Chicago a peut-être les routes les plus accidentées des Etats-Unis, elle compte néanmoins un artiste reconverti en agent de voirie hors du commun : Jim Bachor. Ce nom ne vous est peut être pas familier mais ses réalisations font elles le tour de la toile. Portrait d'un street artiste passé maître dans l'art de la mosaïque.
L'artiste Jim Bachor en plein travail (crédit photo : Reuters/Jim Young)
Un agent de voirie pas comme les autres
Un homme portant un gilet orange fluo, truelle à la main, s'affaire en plein milieu d'une route. Autour de lui, quelques cônes de circulation viennent délimiter sa zone d'intervention.
A première vue, tout laisse penser à un agent de la voirie luttant tant bien que mal contre le fléau ultime des conducteurs : les "potholes" (nids-de-poule), des trous béants présents par milliers sur les chaussées de Chicago, troisième plus grande ville des États-Unis.
Or cette fois-ci il ne s'agit pas d'un employé de la ville mais d'un bon samaritain, Jim Bachor qui, en plus d'améliorer le quotidien des Chicagoans, transforme ces nids de poule en véritables œuvres d'art.
Tout débute en mai 2013, alors que la ville de Chicago peine à se remettre d'un hiver rigoureux où les températures extrêmes ont laissé comme stigmates un nombre astronomique de nids-de-poule, Jim Barton, artiste mosaïste depuis plus de quinze ans a l'idée de poser des installations en lieu et place de ces trous venus défigurer la chaussée.
(crédit : Jim Bachor)
Il commence dans un premier temps à combler un nid-de-poule placé juste devant chez lui en intervenant de nuit afin d'éviter tout désagrément avec la police. Pour ses premières mosaïques, Jim Bachor reprend les couleurs et symboles de la ville de Chicago : un fond bleu et blanc orné d'étoiles rouges. Les messages inscrits, eux, varient et sont souvent teintés d'humour qu'il s'agisse d'une numérotation aléatoire du nid-de-poule ou des coordonnées téléphonique du garage le plus proche.
Exemple d'une mosaïque avec le contact du garage le plus proche (crédit : Jim Bachor)
Très rapidement, les conducteurs ne font plus d'écarts pour éviter la présence éventuelle de nids-de-poule mais pour tenter d'admirer ces mosaïques suscitant également la curiosité des agents de voirie.
"Parler de choses modernes dans une langue ancienne"
Tel est le crédo de Jim Bachor qui, après avoir évolué plus de vingt ans dans le milieu du marketing et de la publicité, décide, début 2000, de vivre de sa passion : la mosaïque. Un savoir-faire qu'il apprendra à Ravenne en Italie, une des dernières écoles d'art à enseigner des techniques datant de l'époque byzantine.
Fasciné par la beauté intacte de ces mosaïques vieilles de plus de deux millénaires, Jim Bachor trouve alors dans cet art décoratif le medium idéal pour une forme de street art pérenne.
Série florale réalisée en 2014 à Chicago (crédit : Jim Bachor)
Chacune de ces installations est donc le fruit de longues heures de travail durant lesquelles l'artiste assemble avec minutie les pièces d'un puzzle fait de marbre et de pâte de verre.
"Treats in the streets"
Après avoir fait fleurir les chaussées, Jim Bachor débute en mars 2015 une nouvelle série de 10 mosaïques placées sous le signe du cône glacé.
"Twin Lime Popsicle", Chicago (crédit : Jim Bachor)
"Strawberry Ice Cream Sandwich", "Twin Lime Popsicle" ou encore "Single Scoop Ice Cream Cone", l'artiste, reconverti en artisan-glacier d'un nouveau genre, offre aux riverains un avant-goût de l'été, haut en couleur.
"Push Up", Chicago (crédit : Jim Bachor)
Une série qui voyagera hors des frontières de l'Illinois puisque que le mosaïste a eu l'occasion d'installer plusieurs de ses réalisations en Finlande.
"Amppari-mehujaa", Finlande (crédit : Jim Bachor)
A travers ces trois séries, Jim Bachor a su apporter sa propre touche de modernité à cet héritage artistique séculaire et livre au passage, une nouvelle forme de street art, utile et pérenne.