Chemins

Publié le 01 juin 2015 par Lecteur34000

« Chemins »

LESBRE Michèle

(Sabine Wespieser)

Depuis qu’il a découvert « Le canapé rouge », le Lecteur accompagne Michèle Lesbre dont il apprécie la musique si singulière. Tant cette musique lui semble en phase avec la vraie vie dont elle explore jusqu’aux espaces les plus reculés. Les « Chemins », eux, se présentent sous des apparences a priori fort ordinaires. Ils sont ceux qu’emprunte une femme pour se lancer à la recherche du peu des traces qu’a laissées son père, cet « homme qui (lui) paraît immense » lorsque, à l’âge de trois ans, elle fait sa connaissance mais qui très vite lui échappera.  Un fil conducteur : « Scènes de la vie de Bohême », roman d’Henry Murger. Roman qu’un inconnu lisait sous un réverbère, roman autrefois présent sur le bureau du père. Un roman que la narratrice n’a pas lu mais qui constitue un point de départ. Pourquoi cette présence dans la proximité du père et quel sens lui donner ?

Commence alors une errance, contenue, limitée aux rives d’un canal et à la périphérie des villes que traverse ce canal. Avec ses improbables rencontres. L’homme avec lequel pourrait se nouer une histoire d’amour. Les bateliers au grand cœur. Parmi des paysages qui font naître ou renaître des souvenirs, flous, imprécis, aux frontières de l’imaginaire. Entre le peu de ce que la mémoire restitue et ce que l’imagination crée ou recrée. Dans un monde quasiment clos mais dont les apparences ont beaucoup changé. Parmi le fatras des images qui réveillent des émotions si longtemps contenues. Les transitions d’un âge à l’autre. Les amitiés qui s’érodent. La croyance en un monde meilleur qui s’édulcore. La musique si singulière s’écoute et se savoure.

« La Loire était telle que dans mon souvenir, musclée, bien en chair, autoritaire. Je la préfère lascive, lorsqu’elle s’étale, se répand parmi les bans de sable, qu’elle se perd dans les méandres de son cours, dans les jeux de lumière, les îlots qui lui poussent sur le dos. A R., rien de cette belle paresse, pas de fantaisie, elle traverse la ville sans états d’âme. Le temps n’y avait rien changé… »

Michèle Lesbre - Chemins