Je me rappelle très bien, à partir de 1986, tous les étés, à cette période, mes parents, enseignants, grouillaient d'impatience pour stocker à peu près toute la maison dans deux voitures et filer en famille au chalet pour les deux mois et demi suivant. Oublier la ville. Idée qui n'a jamais été séduisante dans ma tête d'urbain.
Nous, ados, on était pas si pressés. Oui c'était merveilleux le chalet, mais nos amis, ils n'y étaient pas. Fallait négocier longtemps pour pouvoir partir après la fête nationale.
On voulait aller au feu.
On serait à dix pieds du pauvre bougre qui allait flamber vivant en 1991 dans ce feu de la St-Jean.
Oh oui, il y avait bien des spectacles, mais on en avait rien à faire, on voulait surtout se promener en conquérant entre amis. Squatter les belles filles, S'entretenir avec celles parmi nous. Déconner.
C'était important que je sois de la partie car de tous mes amis, j'étais celui qui habitait le plus près des plaines d'Abraham. On y allait à pied de chez moi. Notre grand stationnement pouvaient accueillir jusqu'à 6 voitures et (sans sens des affaires, mais alors pas du tout), je prêtais gentiment ces espaces aux amis qui le souhaitaient, gratuitement. Mon père angoissait toujours à la fois sur celui ou celle qui ne reviendrait pas chercher sa voiture le lendemain parce trop perdu mentalement et physiquement, et il angoissant davantage sur ceux qui viendraient reprendre leur voiture lourdement intoxiqués.
C'est sur ces plaines, justement à la St-Jean, que ma gang d'indéfectibles amis s'est soudée. Quelques schtroumpfs de l'école secondaire du SSF, la plupart de mon école, De Rochebelle, peut-être un(e) ou deux d'ailleurs, surement quelques filles d'écoles de filles qui ne voyaient pas de garçons de l'année et étaient libérées pour enfin aller au zoo en de telles occasions et on circulait en rois et maîtres sur les magnifiques plaines pleines.
Mon père avait difficilement cédé et accepté un délai.
Un maigre délai.
Le départ serait le 24 juin au matin.
Le feu avait lieu dans la nuit du 23 au 24.
Ma chambre étant au sous-sol contrairement aux quatre autre de la famille et le réveil ayant été fait dans l'urgence principalement par un cri du haut des escaliers disant: "On part dans 30 minutes, si tu veux déjeuner et prendre une douche!". Je n'avais fait ni l'un, ni l'autre mais m'était empressé de faire mon lit, phénomène rare, cachant sous les draps le contenu de mon estomac de la veille.
...qui y resterait les deux prochains mois et demi...
En me rendant dans l'entrée où les 4 autres m'attendaient, mes deux soeurs parfaitement conscientes de ce que j'avais fait la veille et elles-mêmes relativement puckées, ma mère, à qui on ne passe rien, sachant très bien que je ne suis pas dans un état normal et mon père, clés au bout des doigts, sourire aux dents, pensant me faire plaisir en me faisant conduire.
"euh...je ne sais pas...ouin?"
Ma mère a flairé le reflux.
"Je ne sais pas si c'est une bonne idée, Hunt ne semble pas dans son assiette"
Puis, une seconde fois, pour mieux sceller dans les mémoires collectives la signification du verbe régurgiter, surtout dans les mémoires endormies de mes soeurs de 14 et 12 ans, une seconde flaque violette sur le bitume de notre entrée.
Mon père, principalement insulté:
"Booooooon, t'as essayé l'alcoool hier au soir...?"
"essayer" c'est la première chose que j'ai pensé la tête penchée un long filet de salive pendu des lèvres. Non je n'essayais pas, ce n'était pas ma première fois, mais oui, c'était le première (et la seule) fois que je m'humiliais de la sorte devant mes parents et mes deux soeurs.
Mon fils a 15 ans, Hier, il a pris deux bières et du coke'n rhum. (son expression)
Et au milieu de ses amis et amies.
Attendez...
Coke & Rhum...
À moins que le naïf ne soit moi...