Un film de Woody Allen (1980 - USA) avec Woody Allen, Charlotte Rampling, Marie-Christine Barrault, Jessica Harper - en N.B.
Surréaliste et personnel.
L'histoire : Le réalisateur Sandy Bates, auteur de comédies à succès, n'en peut plus ; il s'interroge ; doit-il continuer, ou prendre un tournant et se lancer dans les films dramatiques, tout arrêter ? Ses producteurs et attachés de presse l'obligent à participer à un Festival centré autour de son oeuvre. Il s'y rend à contre-coeur, tente de faire bonne figure parmi les hordes de fans qui veulent un autographe, un bisou, une photo, un bon plan, un piston... Il ne comprend plus pourquoi on l'aime tant. Qu'est-ce que ses films ont donc de si génial ? Et ses femmes ? Il ne sait plus qui choisir entre son ex, Dorrie, actrice charmante mais anorexique névrosée, la nouvelle, une Française divorcée, mais dotée de deux gosses, ou bien cette jeune violoniste rencontrée au Festival...
Mon avis : Voilà un film qui laissera sûrement de glace ceux qui ne sont pas fans de Woody. Il est extrêmement personnel, puis qu'il analyse les doutes et les états d'âme d'un réalisateur au mileu de sa carrière ; une remise en question qui touche aussi sa vie privée. La crise de la quarantaine en somme.
Et pour ce faire, Woody utilise une technique plutôt hermétique, qui multiplie les flash-backs récents (ses relations avec les femmes), anciens (quand il était enfant), les scènes de ses films (ceux du réalisateur qu'il incarne), et puis des choses totalement oniriques, dont on ne sait plus si elles appartiennent à l'une ou l'autre des catégories ; le tout dans un présent où abondent les personnages bizarroïdes à la limite du freak ! Et Allen nous parle de sa judaïté, avec un humour décalé et terriblement rafraîchissant, en rappelant ses goûts, incompris, pour la nourriture casher et en donnant à la plupart des fans qui le poursuivent, collants, menaçants, sans-gêne, presque effrayants, des visages en caricatures de juifs, du moins dans l'imaginaire hélas collectif : long nez, oeil triste, grande bouche torve ! Se moquer des juifs, même si on est juif, faut le faire. Et l'on voit encore combien le puritanisme et le politiquement correct a aujourd'hui mis une nouvelle chappe de plomb sur l'Occident. Ce serait impossible aujourd'hui...
La famille juive est également représentée, étouffant depuis l'enfance le jeune Sandy de son amour envahissant.
Woody en profite aussi pour lancer des piques aux intellos, aux puissants, aux femmes, si exigeantes...
Au final, un film très original, qui fourmille de répliques absolument top, dont voici quelques unes :
Une femme, à Sandy :
- Je me suis fait refaire le nez, la bouche, le menton, les seins, les fesses...
- Oh, ils devraient faire ça pour les autoroutes ; ça roulerait drôlement mieux.
Sandy aux flics qui ont trouvé un revolver dans sa voiture :
- Ben oui j'ai une arme. C'est juste pour les nazis, au cas où. Je suis un peu parano avec ça. Je viens d'une famille qui eu des problèmes avec ces gens-là. C'est juste un truc anti-nazi, quoi.
Les aliens ont débarqué et s'adressent à Sandy :
- On n'arrive pas à respirer votre air !
- Oh vous en faites pas ! Bientôt on n'y arrivera plus non plus.
Et la musique piano jazz que Woody aime tant.
Ce film est une sorte de synthèse de tout son univers. Habile, distrayant, un peu magique. Mais qui nous laisse un peu sur notre faim : au fait, il voulait nous dire quoi, au juste ? Quelle "leçon" tire-t-il de toutes ces années ? Mais après tout... c'est sa vie.