant la genèse du film s'avéra parsemée d'embuches de toutes sortes. Alors que le projet prenait peu à peu forme, il passa de mains en mains, à l'origine commandé par Columbia puis récupéré par la Warner qui finit également par faire machine arrière. En effet, le script à peine terminé, il fut jugé bien trop violent et beaucoup trop enclin à raviver le fantôme de la guerre dans l'esprit du peuple américain tant l'échec national cuisant que fut la guerre du Vietnam hantait encore les mémoires. Et pour cause : Rambo fut publié en 1972 alors que les soldats américains étaient encore en train de crever sur le champ de bataille et il semblait que pour les producteurs, il était encore beaucoup trop tôt pour remuer ce merdier et en exposer les méfaits au grand jour.
Exit Rambo donc. Mais fortement convaincu de l'impact que pourrait avoir le film et bien décidé à le réaliser coûte que coûte, Kotcheff tint bon et trouva chez Orion Pictures un bon candidat enclin à distribuer le projet. Entre temps se posèrent de nombreux problèmes de casting tant pour le personnage de John Rambo que celui du Colonel Trautman et toutes les grandes figures de l'époque y passèrent : Dustin Hoffman, Al Pacino, Robert De Niro ou encore Jeff Bridges refusèrent de jouer le rôle du vétéran. Du côté de l'autorité, avant de choisir Richard Creena, c'était Kirk Douglas qui était à initialement prévu pour incarner Trautman mais celui-ci quitta le tournage après un désaccord violent avec Stallone (crédité en tant que co-scénariste) qui voulait s'écarter du roman en insistant davantage sur le caractère de victime de Rambo alors que Douglas, pensant le contraire, exigea des changements sur le script qui lui furent refusés.
Une fois le film tourné, il fallait encore passer les projections test qui furent catastrophiques à cause de la scène de fin dans laquelle Rambo est abattu à contrecœur par son " créateur ". Le public fut choqué par le propos beaucoup trop pessimiste et fort heureusement, Kotcheff qui avait eu le temps de tourner une fin alternative (celle que l'on connait) la proposa au studio qui malgré ses réticences fut obligé de l'accepter afin d'éviter un potentiel désastre d'audience. En fin de compte, bien qu'accouché dans la douleur, le film remporta un succès mérité.
Mais revenons au film.
First Blood s'ouvre sur un homme dont les oripeaux laissent deviner son statut d'ancien militaire, errant dans un paysage montagneux et austère, à la recherche de son dernier compagnon de guerre vivant - tous les autres étant morts au Vietnam, assassinés par et pour leur pays. Il apprend que ce dernier a succombé à un cancer provoqué par l' agent orange, un redoutable herbicide répandu par l'armée américaine sur le territoire vietnamien. La suite à tout du western. Passablement dévasté et désormais seul, Rambo marche sans réel but, jusqu'à atterrir dans la petite ville portant ironiquement le nom de " Hope ", un bled canadien tranquille et replié sur lui-même, où tout le monde se connaît et se salue par son prénom. Le shérif, maître des lieux tombe par hasard sur Rambo mais son look, tout comme la menace potentielle qu'il véhicule ne plaisent pas du tout au shérif qui fait clairement comprendre au soldat qu'il n'est pas du tout le bienvenu sur son territoire. Impassible, le vétéran se laisse conduire aux portes de la ville mais décide de faire demi-tour, faisant fi des menaces proférées par l'autorité locale.
Naturellement, les choses s'enveniment et le shérif, dans un accès de colère injustifiée, mets aux arrêts l'innocent sous prétexte de vagabondage et le jette au trou, le laissant en proie à des petits flics besogneux et hargneux, excités par leur pouvoir qui semble accroitre tant Rambo, muré dans le silence et la docilité, a tout de la victime. Suite à la volonté des policiers de raser Rambo afin de le rendre plus présentable pour le procès à venir, celui-ci, totalement traumatisé par l'objet qui se tient si près de son visage, pète littéralement les plombs, casse la gueule à tout le monde en un rien de temps et s'échappe de prison. S'en suit une course poursuite et une chasse à l'homme doublée d'un retournement de situation implacable lors duquel les flics comprennent non seulement qu'ils sont allés trop loin avec cet homme dont ils ont sous-estimé la force et l'intelligence et qu'un Béret Vert est bien plus fort et puissant en milieu naturel et hostile qu'ils ne le seront jamais nulle part, même chez eux.