L'épopée des rois thraces
Pour l'épopée des rois thraces, il vous reste un petit mois. Cette exposition fait le point sur la recherche archéologique en Bulgarie entre le Ve et le IIIe siècle avant Jésus-Christ. On est introduit dans l'expo par quelques personnages mythologiques : Orphée, mis à mort par les femmes thraces, Térée, incestueux et cannibale... Franchement, c'est sympa comme coin ! Pour l'aspect historique, sachez que le royaume des Odryses ne fait pas de vieux os. Cette aristocratie guerrière s'unifie après les guerres médiques, se casse la figure avec Philippe II et voit sa capitale Seuthopolis détruite par les Celtes en -278. On entre ensuite dans le vif du sujet avec la présentation d'objets archéologiques issus de tombes aristocratiques du Ve siècle : celles-ci permettent de constater les échanges faits avec la Grèce (les fameux vases) ainsi que la vivacité des créations thraces (armes, cnémides, bijoux...). Un petit film nous entraîne au cœur des tombes monumentales et parfois peintes (Kalanzak). Le focus sur la tombe de Golyama Kosmatka permet de découvrir de véritables trésors des arts du métal. La suite du parcours tend à montrer la variété et la richesse d'un art et d'un groupe hétéroclite. Influencés par les colonies grecques, leurs voisins macédoniens et les tribus locales, les Odryses bénéficient d'échanges artistiques et culturels avec elles, tout en gardant leur propre style. Parmi les très beaux objets exposés, on retiendra la tête de Seuthès III en bronze, d'une grande force expressive, les cnémides ciselées et martelées, la couronne de feuilles d'or (très macédonienne), les objets du trésor de Panagyurishte... Un seul regret : la complexité historique et culturelle de cette zone ne peut qu'être partiellement appréhendée à travers une telle exposition.Jambières. Tombe de Zlatinitsa. 400-350 av. J.-C. Argent et dorures. Musée national d’Histoire, Sofia © Sofia, Musée national d’histoire / Todor Dimitrov
Poussin et Dieu
Poussin et Dieu, ça se termine demain. Oui, ça mérite peut-être que vous changiez votre planning du jour ! Dans un siècle éminemment religieux comme le XVIIe siècle, rien d'étonnant à ce que les commandes s'inspirent de sujets bibliques. Mais qu'en est-il chez Poussin, ce peintre qui mêle étroitement inspirations mythologiques et religieuses ? L'exposition s'ouvre sur des œuvres monumentales, caractéristiques de l'esprit de la Contre-Réforme : ici, pas d'approche trop intériorisée ou intellectualisée mais la puissance de Dieu dans toute sa splendeur. Miracle, Assomption, dominent le fidèle. Quelques pas plus loin, une salle est consacrée aux saintes familles. L'occasion d'admirer la magnifique Sainte famille à l'escalier de Cleveland (Attention, ne vous attendez pas à voir beaucoup d’œuvres de collections étrangères, beaucoup sont habituellement exposées au Louvre). Mais aussi toutes ces autres saintes familles où le peintre semble rivaliser sans cesse d'imagination pour modifier personnages et positions : Marie qui fait des guilis au Christ, la famille élargie avec Anne et Jean-Baptiste, tout ce petit monde avec des petits bergers... et un Joseph souvent caché, distrait, pas concerné, quoi ! Mais Poussin est surtout fan de Moïse : Moïse sur le fleuve, Moïse chez pharaon, Moïse et Aaron... A travers cette figure, il fait la synthèse de bien des inspirations. C'est à la fois Moïse, Hermès, le Christ. Une figure mythologique, philosophique et religieuse. Cette façon de traiter les sujets en y introduisant des significations multiples et mystiques est tout à fait passionnante. Elle va bien au delà de la simple illustration hagiographique. Avec la série des sacrements ou des saisons, on entre dans une lecture plus savante de la peinture. Une lecture méditative sur les mystères de la foi, comme une introduction à la prière. Peintre philosophe ou peintre chrétien, la question de la foi de Poussin n'est pas tranchée dans l'exposition. Mais après tout, est-ce vraiment là l'essentiel ?Poussin, Le Déluge, Musée du Louvre
La fabrique des saintes images
L'autre expo, très liée à celle sur Poussin, et qui ferme aussi bientôt ses portes, c'est La fabrique des saintes images, Rome-Paris, 1580-1660. Elle s'interroge sur la création artistique et religieuse de la Contre Réforme. Tout commence avec la question de la représentation du Christ : incarné, celui-ci est représentable pour les chrétiens. Mais quel visage lui donner ? Peut-on vénérer son image ? Après tout, il a laissé des images de lui : le saint suaire, le voile de Véronique, non ? Puis l'on part à Rome où s'ouvrent les chemins de Caravage et Carrache, deux manières de représenter le monde, l'un dans sa matérialité, l'autre dans son universalité. Quelques dessins et tableaux scandent l'évolution de l'art religieux jusqu'à la sainte Thérèse du Bernin. Départ pour Paris où l'art religieux se veut plus sobre et dépouillé avec Vouet ou Lesueur. Et l'exposition se clôt sur le Saint Sacrement. Présence et corps réel du Christ par la transsubstantiation, l'hostie ne se montre pas comme corps mais comme pain. Sa présence au centre des tableaux montre une autre image du Christ, une image liée à la dévotion au Saint Sacrement au XVIIe siècle. C'est un visage du Christ dans notre temps. Une expo très éclairante sur les questions d'iconophilie, sur l'évolution des représentations de Dieu. A voir !Champaigne, Christ mort, Musée du Louvre