Magazine Journal intime
Suite à l'afflut massif de courriers limites révolutionnaires me demandant de me remettre le la tête dans le guidon rédactionnel au risque de me retrouver la tête au bout d'une pique si je ne m'éxècutais pas, je fais mon retour en cette nouvelle année et ce n'est pas chose facile quand je contemple la pile de travail en retard qui encombre mon bureau virtuel. C'est que le récit qui devait s'inscrire au présent à pris un coup dans l'aile et dresse maintenant une table qui se conjugue au passé ce qui, il faut en convenir est loin d'être plus que parfait.
Le Queen Charlotte Track a laissé quelques traces. Pas d'ecchymoses, pas de sang, pas de cicatrices, peu importe, je n'ai pas besoin de ça pour marcher comme un revenant du front russe. Les membres sont lourds et l'utilisation de la petite piscine chauffée de la GH me ferait le plus grand bien. Ce n'est pas parce qu'on est pas à Vittel ou à La Baule qu'on ne peut pas apprécier les biens faits d'une thalasso sur le pas de sa chambre. Cependant, depuis ma dernière plongée en ces eaux sympathiques, j'ai l'impression que la haute saison vient de poser ses valises à Picton.
En l'espace de trois jours de randonnée, l'hotel s'est rempli au même rythme que le bassin qui débordent de jeunes buveurs de bière. Dans ces conditions, comment voulez-vous que je trouve le calme et la sérénité? Je tire une croix sur les soins et me retire comme un prince déchu. Qu'il en soit ainsi, je lègue Picton à mes héritiers festoyant et met le cap au sud. La cible : Kaikoura.
Kaikoura est une destination balnéaire de premier ordre si on excepte sa taille restreinte à l'image, à quelques exceptions près, de toutes les localités de l'île du sud. Et qui dit balnéaire, dit front de mer. Et ce qui fait la réputation de l'endroit, ce n'est pas ses eaux tropicales et son sable blanc sur lequel on se dore au soleil, c'est tout l'inverse. A Kaikoura et sa péninsule, la configuration côtière fait que c'est un lieu de rassemblement majeur pour tout ce qui nage avec des poumons à l'exception de Pamela Anderson. Phoques, dauphins, baleines, cormorans, jeunesse buveuse de bières, tout y est!
D'ailleurs, sur la route qui m'y mène, le chauffeur arrète le bus le long de la route qui longe le littoral de très près. Là, dans des conditions odorantes à vous faire retourner votre petit déjeuner plus rapidement que sous 48 heures, une colonie de phoque s'ébat. Tous les passagers descendent et mitraillent pour leur tirer le portrait par pour faire sortir Brigitte Bardot du bois. Moi, j'en fais de même et m'extasie. C'est la toute première fois que je vois ces adorables saucisses rampantes dans leur habitat, l'émotion n'est pas feinte.
Ca compense en plus largement autre chose. J'ai le souvenir qu'en quittant le Rajastan en Inde, je me souviens avoir marquer ma mémoire d'une pierre blanche à la vue de mon dernier chameau. Comme les destinations restantes n'en sont pas porteuses, ça m'avait fait un petit pincement au coeur que de me rendre compte que c'était déjà la dernière fois avant le retour à Paris pourtant encore lointain que j'en voyais gambader un. C'est pourquoi en ce jour de bibis phoques, ça permet de relativiser en m'exposant de nouvelles merveilles.
A leur vue, je dégaine. La lumière a beau ne pas être idéale, la faute à des nuages qui semblent avoir établi leur capitale en Nouvelle-Zélande, j'en oublie le bus pendant quelques instants. Quelques instants seulement car après deux minutes montre en main, le chauffeur fait résonner le klaxon à dix bornes à la ronde, signe que sa patience a un appétit d'oiseau. La frustration est de mise mais qu'importe, Kaikoura n'est plus qu'à quelques minutes et d'autres colonies de phocidés sauront bien s'y sentir. Le bled atteint, l'après-midi est encore reine en son jardin. Un nouvel hébergement déniché, je pars alors en ballade sur la péninsule que longe un chemin de randonnée. La mer rejointe, je suis saisi par le paysage. La plage tapissée de sable noir est battue par les vagues tandis qu'à l'autre côté des montagnes couvertes de neige nous dominent. Dans ce même plan, la juxtaposition de l'Océan Pacifique et des arrêtes blanchies est renversante. Si je me concentre sur les sommets, impossible, si on fait fi du ressac, de se douter que la grande bleue est juste derrière et inversement. Je poursuis.
Après deux kilomètres, un panneau m'indique que je tiens ma revanche sur le chauffeur du bus : Seal colony, je ne traduis pas. Suivant l'indication, je coupe vers une large étendue de rochers. Les touristes ne se pressent pas au portillon, les k-way se comptent sur les doigts d'une main. Les phoques sont un poil plus nombreux mais à peine. Peut être est-ce l'heure du repas servi en mer ou que sais-je, mais les centaines promis ont mis les bouts. Mais peu m'importe, j'ai déjà de quoi m'extasier avec les rares qui fréquentent encore les lieux, sans doute trop feignants pour aller prendre un bain si j'en juge à leur inactivité. Ils dorment tous. Sur le dos, sur le ventre, sur le côté. Parfois, il y en a un qui se gratte mais pas plus. Ce n'est que lorsque je m'approche un peu trop près à leur gout qu'ils daignent lever la tête mais pas plus. Cela suffit en tout cas à ma joie d'être au milieu de ces géants rampants.
Je poursuis la promenade qui grimpe maintenant le long d'un escarpement, la plage ayant la bonne idée de se muer en falaises plongeantes en haut desquels les vues panoramiques se succèdent que ce soit côté littoral où la dentelle rocheuse donnent des impressions justifiées de bout du monde, ou côté montagne maintenant aggrémenté de vaches qui paissent donnant à l'ensemble un gout étrange de Suisse sur Mer.
Et, pour ne rien gacher, il n'y a plus personne à l'horizon. Rien que moi au milieu de cette démesure sans doute aidé par une journée qui finit déjà, transformant sur la fin ma trotte en cavalcade, parfait décrassage de guiboles.
De retour à mon dortoir avec la nuit, il n'y a pas grand chose à faire mis à part grignoter et se remettre. Les seules fois où je quitte temporairement la GH, je m'allume une cigarette jusqu'à la dernière autour de 22h30 quand je suis pris à parti ma bouteille de Sprite sous le bras. C'est qu'on est samedi soir et encore plus que d'habitude, les néo-zélandais profitent de leur héritage anglais pour boire jusqu'à plus soif et se mettre dans des états que la morale réprouve. D'ailleurs, à gauche de mon hotel, il y a un bar. A droite de mon hotel, il y a un bar.
A la terrasse de ce dernier, une jeunette imbibée à la limite de ses 18 printemps me salue, sympa. Je m'approche et échange les cordialités d'usage.
(je traduis)
- Salut!!
- Salut!!
- Comment tu t'appelles?
- Brice et toi?
- Brice? Mais ça vient d'où ça encore et qu'est ce que tu fous avec ta bouteille de Sprite? Fuck Sprite!!!!
- Attends, y'a un problème?
- Pourquoi tu ne bois pas de la bièèèèèèèère comme tout le monde?
- Et bien figure toi...
- Parce que le Sprite, bonjour tristeeeeesse!!!!
- Désolé que tu le prennes sur ce ton... C'est que la bière, c'est pas vraiment ma came, je suis plus un buveur de rhum.
- Fuck le rhum!!!!!!
(mon sang ne fait qu'un tour)
- Avant, c'était limite, là ça va trop loin, je n'ai pas de leçon à recevoir d'une pisseuse qui ne sais pas se tenir et qui mouillait encore son lit quand je prenais mes premières cuites. Retourne donc à l'intérieur voir si t'y fuis!
Là dessus, la demoiselle se transforme en harpie et se jète sur moi la tête la première toutes griffes dehors. Dans une maestria d'esquive rotative, j'évite la donzelle qui manque de s'écraser à terre. Elle crie. Ses potes rappliquent. Ils sont trois et ont conscience que la gamine est au delà du réel et sans même me demander de quoi il retourne, ils se saisissent de cette petite conne et la ramène à l'intérieur. Je finis ma clope et vais me coucher comme un prince.
Il faut quand même pas déconner...
A 23h, c'est l'extinction des feux. Le réveil est branché à 6h00, signe que je m'active.
Le temps presse à Kaikoura. Vingt-quatre heures sur place, c'est tout ce dont je dispose. J'ai rendez-vous l'après-midi suivante avec Anna et Tyler, que j'avais rencontrés dans le nord de l'Inde, dans leur ville de Christchurch où il est déjà prévu qu'ils m'hébergent au moins une nuit.
Quand le réveil sonne, je suis très vite sur pieds. J'ai à peine le temps pour une dernière activité qui vaut la chandelle : aller nager avec les dauphins. Comme à mon habitude, je n'ai rien réservé. Sitôt debout, je traverse le village jusqu'au bureau de la compagnie qui s'occupe de la rencontre mémorable. A l'extérieur, un crachin dégouline. Arrivé sur place dès l'ouverture à 6h30, je fais part de mon excitation. Pendant deux minutres, ne laissant pas mon interlocutrice placer un mot, je me répends sur mon impatience d'en découdre avec Oum de Galak. Puis, alors que je suis à bout de souffle, c'est son tour de prendre la parole.
- Ah non monsieur, je suis désolé mais le bateau de 7h est déjà plein, le bateau de 10h aussi, quant à celui de 13h, je ne vous en parle même pas.
- Quoi? Je me suis levé pour rien.
- Pour le reste, je ne sais pas, mais en ce qui concerne les dauphins, oui.
Bordel de bordel!! Je me suis levé pour rien!! Mon bus est à midi et d'ici là, je n'ai qu'à rentrer sous la bruine comme le héros maudit d'un film en noir et blanc des années 50.
A 8h, mon sac est déjà bouclé, je suis déjà prêt à partir. Quatre heures de patience à gromeler plus tard, je décolle enfin, énervé de la situation mais certain que les occasions se représenteront et ce, pas dans des mers à 10°!!
Attention dauphins du futur, j'arrive!!!!
PS : Commençons par souhaiter à tous une merveilleuse année, que vos souhaits soient exaucés pourvu qu'ils n'incluent pas ma tête et une pique.
PPS : Bienvenue aux derniers inscrits à la newsletter, en particulier à Bilbo joyeusement pêché sur voyage forum que le texte sur le Mont Doom devrait réjouir. Merci à tous.
PPPS : Pour les anciens inscrits que je salue aussi gaiement, merci d'être toujours là.
PPPPS : La paroisse est insatiable, mes biens chers frères, mes biens chères soeurs, continuez à convertir les infidèles de la lettre.
PPPPPS : En guise de cadeau bonus, en plus des photos de Kaikoura, vous avez le droit à 17 nouvelles vidéos sur "le Tour du Brice". En espérant que ça serve aussi à calmer les plus impatients.
PPPPPPS : Pour le reste, c'est comme d'hab, je me dépèche de rentrer des textes et de rentrer à la maison, j'arrive!!!!