Me voilà rentré. Je viens de passer les huit derniers mois en Angleterre. Huit mois "loin" de chez moi. De l'avis de certains, ce serait l'heure du bilan. Alors, que retenir ? Je pourrais parler pêle-mêle de moeurs étranges, de goûts bizarres, de lieux sympa, de lieux magiques, de rencontres tantôt étonnantes, tantôt fantastiques et faire ainsi le tour - infidèle et bâclé - d'une farandole de souvenirs. Mais, ce faisant, j'aurais non seulement le sentiment de ne rien dire d'essentiel, mais aussi celui de tourner le dos à la première de mes découvertes, celle qui m'a le plus frappé et celle dont, en un sens, je suis le plus fier : l'amour de mon propre pays. L'attachement à mon quotidien. Le besoin de mes habitudes.
Car - on s'en doute - vivre à l'étranger, c'est d'abord faire l'expérience de l'autre. Une expérience immédiate et totale ; une immersion complète, au cours de laquelle chacun se défait de la triste couleur de la routine. Mais, très vite, après quelques semaines, quelques mois, les choses prennent une autre tournure. L'autre, à son rythme, devient familier ; et, peu à peu, on fait l'expérience de soi. Un matin, on finit par ouvrir des yeux tout étonnés sur son propre nombril.
Vivre à l'étranger, c'est en effet se découvrir, se rencontrer en creux de tout ce qu'on ne connait pas ; c'est se retrouver dans le manque de ces choses qui font pourtant la banalité de nos jours ; c'est apercevoir son pays dans la frustration inévitable qu'engendre les différences ; c'est se demander pourquoi l'exil nourrit nos rêves quand tout ce qui nous remplit est à portée de main.
Une pâtisserie, une terrasse de brasserie, un programme télé, un verre de vin, une boutique - autant d'éléments sans intérêt, ordinaires mais qui, chacun à leur façon, construisent notre espace intérieur sans que l'on s'en rende compte.
Alors, avant de maudire le réveil qui sonne le départ de votre journée type, avant de pester sur ces rues et ces lieux trop connus, trop arpentés, avant de soulever un sourcil blasé sur votre quotidien, souvenez-vous que cette galaxie stone, pâlotte et froide vous porte en vérité plus que le sol sur lequel vous marchez...
Et si vous vous en moquez, qu'à cela ne tienne : depuis EasyJet et Ryanair, le monde, mes amis, vous ouvre grand les bras !