Scarlett O’Hara a seize ans, et n’aime rien plus que profiter de sa jeunesse. De bals en pique-nique, elle fait virevolter les rubans de sa robe de soie verte et se complaît entourée de sa cour d’admirateurs passionnés. Rien de plus normal pour la fille d’un riche propriétaire du Sud, et qu’on ne vienne pas l’ennuyer avec la guerre de sécession qui gronde! Mais lorsqu’elle apprend qu’Ashley Wilkes, qu’elle aime depuis des années, va épouser Melanie Hamilton, le choc est rude. Peu importe: elle est persuadée qu’Ashley l’aime. Par dépit autant que par vengeance, elle épouse Charles Hamilton, le frère de Melanie, qui la laisse veuve deux mois plus tard. Coincée dans la maison de sa belle-soeur, elle se morfond à porter le deuil d’un mari qu’elle n’aimait pas et à attendre le retour d’Ashley, parti au front, pour le reconquérir. C’est là qu’elle retrouve le capitaine Rhett Buttler, précédé par sa réputation de beau parleur et ses manières inconvenantes, mais qui voit clair dans le cœur et les intentions de Scarlett.
J’adore Scarlett O’Hara. Elle est superficielle, séductrice, têtue, capricieuse et pourtant extrêmement touchante. Au milieu de ces femmes qui doivent toujours être yeux baissés, douce, fragile, en quête des bras puissants d’un homme pour les soutenir, ne jamais rien manger… Scarlett est impulsive, veut s’amuser, épouser qui elle aime sans se soucier des convenances. Evidemment, c’est cette modernité de caractère qui fait tout le sel du personnage. Le couple qu’elle forme avec Rhett Buttler est très vite explosif et je ne m’en lasse pas. Je n’ai lu que le premier tome de ce roman-fleuve mais déjà, je m’attache beaucoup à ce personnage de femme rebelle, battante tout en restant ultra-féminine.
Le contexte de la guerre de sécession, qui a rendu cette histoire si connu, est lui aussi poignant. Honnêtement, j’ai lu en diagonale les chapitres qui décrivent l’avancée des armées. Mais comme nous nous trouvons du côté des vaincus, on nous décrit avant tout leur souffrance, leur peur, leur déchéance petit à petit, leur passage de hauts bourgeois dans l’opulence et l’insouciance à fugitifs, réfugiés, malades, sans même de quoi manger ni se nourrir. D’incendies qui ravagent des villes aux pillages par les soldats, rien n’est épargné. Au fur et à mesure, Scarlett devient véritablement la maitresse de ses terres, aussi fière et résistante qu’elle.
Jolie fresque historique, ce roman est aussi, par l’intermédiaire de Scarlett, une satire sociale qui a des accents féministes avant l’heure. Scarlett n’a rien des jolies poupées bien élevées qui l’entoure. Elle jette sur son époque et sur les relations homme-femme un regard à la fois désabusé et pourtant tendre, et se fait le reflet d’un moment charnière de l’histoire des Etats-Unis. En face d’elle, Melanie, la parfaite épouse pondérée et cultivée, pourrait faire figure de faire valoir, et pourtant il n’en est rien tant elle se révèle une amie forte et sincère. De la même manière, Rhett qui semble toujours si révoltant avec son accent antipatriotique cache pourtant bien son jeu et ses véritables intentions. Loin d’être une banale histoire d’amour triangulaire et contrariée, on joue là un drame sentimental qui touche juste.
La note de Mélu: un coup de coeur!
Un mot sur l’auteur: Margaret Mitchell (1900-1949) est une auteure américaine, lauréate du prix Pulitzer.