"Un francais" , ce film de Diastème sorti le 10 juin dernier qui retrace le parcours, sur plusieurs décennies, d’un skinhead qui se détache progressivement de sa haine et s’éloigne de l’ultranationalisme, a fait beaucoup parler de lui, et malheureusement pour des raisons plus polémistes que cinématographiques.
A quelques jours de la sortie en salle le réalisateur du film, Diastème avait en effet publié sur son blog mardi 26 mai un message pour exprimer son indignation et sa déception, suite à l'éventualité de l'annulation des avant premières du film prévues le 2 juin prochain, du à une certaine frilosité ambiante des exploitants (même si finalement le film devrait quand même avoir pas mal de copies).
Il faut dire que ce film, plongée dans le monde des skinheads néo-nazis, pouvait effrayer sur le papier, mais au vu du résultat sur grand écran, on ne peut qu'apprécier que Diastème ait préféré faire une oeuvre bien plus cinématographique que didactique ou polémiste, ce qui prouve que la polémique est parfaitement injustifiée, leurs instigateurs semblant avoir villipendé le film sans même le voir, ce qui est avouons le, sans hésiter, assez consternant.
Le second long métrage de Diastème- après un premier, "le bruit des gens autour", (trop méconnue) chronique sur un troupe de théatreux lors d'un Festival D'Avignon, touche d'emblée par son ambition, plutôt rare dans le cinéma français.
En allant sur la plate bande de grands films étrangers comme "Dany Balint" (un des premiers rôles de Ryan Golsing, "American History X" ou "This is england", "Un français" s'appuie sur un scénario qui mélange avec habileté et acuite destin individuel et dimension historique.
Réussissant à raconter en moins d'une heure quarante près de 30 ans d'histoire de France depuis la montée de l'extrême droite dans les années 80 jusqu'à la Manif Pour Tous," Un français" réussit ce qu'échouait à montrer "Des Lendemains qui chantent" pour prendre un exemple récent de film français, qui avait sur le papier du moins, un projet similaire.
La violence des premières scènes et de toute la première demi heure du film peut dérouter et rebuter les âmes sensibles, mais elle parait pourtant indispensable pour éclairer cette réalité de cette époque, d'autant que la réalisation de Diastème refuse aisément toute complaisance ou maniérisme qui aurait plombé un tel sujet.De même, les éllipses de la seconde partie sont sans doute un peu trop brutales, donnant l'impression que la " réhabiliation" de Marco est un peu trop rapide à appréhender, mais malgré ces très légers bémols, on sait gré au scénario à Diastème de refuser tout schématisme et simplification.
Le film vaut aussi énormément grâce à l'interprétation habitée et toujours juste d'Alban Lenoir. Ne suivant pas la série Hero corp, je le connaissais surtout en tant que complice de l'humoriste-chanteur Max Boublil et notamment sa brillante apparition dans son clip «Mon coloc'». Autant dire que sa prestation glacante, toute en non-dit et interiorisation épate et surprend largement du début à la fin du film. Le reste du casting n'est pas forcément de même teneur, mais on y distnguera quand même le trop rare Patrick Pineau en pharmacien salvateur, et la jeune belge Lucie Debay qui confirme tout le bien déjà repéré dans Mélody.
Bref, "un Français" de Diastème n'est pas toujours plaisant à regarder, mais sur un tel sujet, le contraire aurait été étrange, mais il est assurément une oeuvre salutaire et respectable de bout en bout.