Dans l’article d’aujourd’hui je vais vous aider à diminuer le nombre de photos floues. Car une photo manquant de netteté est évidemment à bannir ! Vous savez, lorsque je trie mes photos à l’issue d’une séance sur le terrain, la netteté, avec l’attitude et la composition et l’exposition est un des critères d’élimination. Je veux dire par là que si une image est bien exposée, bien composée, montre un beau comportement animal, mais n’est pas assez nette (surtout sur les yeux), hop, classement vertical (je supprime quoi).
Je ne transige pas avec ça. Ça n’est pas un petit coup d’accentuation de la netteté localisée qui arrangera quoi que ce soit. Si dès la prise de vue la netteté est manquante, c’est mort !
Mais il ne suffit pas juste d’être intraitable sur ce point, encore faut-il savoir pourquoi une image est floue. Parce que si je me contente de supprimer ces photos, sans comprendre pourquoi elles le sont, c’est problématique. Je ne pourrais pas progresser et surtout j’aurais constamment trop d’images avec ce défaut rédhibitoire.
La vraie question est donc celle-ci : pourquoi mes images sont-elles trop souvent floues et comment y remédier ?
Pourquoi vos images sont-elles floues ?
Il y a trois principales causes expliquant le flou d’une image :
- une mise au point faite au mauvais endroit
- des mouvements de l’animal trop rapides en regard de la vitesse d’obturation
- des mouvements du photographe trop prononcés au moment de la prise de vue.
Je vais dans cet article m’intéresser à ce dernier point. Ce qu’on appelle communément le flou de bougé. Le flou dû aux mouvements parasites du reflex (et donc directement du photographe).
Et oui, messieurs, mesdames, c’est que je vous accuse, vous, de provoquer du flou de bougé ! Car si votre image est floue alors que la mise au point semble être faite au bon endroit et que l’animal était quasiment immobile, c’est que c’est de votre seule faute !
Pas de panique. Ne partez pas en criant que la photo animalière ne voudra jamais de vous. Laissez vous encore une chance de devenir le prochain Bastien Riu (ou le prochain Michel d’Oultremont)
Rassurez-vous, comme il est facile de savoir d’où vient une image floue, il est simple aussi de remédier au problème.
Faisons un test
Je crois que les débutants ont assez peu conscience d’une chose capitale : dès lors qu’un photographe utilise une longue focale montée sur son reflex (un gros zoom), la scène visualisée dans l’oeilleton tremble beaucoup.
Avez-vous déjà regardé dans des jumelles ? J’espère que oui, car sinon, je vous conseille d’arrêter tout de suite de lire cet article et de vous consacrer dès maintenant aux techniques de base de la photo animalière ! Donc, je disais, si vous regardez à travers des jumelles normalement puissantes, comme des 10×42, vous remarquerez à quel point l’image n’est pas stable. Et ce, même si vous faites l’effort de l’être ! C’est tout simplement dû au fait que le rapport de grossissement est tel que tout mouvement, même très faible, est multiplié par ce rapport de grossissement.
Et plus le grossissement est fort, plus l’effet est accentué. Je me souviens avoir testé des jumelles 12×52 (grossissement douze fois donc) et bien l’image que j’avais dans les yeux n’était pas stable du tout et semblait limite floue : je bougeais beaucoup trop.
Pour vous le prouver, regardez la petite vidéo ci-dessous que j’ai tournée pour l’occasion. J’utilise mon 300 mm à main levée sans faire d’effort particulier de stabilisation (stabilisation mécanique d’ailleurs désactivée).
Vous voyez ? Et encore … ce n’est « qu’un » 300 mm. Imaginez la chose avec un 500 mm.
Bref, vous devez comprendre qu’à partir du moment où vous utilisez une grande focale, vous, en tant qu’être humain normalement constitué, vous n’êtes pas capable, seul, d’être assez stable.
Et ce manque de stabilité, ces micro-mouvements parasites, se retrouveront très souvent dans vos images. Et comment, d’après vous, ces mouvements se traduiront-ils au final ? … Par du flou ! Du flou de bougé !
Il faut donc à tout prix faire en sorte que ces mouvements ne parasitent pas la photo. Vous devez donc recourir à des aides pour :
- soit carrément supprimer ces vibrations
- soit vous débrouiller pour qu’elles ne floutent pas la photo
C’est ce que je vais vous montrer maintenant.
Technique #1 : acheter un trépied
Un trépied est l’accessoire indispensable pour le photographe animalier. D’ailleurs on ne devrait même pas parler d’accessoire mais d’équipement de base. Lorsque vous achetez un reflex et un téléobjectif ne remettez pas à plus tard l’achat du trépied. Je vous le dit , c’est la base de votre l’équipement. Avant l’investissement dans des affûts tente et autres sac à dos.
Pourquoi ? Parce qu’il s’agit du meilleur outil pour supprimer ces mouvements dont je vous parlais plus haut. A votre avis, pourquoi tous les ornithologues fixent-ils leurs longues-vues de 1600 mm sur trépied ? Pour ne pas subir les vibrations qui rendraient l’image inutilisable.
À vous de faire pareil, même si, évidemment, vous n’avez pas de 1600 mm.
En plus d’être indispensable pour les prises de vue avec des longues focales, le trépied vous aidera à développer votre créativité ! À vous les pauses longues pour obtenir de jolis effets de filés d’eau.
Et, j’en ai ensuite terminé, l’utilisation d’un trépied en affût est in-dis-pen-sable ! Vous ne pourrez jamais tenir plusieurs dizaines de minutes avec le reflex dans les mains prêt à intervenir, sauf à le poser sur vos genoux. Ce qui n’est pas la meilleure façon d’être réactif ! Alors que fixé sur la tête du trépied, avec le cadrage qui va bien, il n’y a plus qu’à déclencher !
J’allais vous renvoyer sur un article que je pensais avoir écrit sur Comment bien choisir son trépied pour la photo animalière … mais je n’en ai pas ! C’est donc noté sur ma (longue) liste d’idées d’articles.
Technique #2 : bien utiliser le trépied
J’ai découvert la technique que je vous présente assez récemment. Ou disons plutôt que j’en ai seulement compris le sens il n’y a pas longtemps.
J’ai souvent vu des photographes de sport sur les bords des terrains avec une main posée sur le dessus de leur téléobjectif, bien sur lui-même posé sur un trépied (un monopode en fait). Longtemps j’ai cru que c’était une position de confort, voire même pour faire plus photographe « stylé »
Mais non, pas du tout ! Il y a une vraie utilité à poser la main sur l’objectif.
Le but étant de réduire les vibrations provoquées par le mouvement du miroir au moment du déclenchement. C’est le fameux clic-clac qu’on entend. Et bien ce clic-clac provoque invariablement des vibrations hautes-fréquences qui peuvent, sinon rendre toute l’image floue, parfois enlever du piqué.
Et ces vibrations là sont obligatoires, mais en plus amplifiées par les téléobjectifs ! (sauf à relever le miroir, mais pour l’animalier d’action c’est compliqué car alors on se prive de la prise de vue en rafale par exemple). Ça fait un peu comme un haut-parleur si vous voulez. Plus il est gros et plus le bruit du départ sera amplifié.
Alors pour minimiser ces vibrations il y a une astuce toute bête : mettre votre main sur l’objectif :
- placez votre main gauche, si vous êtes droitier, sur le dessus de l’objectif vers son centre de gravité
- ensuite, à l’aide de votre main droite, celle qui tient le reflex, composez votre image comme d’habitude, en gardant toujours la main gauche sur l’objectif
- pensez à bien caler votre front sur la face arrière du reflex pour ajouter à la stabilité.
- et pour finir, ne tapez pas comme un sauvage sur le déclencheur ! Laissez votre doigt en contact permanent sur le bouton et pressez doucement ! Ça vous parait simple et évident … mais pris dans l’excitation du moment, on peut oublier ces basiques.
N’hésitez pas à vous entrainer à vide, c’est à dire chez vous, tranquillement, dans le calme.
Et oui ! Tout se joue vous voyez à des détails comme celui-ci : la main gauche posée sur l’objectif pour absorber les vibrations du miroir. C’est fou non ?
Et si vous doutez encore que le relevage du miroir provoque des vibrations, alors faites ce test : mettez vos dents de devant sur le dessus du boitier et déclenchez. Vous comprendrez pourquoi je vous dis que ça vibre !!!!
Technique #3 : bien utiliser le stabilisateur
On a coutume de dire qu’il vaut mieux désactiver le stabilisateur quand on est monté sur trépied. Oui et non. J’ai moi-même souvent dit oui !Tiens, par exemple Fabien Gréban me disait qu’il désactivait en permanence le stabilisateur de son 500 mm, puisqu’il était toujours sur trépied. Mais aujourd’hui, il me faut nuancer tout ça. Alors qu’en est-il donc exactement ?
D’après ce que j’ai pu lire à ce sujet à droite et à gauche, sur le net et sur des forums par exemple, tout dépend de l’âge de votre objectif.
Les téléobjectifs stabilisés de première génération ne semblaient pas être capables de gérer l’absence de vibration due à l’utilisation d’un trépied. Car paradoxalement, le stabilisateur cherchait à tout prix à compenser des vibrations inexistantes et finissait par en créer, là où il n’y en avait pas ! D’où, effectivement, le conseil, vu, lu et entendu un peu partout de désactiver la stab’ avec un trépied.
Sur les objectifs stabilisés plus récents, les fabricants auraient faits des progrès dans ce domaine. Ces derniers conseilleraient donc maintenant de laisser la stab’ sur ON. Ceci aurait plusieurs avantages :
- limiter les vibrations du relevé de miroir (oui, le même que tout à l’heure ! )
- lutter contre les vibrations du vent
Nikon par exemple intègre une fonction spéciale pour Trépied. Il suffit d’enclencher le bouton si votre reflex est sur trépied.
Je ne suis pas en mesure de tester évidement tout ça. Je vous donne simplement l’information, à vous de voir ! Alors n’hésitez pas à en discuter dans les commentaires. J’aimerais bien voir votre avis là-dessus.
Ah dernière chose quand même, je laisse quant à moi la stabilisation toujours activée pour des prises de vue à vitesse élevée. Je pense que le stabilisateur m’apportera plus de bénéfices que de problèmes. En effet, son activité permettra de limiter les effets de la vibration du relevage du miroir. Par contre, si je fais des filés d’eau avec des temps de pose supérieurs à la seconde, alors je le désactive. Car oui, dans ce cas précis, l’activité dans le vide de la stabilisation générera des vibrations parasites.
Pour info, chez Pentax, il s’agit du système Shake Réduction intégré au boitier. Voici ce que dit Pentax : « grâce à un “servomoteur” et à la force magnétique, les vibrations de l’appareil seront compensées pour éviter tout flou de bougé « .
Petite dernière astuce qui peut vous intéresser. Si vous avez la fonction Live View disponible sur votre reflex, il peut-être intéressant de l’utiliser. En effet, pendant une prise de vue en mode Live View (c’est à dire que vous ne regardez plus la scène dans l’oeilleton mais sur l’écran arrière, exactement comme avec le compact numérique de tonton Gérard), le miroir est en permanence relevé. Ainsi, plus de vibrations parasites dues au clic clac. Et vous pouvez toujours bénéficier du mode rafale par exemple. Cette astuce peut vous permettre de gagner encore un peu plus en piqué. Bon, sachez qu’avec des vitesses très élevées, la butée du miroir n’aura pas d’incidence, mais avec des vitesses plus modestes, ça peut faire une petite différence.
Technique #4 : shooter avec une vitesse élevée
Tous les conseils précédents visaient à supprimer les mouvements, les vibrations à la source. Dans ce paragraphe, l’objectif est de faire en sorte que ces tremblements, s’ils sont présents (parce que vous êtes à main levée notamment), puissent au moins ne pas créer du flou dans la photo finale.
Et pour se faire, il n’existe qu’une seule et unique façon : shooter à vitesse élevée. Ce faisant, et les vibrations du relevage du miroir et les tremblements du photographe seront figés. Exactement comme le sont les pattes d’un lapin en course ou les ailes d’un oiseau en vol.
Vitesse d’obturation élevée =mouvement des ailes d’un oiseau en vol figé = vibrations/tremblements du photographe figés aussi.
La question est : quelle est la vitesse à privilégier ? Il existe une règle ultra simple facile à retenir pour être certain de figer tout ça :
Shooter à une vitesse au moins égale à la focale utilisée.
Autrement dit : si vous utilisez un 500 mm, alors votre vitesse ne devrait pas descendre en dessous de 1/500.
Voilà pour la théorie. En pratique, il n’est pas toujours facile d’y parvenir. Car quand la lumière vient à manquer, difficile de réussir à respecter ça. Il ne faut donc alors pas hésiter à travailler à pleine ouverture et aussi à photographier avec des ISO élevés .
Et puis vous devez aussi tenir compte d’autres paramètres pour ajuster cette règle à votre situation propre. Par exemple si vous avez un boitier ou un objectif stabilisés vous pouvez vous permettre de descendre en vitesse. On peut avec un objectif stabilisé descendre de 2 ou 3 vitesses.
ISO 400 f/4 1/640 0ev 300mm
Pareil si vous utilisez un capteur plein format ou APS-C. Dans ce dernier cas, vous devez appliquer un coefficient multplicateur de 1,5 à la focale utilisée. Mon 300 mm est en réalité un 450 mm sur mon Pentax K3. Je dois en tenir compte si je veux respecter la règle écrite plus haut.
Pour finir cet article, je veux vous dire qu’il vous arrivera parfois de sortir des images floues malgré toutes ces précautions prises ! Dans ces cas là, sachez aussi prendre du recul et ne pas chercher des explications à tout !! Il y a parfois des photos qui sont floues fans raison apparentes ! Regardez cette photos et ses EXIFS :
- vitesse largement supérieure à la focale utilisée
- mise au point faite sur le sujet
- mouvement du sujet quasi nul.
Pourtant, l’image est floue. Pourquoi ? Je n’en sais rien. La preuve : l’image suivante est nette. Je ne vais donc pas me triturer le cerveau pour le cas isolé de cette photo. Faites donc pareil de temps en temps. Sachez lâcher du leste !
Et enfin pour aller plus loin, je vous invite à voir la vidéo que j’avais faite il y a quelque temps dans laquelle je vous montrais 4 positions de photographe pour être le plus stable possible