Aujourd’hui, notre ours grognon et mal léché travaille dans le New York des années 20 à la construction de gratte-ciels, comme tant d’autres immigrés. Si son quotidien est fort éloigné du rêve américain, il va néanmoins se retrouver bousculé par l’irruption d’Alvin dans sa vie. Suite à une promesse faite à une amie, notre vieux célibataire désabusé va en effet devoir s’occuper de ce petit orphelin isolent et rebelle…
Si l’histoire de ces deux naufragés de la vie, qui se retrouvent contraints de faire un bout de chemin ensemble, ne déborde pas d’originalité, la magie de l’univers d’Abélard séduit cependant dès les premières pages. Le charme de cette ambiance particulière mêlant tendresse, mélancolie, humour et poésie fonctionne de nouveau à merveille. Saupoudrant son récit de dialogues savoureux, Régis Hautière parvient non seulement à donner de l’importance aux mots, mais également à chaque non-dit. Le lecteur n’hésite pas une seconde à adopter ce petit personnage extrêmement attachant, que l’auteur ne manque pas de confronter aux dures réalités du monde. Heureusement, ce dernier peut de nouveau compter sur les maximes philosophiques qui sortent du chapeau magique d’Abélard… afin de relativiser et ne pas sombrer dans la désillusion.
« Si tu pleures le passé, si tu crains l’avenir, accroche-toi au présent. »
Si la narration de Régis Hautière tout au long de ce conte initiatique et philosophique est un modèle du genre, le dessin de Renaud Dillies renforce encore la poésie de chaque page. Privilégiant souvent l’ambiance aux mots, les auteurs installent une atmosphère envoûtante, portée par la colorisation douce et totalement adéquate de Christophe Bouchard.
Un diptyque qui s’annonce de la même veine qu’Abélard : beau et poétique, sombre et cruel, mais surtout indispensable !
Un bien bel héritage, que vous pouvez retrouver dans mon Top BD de l’année !
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