Philippe Mac Leod, le poète qui habite la terre (1)

Publié le 15 juin 2015 par Eric Acouphene
À l'occasion de la sortie de son recueil Poèmes pour habiter la terre, le chroniqueur des Essentiels se livre à propos de sa vie intérieure. Dans les Pyrénées, près de Lourdes, Philippe Mac Leod vit en communion avec la nature.
Adossé aux montagnes pyrénéennes, je vis dans une solitude ouverte au monde. Sitôt installé dans ce creuset naturel, j'ai su que je me trouvais là dans le bon sillon. C'était il y a 20 ans. En me lançant dans une voie contemplative, laïque, en solitaire, dans le silence, sans étiquette ni modèle, j'avais enfin accepté ma singularité. Cette libération intérieure a été accompagnée d'une unification entre mon être profond et ma poésie, dès lors expression de ma foi et vie de foi. 

Je suis entré dans l'Église de l'intérieur : par l'Eucharistie. Jeune trentenaire, je traversais alors une période particulièrement aride. Vaquant de petits boulots en petits boulots, je vivotais, produisant une « écriture du quotidien ». Malgré un nihilisme complet, je me sentais comme happé par les églises et le mystère qui s'en dégageait. Alors, je m'y asseyais, souvent hors des offices, et restais là, sans prier. Dans le silence, j'observais, au fond, cette petite veilleuse placée dans le tabernacle. Elle ne m'évoquait pas grand-chose, mais je considérais cette lumière comme un signe, une sorte de phare dans la nuit. Éduqué dans la religion protestante, j'étais à mille lieues de comprendre que je me trouvais face à l'Eucharistie, présence réelle. Je sortais d'une adolescence marquée par des blessures familiales, entraînée par l'ère de Mai 68, influencée par des lectures pessimistes et déstructurantes. La famille, la société, les études de philo... la révolte fit tout voler en éclats, notamment une foi en Dieu, trop juvénile, fragile pour résister au raz-de-marée. 


Je dois au protestantisme, hérité de ma mère et de ma grand-mère, un ancrage dans la parole de Dieu. À 14 ans, j'ai passé une année à étudier le livre de Job. L'Ancien Testament, immense océan dans lequel je me laissais porter, me fascinait. Splendeur des images. Puissance de la Parole. Je n'avais ni BD ni télévision, les mots ont donc très tôt été mon horizon, mon univers. Je percevais qu'au-delà de leur qualité littéraire, les Écritures portaient en elles des paroles gorgées de sens, venant d'un Ailleurs. Cette mystérieuse sensation, je l'ai retrouvée lorsque, desséché par ma traversée du désert, je me suis replongé dans la Bible, cette fois dans le Nouveau Testament. En parallèle, la petite veilleuse du tabernacle, foyer eucharistique, me conduisait peu à peu vers la Lumière, avant de se révéler un jour totalement...