Loi Alur et encadrement des loyers parisiens: une loi grossiére et crétine

Publié le 15 juin 2015 par Lionelo @investirblog
C'est arrivé ce vendredi, de manière discrète, le texte d'application de loi ALUR relatif à l'encadrement des loyers dans Paris intra-muros a été publié au journal officiel. Un zonage a été proposé par l'OLAP (voir image ci-dessus) et les loyers médians applicables sont aussi disponibles.
Nous allons montrer que cette loi est formidablement inadaptée à ses objectifs. Notre raisonnement tient en quelques lignes. J'en donne ici le résumé que je vais développer par la suite:
Suite à cette loi, les loyers vont être abaissés artificiellement de 20% dans paris intra-muros. Voyant leur rendement s'établir dans le négatif, les bailleurs vont déserter le marché de la location dans Paris. Aucun nouveau bail ne sera signé et le stock de biens locatifs va être vendu en masse, entrainant une baisse des prix de ventes. Cette baisse se propagera par contagion à la petite et à la grande couronne.Voyant les prix baisser, les primo-accédants vont se retrouver seul sur le marché et vont enfin pouvoir envisager un achat, ce qui va réduire la part des logements voués à la location. En conséquence, le nombre de biens à la location dans Paris va se réduire, les postulants seront plus nombreux, et seuls les meilleurs dossiers trouveront une location, laissant les locataires pauvres qui étaient censés être les bénéficiaires de cette loi dans la mouise. CQFD.
En quoi ce dispositif aura-t-il contribué à réduire les inégalités sociales ? Pourquoi choisir Paris alors que les vraies inégalités sociales sont dans la grande couronne ? Faut-il pour résoudre le problème du logement en France mettre en concurrence sur la même zone limitée les foyers les plus riches et les plus pauvres ?

Une déclaration de guerre à l'investissement locatif


Si cette publication arrive un peu par surprise, c'est parce que cette loi ALUR a du être remaniée depuis 2012, avant de finalement nous parvenir dans sa forme actuelle. L'objectif de cette loi est de favoriser le logement des étudiants et des jeunes travailleurs précaires pour qui l’accès au logement en région parisienne est devenu de plus en plus difficile.
Si on considère cet unique objectif, il ne fait nulle doute qu'il sera atteint, car la loi et son application sont suffisamment  clairs pour entrainer une baisse radicale des loyers pratiqués sur Paris.
Voyez plutôt, considérons un 19 m2 prés de la porte d’Orléans loué 750 euros hors charge. Il est actuellement loué à 750 euros. Ce logement est situé en Zone 5, et pour un studio datant des années 50, le loyer au m2 de référence est de 23.3 euros/m2. Sachant que ce logement ne peut pas être loué plus de 20% du taux de référence, il pourra être loué à 1.2*23.3*19= 531 euros.
On voit donc bien que les loyers ne sont pas seulement inférieurs, l'impact est important et peut résulter d'une baisse d'un tiers par rapport à certaines offres du marché actuel.
Sachant qu'un tel logement se vend actuellement plus de 180 000 euros, le rendement brut attendu d'un tel rendement est de 531*12/180 000 = 3.54 %. Si on considère que 1/3 des revenus du logement sont absorbés par les charges et les impôts la rentabilité nette doit s'aventurer dans le négatif. Ce que j'ai vérifié avec le simulateur de l'ANIL en faisant des hypothèses réalistes:
Au total, On verra des baisses de loyer de 50 euros pour un tiers des bails, plus de  50 euros pour un autre tiers, et supérieure à 100 euros pour le reste.
Il s'agit d'un coup de massue sur tous les petits épargnants ayant fait l'option de miser sur l'immobilier locatif dans paris. Rappelons que l'immobilier locatif est l'outil d'épargne favorisé par les classes moyennes. Les grandes fortunes du CAC 40 sont riches en actions, en assurance-vies, en art, en forêts... L'immobilier locatif est vu comme un moyen de s'assurer une retraite par des gens qui sont plutôt modestes, on ne parle pas de placement spéculatif.

Et en plus, elle est mal foutue...


Tout ceux qui connaissent l'immobilier parisien savent que traverser une rue peut changer du tout au tout la valeur d'un bien. Prenons par exemple le 13eme arrondissement de Paris. Dans la carte donnée par l'OLAP, il s'agit de la zone 50. Hors, regrouper tout le 13 eme arrondissement de Paris dans la même zone, c'est considéré que les logements mal construits des années 80 aux marges du quartier chinois ont les mêmes conditions de locations que les bâtiments flambant neufs de grand standing qui se trouvent aux alentours de la BNF.
Quand cette loi entrera en application, les loyers dans les logements de la BNF devrait baisser substantiellement, rendant accessible ces logements à un plus grand nombre. Cela va ouvrir la porte à  des familles à revenus modérés, qui seront alors en concurrence avec des cadres supérieurs pour signer le bail. Quels dossier les propriétaires ont tout intérêt à choisir selon vous ?
De toute facon, cette loi s'applique à tous sans discrimination de ressources, elle s'applique autant au cadre supérieur, qu'au technicien de surfaces. Nous avons tout un tas de millionnaires qui pourront faire valoir des réductions de loyer... Elle s'applique aux logements de standing du 16 eme arrondissement et aux logements insalubres du 19e. D’après vous, c'est le même problème ?

C'est déjà la fuite


Au fur et à mesure que la nouvelle de cette loi se répand, on voit de plus en plus de logements de petite taille (en dessous de 25 m2) en vente sur les sites d'immobilier. Par exemple, alors qu'il n'y avait pas plus d'une dizaine de biens de moins de 20 m2 en vente dans le 13eme arrondissement il y a 3 mois sur le site seloger.com, il y en actuellement 74, et leur nombre croit rapidement.... (81 ce matin..)
Mais dans ces conditions qui voudrait acheter ces logements, surtout au prix actuels ? Il faut voir qu'un logement de 20 m2 est un logement temporaire pour un étudiant ou un jeune travailleur. C'est une étape avant de passer à mieux. Si ce n'est pour l'investissement locatif, personne ne voudrait acheter ce type de biens. On va donc observer une baisse dramatique du prix de ces actifs dans les mois à venir.
Il faut aussi compter sur un effet d'incertitude. En effet, L'OLAP a aussi cartographiée toute la région parisienne, et Lille et Orléans sont aussi en passe d'appliquer ces lois. les investisseurs qui seraient tenté de nouer des bails hors de Paris seraient aussi incertains concernant son application en petite et grande couronne, voir en province, et on peut aussi envisager un gel des investissements locatifs partiels en petite couronne.
Dans ces conditions, les prix de l'immobilier seraient affectés dans des zones croissantes par effets de vases communicants.

Combien de temps cette loi va-t-elle tenir ?!


Il ne faut pas douter que vu la catastrophe que serait l'application de cette loi pour tous les bailleurs de Paris, des conséquences importantes sont à attendre.
D'abord une fuite des bailleurs institutionnels et étranger, le rendement en chute de ces biens entrainant des ventes massives.
Ensuite pour les investisseurs particuliers, face à la demande pressante pour les logements de la région parisienne, nulle doute que la tentation de tricher sera très forte. Il ne manquera pas de gens capables de payer au delà du plafond fixé par la loi, soit en faisant des clauses d'exception de complaisance, soit en faisant passer une partie du loyer au black.
L'autre bénéficiaire de cette loi sera bien sur la location saisonnière qui elle n'est pas réglementée. Nulle doute que Air-b-n-b va bénéficier de telles loi d'encadrement, créant en essence un marché noir.
On peut compter sur le gouvernement pour noter que cette loi ne s'applique pas correctement, et pour en tirer plusieurs moutures de plus en plus ineptes. Mais un gouvernement d'alternance, lui ne gardera certainement pas cette loi.
Je donne donc 2-3 ans à vivre à cette loi, mais en attendant, ce sera la bordel.
Voyez le bon coté des choses, si la loi est abandonnée, des opportunités sont à saisir....