Le médicament en question est l’isradipine, un anti-hypertenseur. Ce même médicament a déjà été documenté comme capable, chez l’animal, de bloquer l’évolution de la maladie de Parkinson (1), offrant déjà l’espoir thérapeutique de protéger les neurones dopaminergiques, qui synthétisent la dopamine et l’utilisent comme neurotransmetteur. Ces mêmes neurones qui appartiennent à la voie dopaminergique activée par des substances qui vont favoriser la libération de dopamine (comme les amphétamines) ou inhiber la recapture de la dopamine (comme la cocaïne) ou encore lever l’inhibition du fonctionnement de la voie mésocorticolimbique au niveau des neurones dopaminergiques, ce qui réduit l’inhibition de ces neurones et entraîne aussi une augmentation de la libération de dopamine (comme l’alcool et le tabac).
Le Pr Hitoshi Morikawa, professeur agrégé de neurologie à l’Université du Texas résume : L’addiction résulte de mécanismes complexes et multifactoriels, c’est à la fois un besoin physique et le résultat d’une expérience d’addiction souvent facteur majeur et déclencheur de rechute. Cette expérience conduit, au moindre stimulus de rappel de la substance, au comportement de consommation, pour obtenir une récompense. Son équipe a entraîné des rats à associer soit une chambre noire ou blanche à la consommation d’une substance. Les rats une fois » toxicomanes » avaient le choix d’aller dans la chambre de leur choix, ils choisissent bien évidemment la couleur associée à leur addiction.
· Cependant, lorsque les chercheurs donnent aux rats dépendants une forte dose d’isradipine avant même que les rats fassent leur choix, leur préférence pour la chambre de la couleur de leur addiction devient bien moins nette, au fil du temps que pour le groupe de contrôle. Des résultats qui suggèrent que l’expérience ou l’histoire de la toxicomanie a été supprimée totalement de la mémoire.
En pratique, l’isradipine efface, chez le "rat toxico" tous les souvenirs qui le conduisent à associer une chambre d’une certaine couleur avec sa substance addictive.
Explication : L’antihypertenseur bloque un type spécifique de canal ionique, exprimé dans le cœur et les vaisseaux sanguins mais aussi dans certaines cellules du cerveau. Le blocage de ces canaux ioniques dans les cellules du cerveau, via l’isradipine, semble inverser le câblage des circuits du cerveau impliqués dans l’apprentissage de la récompense associé à la toxicomanie. Le médicament cible ainsi les associations entre l’expérience de la drogue, la récompense et le comportement addictif.
» De nombreux toxicomanes veulent arrêter, mais leurs cerveaux sont déjà conditionnés « , explique l’auteur.
L’avantage d’un médicament déjà disponible : l’isradipine est déjà autorisée par l’agence américaine FDA, donc les essais cliniques pourraient être effectués beaucoup plus rapidement. Autre point à régler, le médicament abaissant la pression artérielle, il sera nécessaire de le combiner à d’autres traitements.
Source: Molecular Psychiatry June 23, 2015 DOI: 10.1038/MP.2015.84 L-type Ca2+ channel blockade with antihypertensive medication disrupts VTA synaptic plasticity and drug-associated contextual memory
(1) Nature 28 June 2007doi:10.1038/nature05865 Rejuvenation’ protects neurons in mouse models of Parkinson’s disease