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Mon itw dans L'Incisif sur la fin de vie par Benjamin Bousquet

Publié le 03 juin 2015 par Jeanlucromero

Acteur de la scène politique depuis plus de 15 ans, Jean-Luc Romero était très présent sur les plateaux télévisés lors du débat sur le mariage pour tous. Cette fois, dans un entretien pour L'Incisif, il partage son opinion en faveur de l'euthanasie. D'un sujet de société qui divise à  un autre, le maire-adjoint chargé de la culture et du tourisme du 12ème arrondissement, montre qu'il est avant tout un homme de combat.
A lire sur le site de l'Incisif (ici).

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Par sa proposition 21, François Hollande a promis de légaliser «une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité». Ce qui reviendrait, même si le mot n’a jamais été prononcé, à autoriser l’euthanasie «sous certaines conditions». Un débat de société qui une fois de plus est susceptible de fortement diviser?

Cette question est la seule question sur laquelle il y a un consensus dans ce pays. Hors classes politiques, cette question interpelle le peuple. Que ce soit Libération, Le Figaro ou La Croix qui publie un tel sondage, l’écart entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre est toujours assez conséquent. Aujourd’hui, les Français veulent légaliser l’euthanasie. Moi qui connaît bien le débat sur le mariage pour tous, pour y avoir grandement participer, le contexte n’est ici pas du tout le même. La question religieuse peut avoir un poids, mais contrairement au mariage gay, la question ne se scinde pas en deux camps: gauche ou droite. Je suis président de l’association pour le droit de mourir dans la dignité, qui compte aujourd’hui 63 000 adhérents, et tous ne votent pas à gauche, loin de là. C’est l’une des questions-consensus, les plus compliquées pour la sphère politique aujourd’hui. Le problème, c’est qu’un certain nombre de responsables politiques, traumatisés par le débat sur le mariage pour tous, ont bien du mal à se plonger dans cette nouvelle problématique. C’est dommage car cela interpelle beaucoup de gens, on le voit aujourd’hui.

La loi Leonetti ne «règle» pas tous les cas, aussi parce que chaque situation est unique et nécessite du «sur mesure»…

Même si je pouvais dire le contraire à une époque, pour moi, la loi Leonetti est devenue une régression, parce qu’elle ne place pas celui qui meurt au centre de la décision. Ce sont les personnes autour du lit, comme l’entourage ou les médecins qui décident de tout, et j’aimerai qu’on sorte de ça. Il y a tant de débat aujourd’hui autour de cette loi, cela prouve bien son manque d’efficacité, voire même ses dérives cruelles: je rappelle qu’il y a notamment la clause du «laisser-mourir» où l’on arrête d’alimenter les gens. Ce sont des pratiques ancestrales. La volonté de la personne concernée, du patient, doit être désormais au centre d’une nouvelle législation. Dans mon dernier livre «Ma mort m’appartient – 100% des Français vont mourir, les politiques le savent-ils?» qui vient de paraître chez Michalon, je démontre en cinq exemples l’échec de 10 ans de politique sur la fin de vie: échec du développement des soins palliatifs, échec de la lutte contre l’obstination déraisonnable, échec du développement des directives anticipées, graves dérives avec 3400 personnes qui reçoivent un produit létal sans avoir rien demandé,…

En France, se pratiquent d’ores et déjà des euthanasies. Pour vous, est-il enfin temps de sortir de cette hypocrisie ?

Selon l’Ined, en France, il y aurait 0,8% d’euthanasie pratiquées, dans un pays qui est censé l’interdire. Donc oui, il faut sortir de cette hypocrisie.

L’hypocrisie actuelle ne permet-elle pas la tolérance de la transgression? Ou si l’on devait résumer, n’est-il finalement pas préférable que l’euthanasie soit pratiquée mais reste illégale?

Oui mais qui décide cette transgression? Ce sont les médecins. J’ai un respect immense pour cette profession, mais cette décision ne doit pas appartenir à ces derniers. Les dérives que j’évoquais précédemment existent par manque de cadre légal. Le problème c’est qu’aujourd’hui on fantasme sur les pays qui pratiquent légalement l’euthanasie. On dit de ces pays qu’ils tuent à tout va, qu’il y a des dérives et des abus dans tous les sens. Tout ceci est faux, des études le prouvent. Il y a peu, on entendait que toutes les personnes âgées hollandaises et belges fuyaient leur pays de peur qu’on les euthanasies. Il a fallu l’intervention des pays en question pour dire d’arrêter d’inventer de telles choses. Une loi pour l’euthanasie, ça évite les dérives, et ça protège pour ceux qui veulent vivre jusqu’au bout, parce que ça pose des principes. Cette loi, elle protège les patients. C’est le but ultime d’une loi.

On parle beaucoup de dignité et d’ultime liberté pour appuyer la légalisation de l’euthanasie. Certains cas, de personnes physiquement atteintes, restent très durs à déterminer. L’ultime liberté d’un individu, ne serait-ce pas aussi de pouvoir continuer d’espérer alors que tout s’y oppose? Beaucoup de médecins s’accordent souvent à dire que, dans bien des cas, le dernier à espérer reste le patient lui-même.

Bien-sûr qu’il existe des personnes qui peuvent changer d’avis. S’ils n’ont rien écrit, et qu’ils sont dans l’incapacité de le faire, il y a autre chose à imaginer, évidemment. Ceux qui font des raccourcis hâtifs pensent, qu’en tant que personne favorable au droit de mourir dans la dignité, je suis prêt à condamner toutes celles et ceux qui sont dans un état léthargique, où même communiquer avec le monde extérieur est impossible. C’est évidemment faux.

Qui plus est, il y en a qui ont des vraies convictions dans ce domaine également. Nicole Boucheton, la vice-présidente de l’ADMD (Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité), atteinte d’un cancer, est partie en Suisse et, malgré ses convictions initiales. Elle a changé d’avis. Elle ne voulait pas avoir une vie qui n’en n’était pas vraiment une. Souvenons-nous aussi d’une chose: nous sommes le pays qui compte le plus de suicides chez les personnes âgées parmi nos voisins européens. C’est une donnée à prendre en compte. Encore une fois, l’avis du patient lui-même, doit être au cœur de ce projet de loi.

Les médecins qui sont opposés à l’euthanasie, n’ont pas décidé un jour de se lancer dans la médecine pour tuer les gens mais pour les sauver…

On peut comprendre leurs positions, mais il faut aussi avoir la modestie de savoir que la vie d’un être humain a une fin. Si la personne souhaite être sauver coûte que coûte, cela va sans dire qu’il faut lui apporter toute l’aide possible. Mais si cette personne ne veut pas? Le médecin, aussi charitable soit-il, ne doit pas sortir de son rôle. Il ne faut pas dire «tuer», ici, il s’agit d’accompagner une personne en fin de vie.

Si la loi venait à passer, seriez-vous favorable à une clause de conscience pour les médecins?

Tous les pays qui ont légalisé l’euthanasie, ont cette clause de conscience. J’y suis bien-sûr favorable également. Avec les nombreuses études qui existent sur le sujet, on se rend compte que la majorité des médecins le font et très peu utilisent une clause de conscience. Le cas de la Belgique en est le meilleur exemple.
A lire (ici).


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