On pensait en avoir fini avec les dinosaures depuis quelques millions d’années et puis a débarqué un mec qui aurait pu être le frère caché de Steve Jobs, geek sur les bords, grand enfant dans l’âme, passionné de cinéma et qui nous a pondu un film mémorable (pas le seul à son palmarès) : Jurassic Park. C’était en 1993 et ce type n’est autre que Steven Spielberg. Il allait en effrayer plus d’un avec son T-Rex animatronic et ce parc merveilleux où des hommes, grands rêveurs et scientifiques chevronnés ont su recréer un monde préhistorique plein d’animaux gigantesques. Avec son film jurassique, Spielberg allait marquer une génération de petits et grands enfants. Un deuxième, puis un troisième (de Joe Johnston) ce sont succédés, mais ils n’ont jamais atteint les griffes attisées du premier tyrannosaure.
L’air de rien, 22 ans plus tard, à l’heure où Hollywood pioche dans les vieux pots de confitures pour en faire des nouvelles avec un meilleur goût, c’est naturellement que les dinos sont sortis des cartons, ont été dépoussiérés pour faire, devinez quoi ?! Jurassic World ! Devez-vous rugir de plaisir à la sortie de ce nouvel opus ? Vieille confiture ou marmelade fraîchement préparée ?
On ne savait pas trop comment allait être positionné ce nouveau film, suite ? Reboot ? En fait, c’est un mélange des deux plutôt correct jouant sur la nostalgie : reconstruction du parc 20 ans après, auquel il a été apporté des améliorations (il ne faudrait pas qu’il y ait encore des problèmes de sécurité, hein…), dont le concept a évolué avec la société : toujours plus loin, plus gros, plus féroce et plus de dents. Il faut que ça en jette, il faut que l’intérêt du public soit sans cesse renouvelé, il faut du spectaculaire, de la peur au ventre. Et tout ça, les enfants, ce n’est pas avec un pauvre T-Rex qu’on y arrive. C’est donc là que World surfe sur la vague actuelle du sensationnel, en repoussant les limites de la génétique, créant, à l’aide de combinaisons d’ADN, des dinosaures aux noms improbables. Ne vous inquiétez pas, les velociraptors, diplodocus, et les autres, qui ont bel et bien existé, sont présents. Jouer sur la nostalgie était une excellente idée, réveillant l’âme d’enfant des fans de la première heure, titillant nos bons souvenirs en réutilisant le thème original à maintes reprises, tout en sortant des références à la louche. Un parti pris réussi, qui fait sourire plus d’une fois. Comme si Spielberg et son Jurassic Park n’étaient pas loin, planant au-dessus du film, tel un fil rassurant : « c’est nouveau, mais nous ne vous prenons pas complètement pour des idiots, nous savons ce que vous venez chercher et comment vous avez été bercés ».
C’est bien gentil, mais ça ne suffit pas de ressortir la recette de la grand-mère (enfin du grand-père en l’occurrence). Aurait-il fallu ajouter un meilleur ingrédient secret ou mieux travailler la préparation. Le casting est moins puissant, les émotions se sont perdues en route et la technologie a fait disparaître cette authenticité. Là où Spielberg jouait au marionnettiste avec de l’animatronic, Trevorrow a naturellement utilisé du numérique, la sensation de réel disparaît et tout ce qui lui était associé également : le spectaculaire, la peur, l’inattendu. Essayez de regarder le premier film, vous verrez, il n’a pas pris une ride et il fait toujours flipper ! Je n’ai eu que de brefs sursauts, mais pas de quoi me ronger les ongles. J’aurais aimé avoir de l’empathie et la boule au ventre pour ces deux gosses, être fasciné devant ce nouveau monde et ces bêtes, parce que même si le choix s’est orienté sur la nouveauté, pour ne passer que très brièvement sur l’ancien, je n’aurais pas été contre des séquences longues et posées qui nous auraient laissé le temps de nous émerveiller une seconde fois. D’avoir plus d’interaction entre l’homme et les animaux. Et puis, même si l’idée de la transformation génétique est particulièrement intéressante accompagnée de son message sur une société toujours plus consommatrice de sensations fortes, avoir des dinos modifiés, ça m’a gênée. Le premier est tellement marquant et il y a un assez gros panel de bestioles pour s’amuser avec je pense, pourquoi aller en créer d’autres ? Je chipote certes, j’ai trouvé ça dommage, toutefois cohérent avec le propos et d’actualité.
Je terminerai par la partie française du film : Omar Sy. Notre doudou national qui tâte du dino, il y a de quoi être fie09r, en revanche, question talent et utilité du personnage, on repassera. Omar n’est toujours pas à l’aise avec son anglais et cela se ressent dans son jeu, au point de jouer faux. Et soyons honnêtes, son rôle n’apporte rien du tout.
Ce n’est clairement pas dans les vieilles cassettes VHS qu’on fait les meilleurs films, preuve en est, Jurassic World n’a pas égalé le maître, toutefois, il n’en reste pas moins un bon divertissement, dans l’air du temps, s’imposant sur la nostalgie, mais perdant en authenticité et en émotions.
Sortie en salles le 10 juin.