Alors qu'Alexis Tsipras a remporté son pari de faire refuser le plan de réformes par le biais d'un référendum, le crise grecque (énième chapitre), a pris une autre dimension. On en est arrivé au point où les contradictions sont toujours plus grandes : -la Grèce est dans une ornière économique toujours plus grande avec un chômage record et un endettement jamais atteint. -mais dans le même temps les efforts économiques qu'elle a accumulé lui ont permis d'arriver selon Jacques Sapir à dégager des excédents primaires.
Et pourtant il a fallu que le peuple se prononce sur un énième plan de rigueur. Comme l'avait tenté Papandréou avant lui, mais cette fois-ci avec plus de succès puisqu'il a réussi à maintenir ce référendum et à le remporter. Ce qui n'est pas une mince affaire tant les grecs sont inquiets d'une sortie de l'euro que certains leur promettaient en cas de "OXI" (Jean-Claude Juncker notamment).
Désormais, tous les regards se tournent sur... l'Eurogroupe. Les négociations sont effet coincées et tout le monde s'attend à une sortie de l'Euro. Mais pourquoi serait-ce forcément l'issue ?
Les Grecs n'ont pas demandé à sortir de l'euro
Premièrement les grecs n'ont pas dit NON à l'Euro (grand bien leur aurait-il prit), ni NON à l'Union Européenne.
La question posée était beaucoup moins fondamentale : "Faut-il accepter le plan d'accord soumis par la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international lors de l'Eurogroupe du 25 juin, qui est composé de deux parties : Réformes pour l'achèvement du programme en cours et au-delà et Analyse préliminaire de la soutenabilité de la dette"
C'est uniquement sur cela que les grecs devaient se prononcer, comme le rappelle bien Jacques Sapir. Or si les grecs ont dit NON, c'est à un nouveau plan d'austérité (en sachant précisément les conséquences puisqu'ils les ont subies pendant 5 ans). Ils sont en revanche plus positifs sur l'Euro puisqu'en janvier dernier, ils étaient trois quarts à vouloir rester dans l'eurozone (idée saugrenue s'il en est...). Aussi, il est inutile qu'à l'instar de Jean-Luc Mélenchon en France, Alexis Tsipras et sa majorité SYPIZA ne souhaitent pas sortir de l'Euro.
Pourtant il est vrai que la Grèce est engagée sur une voie qui peut l'amener à sortir de l'Euro.
Mais la Grèce pourrait en sortir
En effet, dès demain à midi, les banques seront en manque de liquidité : il n'y aura plus de possibilité de retirer le moindre euro des banques grecques. A ce moment là, que les traités aient prévu une sortie de l'Euro ou pas, si les négociations ne reprennent pas ou si celles-ci confirment les positions de chacun, ce sera la seule solution pour pouvoir permettre aux banques d'avoir des liquidités.
Il est assez croustillant de voir désormais des personnes politiques prôner un retrait de la Grèce de la zone Euro (Eric Woerth, Hervé Morin, Christian Estrosi) alors qu'ils en auraient glapi d'inquiétude quand une telle question se posait dans des situations bien moins défavorables.
Car ne nous le cachons pas : s'il est préférable de sortir de l'Euro pour la Grèce, il aurait été encore mieux de la faire sortir selon des dispositions discutées entres tous les partenaires et selon un plan précis. Ce que la troïka et l'eurogroupe n'ont jamais envisagé malheureusement.
Une sortie pas si inéluctable ?
Certes, une sortie organisée de la Grèce de l'euro aurait le mérite de mettre fin à la comédie de la perfusion permanente sur une Grèce dépendante des autres pays européens pour rembourser ses dettes tout en saignant son économie. Tout cela est devenu tellement insupportable qu'en Allemagne et même dans d'autres pays (comme la Slovaquie), on souhaite le "Grexit".
Mais la Troïka reste un acteur majeur et persuasif et l'argument de la sortie de l'Euro a longtemps eu sa triste réponse chaotiste d'une peur panique de "l'inconnu". C'est d'ailleurs un "argument" repris par Dominique Bussereau, député Les Républicains. C'est peut-être pour cela que les Grecs sont aussi favorables à rester dans l'Euro.
Il faut aussi rappeler que la BCE, depuis Mario Draghi, a pour unique but de sauver l'Euro, coûte que coûte. Cela comprend en particulier le fait de racheter des dettes publiques des Etats, ce qui n'est pas autorisé par les textes régissant la BCE.
Le sauvetage de l'Euro risque donc, comme un réflexe pavlovien, de revenir à la rescousse de la Grèce. C'est d'ailleurs ce qu'évoque Martin Schulz qui parle de "ne pas laisser tomber les grecs" avec des prêts d'urgence de Bruxelles à Athènes pour "éviter le chaos" (toujours lui...). Dans ces conditions, on voit mal comment les négociations pourraient rester au point mort : elles reprendront sans doute et dans cette optique, tout est à nouveau possible.
On le voit donc, un nouveau rapport de force s'est créé. Les grecs ont repoussé le plan d'austérité et les aides l'accompagnant mais tout reste encore à faire. De même, la question posée et sa réponse ne remettent pas fondamentalement en cause la dépendance de la Grèce vis à vis de l'Union Européenne, ni son adhésion à une monnaie qui ne lui permet pas de sortir de l'ornière. Les négociations vont donc reprendre et grâce à ce "coup", Tsipras sera en bonne position pour obtenir plus de clémence. Dans une semaine, la rallonge de six mois sera probablement acquise... Et la politique de court terme sera prolongée...
Vin DEX