Chaque année, la Quinzaine des Réalisateurs réserve son lot de surprises. La projection en séance spéciale de Yakuza Apocalypse : The Great War of the Underworld, le nouveau long-métrage du très prolifique Takashi Miike , a sans aucun doute été celle du cru 2015. Le célèbre cinéaste japonais étant en tournage au moment du festival (un véritable stakhanoviste !), il n'a pu faire le déplacement à Cannes mais a tout de même tenu à enregistrer une petite vidéo de présentation, diffusée quelques minutes avant l'ouverture. Un mini clip improbable et drôle (bien qu'un poil sexiste), où le metteur en scène, affublé d'un costume de Geisha (incluant des prothèses mammaires totalement surréalistes), explique face caméra les raisons de son absence (sa transformation en femme au pied du mont Fuji) et son désir d'avoir souhaité réaliser le " truc le plus violent de sa carrière " pour passer à " des films d'amour et d'amitié ". Quelques secondes plus tard, c'est Yayan Ruhian, le " Mad Dog " des 2 volets The Raid crédité ici au générique, qui monte sur scène aux côtés d' Edouard Waintrop (le délégué général de la Quinzaine) pour en mettre plein la vue avec une démonstration impressionnante d'arts martiaux. Enfin, après la projo, les spectateurs cannois ont eu la chance et l'honneur d'accueillir dans la salle la fameuse " grenouille karatéka " du film, qui a débarqué dans le théâtre croisette avec son accoutrement ridicule pour recevoir une standing-ovation. Pourquoi rapporter ces faits ? Car c'est très certainement cette ambiance fun et décontractée qui explique, en partie, notre relative clémence vis-à-vis du film, une histoire fantastique hautement bordélique de yakuzas vampires combattant une organisation de super méchants, dont un homme-grenouille, sur fond de love story chiante comme la pluie et de fin du monde. On le sait, les films de Takashi Miike sont souvent barrés et parcourus d'idées saugrenues. Celui là n'échappe évidemment pas à la règle, avec un quota respectable de concepts complètement farfelus : le liquide qui s'échappe des oreilles des vampires yakuzas, le mot " sucked " tatoué sur le front des victimes, le tatouage dorsal qui prend vie, les plantations de citoyens, le vilain-tortue au bec d'oiseau (façon Bowser de Mario ), le yakuza Van Helsing, les ateliers de tricot, le plus grand terroriste que le monde ait connu, un yakuza-grenouille au déguisement ridicule (façon kermesse du dimanche)qui arrive sur les lieux en bicyclette ....
Miike prend à peine le temps de développer les enjeux, l'écriture est indigente, les effets spéciaux super cheap, la narration, essentiellement fondée sur l'enchaînement de micro saynètes, manque cruellement de cohérence d'ensemble, même si on devine aisément qu'il souhaite critiquer la mafia yakuza et l'aveuglement de la société sur ce point. Résultat : on ne comprend pas grand-chose ... pas même qui sont réellement les good et bad guys, et surtout, pourquoi ils se battent ! Mais on apprécie tout de même la générosité Miike et le fait qu'il ne se prenne jamais au sérieux. Que ce soit à travers les bastons, parfois inventives et toujours filmées avec panache (mention à Yayan Ruhian), la liberté de ton et le mélange des genres, l'humour absurde, l'ultra violence jouissive (geyser d'hémoglobine & cadavres à la pelle), ou la caricature du milieu Yakuza plutôt bien sentie, le cinéaste veut amuser la galerie et c'est en soi déjà pas mal, même si, pour cela, il en fait des caisses. Yakuza Apocalypse est décousu, c'est indéniable, mais force est de constater qu'on prend son pied. Miike n'hésite pas à envoyer la sauce pour satisfaire le public, quitte à frôler le spectacle hystérique de mauvais goût et le portnawak mal orchestré.
Titre Original: GOKUDO DAISENSO
Réalisé par: Takashi Miike
Genre: Action, Epouvante-Horreur
Sortie le: Prochainement
Distribué par: -
BIEN