En 1921, lorsque Gabrielle Chanel jette son dévolu sur la cinquième proposition que lui fait le parfumeur Ernest Beau, elle parie que cette nouvelle fragrance va rencontrer un grand succès mais elle n’imagine pas que, dès années plus tard, N°5, parfum mythique entre tous, est le plus vendu de toute l’histoire de la parfumerie.
Dès 1937, Coco Chanel devenait la première ambassadrice du N°5 dans une campagne publicitaire pour le magazine américain Harper’s Bazaar.
Depuis, les plus belles femmes se sont succédées devant les plus grands photographes (Jean-Paul Goude, Dominique Isserman, Richard Avedon…) et réalisateurs (Bas Luhrmann, Luc Besson, Ridley Scott…) pour représenter la mythique fragrance : Marilyn Monroe, Lauren Hutton, Ali MacGraw, Catherine Deneuve, Carole Bouquet, Estella Warren, Nicole Kidman, Audrey Tautou et dernièrement Gisele Bundchen, sans oublier le seul homme de la saga, Brad Pitt, participent à la légende du N°5.
La Maison Chanel entretient avec succès l’héritage de Coco et associe son parfum aux stars internationales au service de l’image de l’iconique et intemporel N°5, en concevant ses spots publicitaires comme de véritables courts-métrages, mis en scène par des réalisateurs réputés.
1937 : Gabrielle Chanel, photographiée par François Kollar au Ritz
En 1937, Gabrielle choisit d’incarner elle-même son parfum devant l’objectif de François Kollar, près de la cheminée de sa suite du Ritz, pour sa première campagne américaine dans le magazine Harper’s Bazaar.
1952 : Marilyn Monroe, la pionnière
La collaboration entre Chanel et Marilyn Monroe relève de la légende.Le 7 août 1952, Marilyn répond à un journaliste de Life Magazine, qui demande à la star hollywoodienne ce qu’elle porte pour dormir. Elle répond « quelques gouttes de N°5 ». Ces propos, superbe slogan publicitaire, valent de l’or pour la maison Chanel et son N°5 qui accède ainsi au statut d’objet culte.
Quelques mois plus tard, le photographe Ed Feingersh passe une semaine à immortaliser la star dans son quotidien. Parmi les clichés, celui de Marilyn avec le célèbre flacon qui fait entrer définitivement N°5 dans la légende.
Entre 1969 et 1979 : Catherine Deneuve, LA Parisienne
Pendant dix ans, Catherine Deneuve, une des actrices françaises les plus connues de la planète grâce à ses rôles pour Jacques Demy, Roman Polanski, Luis Buñuel ou François Truffaut, incarne l’élégance parisienne, murmure et tisse avec les téléspectateurs américains une relation sur le mode de la confidence. Plusieurs spots sont réalisés par le photographe Helmut Newton.
Whispered par Helmut Newton (1973) © Chanel
Spot réalisé par Helmut Newton (1975) © Chanel
Mystery par Helmut Newton (1977) © Chanel
Spot réalisé par Helmut Newton (1979) © Chanel
1979, La Piscine
La piscine par Ridley Scott (1979) © Chanel
1982, Le Jardin
Le Jardin par Ridley Scott (1982) © Chanel
Entre 1986 et 1996 : Carole Bouquet, la femme fatale
En tournant pas moins de cinq spots publicitaires en dix ans, Carole Bouquet incarne le N°5 et la femme fatale en Chanel, toujours impeccable, vagabonde et indomptable.
Le réalisateur Ridley Scott (« Alien ») la filme, en 1986, cheveux au vent dans la Monument Valley, embrassant un inconnu sur les notes de « My baby just cares for me » de Nina Simone et, en 1990, près de la piscine de l’hôtel du Cap-Eden-Roch par une grande journée ensoleillée, en maillot de bain et en escarpins noirs.
Avec Bettina Rheims, en 1993, Carole Bouquet, implacable et envoûtante, tyrannise son amoureux dans un clair-obscur orageux en lui assénant : « Tu me détestes? Dis-le que tu me détestes ! ».
Monuments par Ridley Scott (1986) © Chanel
La Star par Ridley Scott (1990) © Chanel
Sentiment troublant par Bettina Rheims (1993) © Chanel
L’orchestre par Gérard Corbiau (1996) © Chanel
En 1995, Marilyn ressuscitée
Plus de trente ans après sa disparition, la Maison Chanel fait revivre Marilyn à travers un spot réalisé par Jean-Paul Goude qui fait appel au mythe de la star américaine. Dans une salle de cinéma, Carole Bouquet se transforme en Marilyn Monroe, passe ainsi de brune en blonde, sur l’air de « I want to be loved by you ». Une prouesse technique avec des heures de poses calculées au millimètre près, afin d’être parfaitement raccord. Poupoupidou !
Marilyn par Jean-Paul Goude (1995) © Chanel
En 1998 et 2001, Estella Warren, le chaperon rouge
En 1998, Chanel souhaite révolutionner l’image classique du célèbre parfum et engage, pour cela, Luc Besson qui met en scène, dans une version revisitée du petit chaperon rouge, une femme, Estella Warren, un loup, Paris et le N°5.
Dans un univers féerique, marqué par la bande sonore du film « Edward aux mains d’argent » de Tim Burton (composée par Danny Elfman), une jeune femme blonde habillée d’une robe rouge pénètre au beau milieu de la nuit dans un immeuble aux reflets d’acier, après en avoir poussé la porte blindée. Elle traverse un couloir dallé d’or au bout duquel il y a un mur de flacons de N°5. La belle se parfume et quitte les lieux mais, à la sortie, un loup s’approche, menaçant. Sûre d’elle, un doigt sur les lèvres, la jeune femme le domine. Victorieuse, elle accède à la Ville lumière, Paris, tandis que le loup, esseulé, hurle à la nuit.
Paré de Chanel N°5, le Petit chaperon rouge n’a peur de rien !
Le spot publicitaire rencontre un tel succès qu’en 2001, Luc Besson réalise une suite qui se déroule, cette fois, dans un musée.
Le loup par Luc Besson (1998) © Chanel
Le musée par Luc Besson (2001) © Chanel
En 2004, Nicole Kidman au cabaret
Trois ans après le succès de « Moulin Rouge » dans lequel elle tient le rôle principal, Nicole Kidman, au sommet de sa gloire, retrouve le réalisateur Baz Luhrmann pour un véritable court-métrage de deux minutes.
L’histoire, romantique à souhait, est celle d’une actrice oppressée, en mal d’aventure et de liberté, qui tente de fuir son monde de strass et de paillettes dans les rues de New York pour rencontrer, par hasard, un beau et ténébreux poète alias Rodgrio Santoro.
Tourné à Sydney, le spot Chanel N°5 est une superproduction : plus de 250 figurants, un budget de 10 millions de dollars et un cachet de 3,6 millions de dollars pour la star Nicole Kidman.
Le film explose de couleurs, le décor somptueux, les costumes sont sublimes et le collier « N°5 » que porte Nicole Kidman est en or blanc, paré de 320 diamants. The Sydney Symphony Orchestra interprète le « Clair de lune » de la « Suite Bergamasque » de Claude Debussy.
Cette aventure est un véritable succès, un investissement profitable pour Chanel : le spot aurait fait décoller les ventes de 12 % à 20 % !
Le film par Baz Luhrmann (2004) © Chanel
En 2009, Audrey Tautou dans l’Orient-Express
Jean-Pierre Jeunet reprend le flambeau du N°5 pour réaliser, là encore, un court-métrage avec son égérie d’« Amélie Poulain », Audrey Tautou qu’il fait évoluer à bord du célèbre Orient-Express.
L’histoire se déroule dans les couloirs et les cabines du train où une jeune femme attise la curiosité d’un bel inconnu. Ils se cherchent, se regardent, bercés par la musique de « I’m a fool to love you » de Billie Holiday et elle le suit jusque dans le port d’Istanbul…
Train de nuit par Jean-Pierre Jeunet (2009) © Chanel
En 2012, Brad Pitt, l’égérie masculine
Surprise, rupture, en noir et blanc, dans un décor dépouillé, cette publicité prend le contre-pied de toutes les précédentes. Pour la première fois, un homme, Brad Pitt, s’empare de la célèbre fragrance féminine et déclame un poème d’une voix éteinte à une femme invisible, seul, cheveux mi-longs, bouc soigné, allure décontractée, mains dans les poches, appuyé contre un mur.
Réalisé par Joe Wright (« Orgueil et Préjugés »), le film publicitaire est sobre, épuré : pas de mise en scène romanesque, pas de musique en entêtante : les images se veulent sans aucun artifice.
Wherever I Go par Joe Wright (2012) © Chanel
En 2013, le mythe Marilyn ressuscité…
Chanel redonne vie à Marilyn Monroe grâce à l’enregistrement vocal inédit de cette dernière sur lequel la star indique ne porter que Chanel n°5 pour dormir.
L’interview de Life Magazine en 1952 est aussi mythique que l’interviewée :« Marilyn, what do you wear to bed ? So I said I only wear Chanel N°5 » prit vie huit ans plus tard, en avril 1960, lors de l’enregistrement d’une interview consacrée à la promotion du film « Let’s make love » (« Le Millionnaire ») de George Cukor. A cette occasion, l’actrice se confie au journaliste George Belmont du magazine Marie-Claire, à nouveau, sur sa vie privée : « Vous savez, on me pose de ces questions ! On me demande : Qu’est-ce que vous mettez pour dormir ? Un haut de pyjama ? Le bas ? Une chemise de nuit ?, je réponds : Chanel N°5, parce que c’est la vérité… Vous comprenez, je ne vais pas dire nue ! Mais c’est la vérité ! »
Avec une superposition d’images d’archives de l’actrice, sa propre voix, glamour à souhait, pour seule bande-son et ce petit détail sur l’intimité de la star qui a fait fantasmer des milliers d’hommes à travers le monde, Chanel se réapproprie aujourd’hui l’histoire pour nous montrer que le N°5 a sans doute trouvé son égérie idéale et éternelle…
Marylin & N°5 (2013) © Chanel
En 2014, Gisele Bündchen, la femme idéale
Le réalisateur australien Baz Lhurmann est à nouveaux aux commandes du dernier court-métrage dédié au N°5, avec, en vedette, Gisele Bündchen qui s’offre un rôle relativement proche de sa propre vie où se mêlent modernité, fraîcheur et une pointe de romantisme.
Tantôt surfeuse, tantôt maman,amante ou mannequin, le top brésilien incarne une femme qui voit l’homme de ses rêves claquer la porte du domicile familial alors qu’elle surfait de façon mystérieuse sur une planche de surf signée… Chanel.
Sur la musique revisitée de « The one that I want » par Lo-Fang, Gisele Bündchen court après l’amour jusqu’à finalement tomber dans ses bras… dans une salle d’opéra !
The one that I want de Baz Lhurmann (2014) © Chanel