Les forces kurdes ont chassé samedi les combattants du groupe Etat
islamique (EI) de Kobané après que les jihadistes ont tué en 48 heures
plus de 170 civils, dont des femmes et des enfants, dans cette ville du
nord de la Syrie en guerre.
En lançant jeudi un assaut surprise contre
la cité frontalière de la Turquie, les jihadistes s'étaient retranchés
dans des immeubles et avaient pris en otage des dizaines de civils. Ces
derniers ont finalement réussi à fuir avec l'aide des forces kurdes,
selon des militants et l'Observatoire syrien des droits de l'Homme
(OSDH).
Après avoir fait appel à des renforts, "les combattants
des Unités de protection du peuple kurde (YPG, principale force kurde
syrienne) ont repris les positions dont l'EI s'était emparé", a précisé
l'OSDH. "Ils ont fait exploser un lycée, dernier endroit où les
jihadistes s'étaient retranchés" avec leurs otages, a précisé
l'organisation qui s'appuie sur un large réseau de militants. Le
journaliste et militant Roudi Mohammad Amine a confirmé que "les YPG ont
repris toute la ville". "Les forces kurdes ont fait exploser des mines
posées autour du lycée avant d'y pénétrer" et après s'être assurées
qu'il n'y avait plus de civils dans le bâtiment, a-t-il dit à l'AFP via
internet. Selon l'OSDH, les YPG ratissent la ville à la recherche de
jihadistes qui se seraient cachés après leur retraite.
'L'EI a réalisé son objectif'
"On ne peut pas
parler de défaite au vrai sens du terme dans la mesure où l'EI a réussi à
exécuter son plan à Kobané, qui consistait à y commettre un massacre.
Il a été chassé de la ville mais après avoir perpétré un horrible
massacre", selon le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane. Au moins
174 civils ont été tués depuis jeudi, selon l'OSDH, certains exécutés
chez eux. L'OSDH a estimé qu'il s'agissait de l'un des "pires massacres"
de l'EI en Syrie après la mort de "120 civils exécutés dans leurs
maisons", de 18 autres abattus à courte distance et de 26 habitants d'un
village proche de Kobané au début de l'assaut. Le bilan des civils tués
risque de s'alourdir car les habitants continuent à trouver des
cadavres dans les maisons et les rues, selon M. Abdel Rahmane. "Les
jihadistes ne veulent pas contrôler la ville, ils viennent juste pour
tuer le plus grand nombre de civils de la pire manière", a affirmé un
militant, Mostafa Ali.
L'EI avait subi en janvier à Kobané son
premier revers depuis le début de son expansion en 2013 en Syrie, pays
ravagé par la guerre civile depuis plus de quatre ans. Il en avait été
chassé par les YPG, aidées des frappes de la coalition internationale
dirigée par les Etats-Unis, après quatre mois de combats sanglants.
La
nouvelle attaque inattendue à Kobané avait été expliquée par des
analystes comme une "vengeance" et une "opération de diversion" de la
part des jihadistes qui ont subi une série de défaites dernièrement face
aux forces kurdes dans le nord de la Syrie. Ces dernières se trouvent
en effet à seulement 56 km au nord de Raqqa, principal fief de l'EI en
Syrie.
Kurdes et armée contre EI à Hassaké
Dans le
nord-est et le sud de la Syrie, les forces du régime de Bachar el-Assad,
qui enregistrent une série de revers depuis trois mois, livraient
combat dans deux capitales provinciales, après en avoir perdu celles de
Raqqa (nord) et Idleb (nord-ouest). A Hassaké, chef-lieu de la province
éponyme frontalière de la Turquie et de l'Irak, les forces kurdes ont
rejoint les forces du régime pour repousser les jihadistes, qui y sont
entrés jeudi en prenant le contrôle de deux quartiers. L'offensive
jihadiste a poussé 60.000 habitants de Hassaké à fuir leur foyer selon
l'Onu. Le régime partage le contrôle de la ville avec les forces kurdes.
Dans
la ville méridionale de Deraa, berceau de la révolte de mars 2011
contre le régime Assad, les combats de poursuivaient entre soldats et
rebelles qui tentent de prendre la totalité de la cité. Depuis l'assaut
rebelle jeudi, 90 personnes ont péri, dont 60 insurgés parmi lesquels
des combattants du Front al-Nosra, la branche syrienne d'el-Qaëda, selon
l'OSDH. La Syrie est ravagée par un conflit complexe impliquant régime,
rebelles, Kurdes et jihadistes qui tentent de s'arroger des pans de
territoire. Plus de 230.000 personnes y ont péri depuis 2011, selon
l'OSDH.
Source : Lorientlejour