Il y a longtemps, quand naissaient les premières plates-formes de prêts-emprunts P2P (Zopa et Prosper), leur ambition était d'offrir un accès au crédit à ceux qui étaient exclus des circuits traditionnels. Un peu éclipsée depuis, cette vision reprend forme aujourd'hui, différemment, dans un partenariat conclus entre Lending Club et l'Opportunity Fund.
La réalité du marché actuel est que les grands acteurs de la finance participative cherchent avant tout à capter des emprunteurs à faible risque, comme les banques, en leur promettant des conditions plus avantageuses que ces dernières, grâce à leurs structures de coût optimisées. Et, dans bien des cas, ils utilisent les mêmes outils qu'elles pour évaluer la « qualité » des dossiers, ce qui laisse donc toujours à l'écart les personnes hors système, quel que soit leur potentiel. De ce point de vue, Lending Club, le numéro 1 du secteur aux États-Unis, ne se distingue pas de ses confrères.
Cependant, à travers un accord original, le géant du crowdfunding va faire profiter l'association Opportunity Fund de son expertise technique afin qu'elle optimise son modèle (sans but lucratif) de prêt aux PME. En pratique, les demandes écartées par Lending Club seront requalifiées automatiquement selon les critères de l'organisation, de manière à lui être directement transférées, le cas échéant. Là, elles seront revues (manuellement) selon les procédures en vigueur en vue d'un éventuel micro-financement.
Avec cette opération, l'Opportunity Fund espère distribuer 10 millions de dollars de prêts à quelques 400 petites entreprises californiennes mal servies par les dispositifs classiques, en se fixant pour objectif de contribuer de la sorte à la création de 1 000 emplois. La collaboration avec Lending Club doit rendre possible une identification plus rapide et plus efficace des bénéficiaires, tandis que la plate-forme P2P en profite, elle, pour s'offrir une image positive (dans une sorte de retour aux sources), tout en évitant de décourager totalement des utilisateurs susceptibles de revenir un jour.
En réalité, la stratégie de la startup multi-milliardaire est de couvrir tous les étages de la fusée du crédit, qui lui permettra de conserver le contact avec ses « clients » en permanence, quelle que soit leur situation et quel que soit leur besoin. D'un côté, ce sont des accords avec des banques grâce auxquels elle devient la solution de repli des demandeurs non éligibles, de l'autre, elle reporte elle-même les dossiers les plus risqués sur d'autres partenaires. Au milieu, elle prend en charge le gros de l'activité. Et, sans y paraître, Lending Club devient ainsi le point d'entrée privilégié des enprunteurs…