Dans la tête de Desplechin
Paul Dédalus, l’alibi psychanalytique de Desplechin, va nous raconter trois souvenirs de sa jeunesse : une relation compliquée avec une mère malade ; un voyage en URSS occasionnant la naissance de son double ; et essentiellement sa passion amoureuse partagée pour Esther. Vu la richesse des thèmes abordés par le film ; difficile d’en conter plus si ce n’est que ces trois souvenirs s’imbriquent parfaitement pour ne former qu’un tout et non un film à sketchs. Enfin, un « Desplechin » qui trouve grâce à mes yeux. Vaporeux, cotonneux comme des souvenirs refaisant surface après 20 ans ; ce film se révèle proustien comme un goût de madeleine. Et c’est la grande réussite du film ; un travail sur les méandres de la mémoire. Plutôt que de narrer la fin d’adolescence, il nous la fait vivre de l’intérieur à travers des sensations toujours très palpables. Et puis Paul Dédalus a le même âge que moi ; et çà me renvoie avec mélancolie à la jeunesse de la fin des 80’s. Desplechin conserve toutefois son côté intello bourgeois qui peut exaspérer. Truffé de références littéraires ; hyper écrit ; le verbe tient une place importante proche de la littérature récitée. Et sur ce film, le texte est délectable car porté par un duo savoureux. Les deux jeunes comédiens en question, Quentin Dolmaire et Lou Roy-Lecollinet, donnent beaucoup d’épaisseur à ce texte souvent dicté et décalé… incarnant à merveille des souvenirs approximatifs.Dans une critique j’ai lu à propos de ce film : « une œuvre certes éminemment intello, mais dont quasiment chaque dialogue fait mouche, de par sa musicalité évidente. Une matière première de haut vol, dont les comédiens s’emparent pour la raffiner et la gorger de vie. »Plus qu’un film, une vraie expérience difficile à argumenter.
Sorti en 2015