Selon cet arrêt il incombe au notaire, tenu d'une obligation de prudence et de diligence d'accomplir, dans les meilleurs délais, les formalités en vue de la publication de l'acte afin d'assurer son opposabilité aux tiers :
"Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte authentique reçu le 18 avril 2005 par M. X..., notaire associé de la SCP Hervé C...et D... X... , M. Y... a vendu à M. Z... et Mme A... une parcelle de terrain sur laquelle étaient édifiés des garages ; que la publication de l'acte, sollicitée par le notaire le 9 juin 2005, est intervenue après celle, le 1er juin précédent, du jugement déclarant Mme B... adjudicataire de ce bien ; que par un arrêt irrévocable, la cour d'appel a ordonné l'expulsion de M. Y... et de tous occupants de son chef ; que M. Z... et Mme A... ont assigné M. Y... en nullité de la vente et indemnisation, ainsi que le notaire en responsabilité ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour exclure toute faute du notaire, l'arrêt relève, que, dans l'ignorance de la dissimulation de l'adjudication par M. Y..., l'officier ministériel n'avait aucune raison de procéder à une publication de l'acte de vente avant l'expiration du délai applicable ni de retenir le prix de vente jusqu'à l'accomplissement des formalités de publicité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il incombait au notaire, tenu d'une obligation de prudence et de diligence, dès lors qu'il remettait le prix de vente au vendeur le jour de la signature de l'acte, d'accomplir, dans les meilleurs délais, les formalités en vue de la publication de celui-ci afin d'assurer son opposabilité aux tiers, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande en garantie de M. Z... et Mme A... à l'encontre du notaire, l'arrêt énonce que ce dernier ne peut être condamné à garantir le remboursement du prix de vente qu'en cas d'insolvabilité avérée le jour où la cour d'appel statue ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure la condamnation du notaire à garantir le remboursement du prix de vente en cas d'insolvabilité avérée du vendeur, si cette condition se réalise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la quatrième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes indemnitaires de M. Z... et Mme A... à l'encontre de M. X..., l'arrêt rendu le 16 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à M. Z... et Mme A... la somme globale de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen commun produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. Z... et Mme A..., demandeurs aux pourvois n° F 14-14. 988 et D 14-19. 724.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. Rudy Z... et Mme Isabelle A... de toutes leurs demandes formées contre M. D... X... ;
AUX MOTIFS QUE sur la tardivité prétendue de la publication de l'acte du 18 avril 2005, qu'il convient, d'abord, d'observer que M. Y... a dissimulé l'adjudication tant aux acquéreurs qu'au notaire, la fiche d'immeuble ne mentionnant aucun transfert de propriété et l'assignation de Mme B... n'ayant pas été publiée ; que ce n'est que le 1er juin 2005, soit postérieurement à la vente par acte du 18 avril 2005, que le jugement du 17 mai 2005 a été publié, faisant obstacle à la publication de l'acte du 18 avril 2005 ; qu'ensuite, il ressort des renseignements fournis à la conservation des hypothèques de Créteil que l'acte de vente du 18 avril 2005 a été déposé le 9 juin 2005, soit le délai de deux mois prescrit par l'article 33 C du décret n° 55-22 du 4 juillet 1955 à l'égard du conservateur des hypothèques ; qu'en raison de la dissimulation commise par M. Y..., M. X... qui n'avait pas connaissance du litige opposant son client à Mme B... laquelle n'a publié le procès-verbal d'adjudication que le 2 novembre 2006, n'avait pas de motif de procéder à une publication plus rapide que nulle réglementation ne lui imposait, de sorte qu'aucune faute ne peut être imputée au notaire de ce chef ; (¿), sur le versement du prix à M. Y... le jour de la vente, qu'en raison de la dissimulation dolosive commise par celui-ci, le notaire n'avait pas de raison de retenir la prix jusqu'à la date de publication de l'acte de vente, de sorte qu'aucune imprudence ne peut lui être reprochée ; (¿), au demeurant, sur le préjudice né de cette faute à supposer qu'elle existe, que les consorts Z...- A... soutiennent que, conformément au dernier état de la doctrine de la Cour de cassation, le notaire qui a commis une faute a l'obligation de garantir la restitution effective des fonds entre les mains du créancier en cas d'insolvabilité du débiteur, fût-elle éventuelle ; mais (¿) que, dans cette hypothèse, bien que le préjudice soit déterminé et subordonné à la réalisation d'un événement également déterminé, cependant, la survenue de l'insolvabilité est aléatoire de sorte que l'exécution de la décision est elle-même soumise à un aléa, étant, de surcroît, imprévisible pour la personne condamnée ; qu'il s'en déduit que le notaire ne peut être condamné à garantie que dans le cas où le paiement est définitivement compromis au moment où le juge statue ; qu'au cas d'espèce, les consorts Z...- A... ne prouvent pas l'insolvabilité de M. Y..., avérée au jour où la cour statue ; que, dès lors, la demande de garantie du notaire ne peut prospérer ; (¿), sur la tardiveté de l'information relative au rejet de la publication de la vente, que ce n'est qu'en octobre 2006 que le notaire a informé les consorts Z...- A... de la décision de rejet de la publication du 25 juillet 2005 ; que, toutefois, le coût des travaux d'amélioration supporté par les consorts Z...- A... n'est pas un préjudice indemnisable dès lors que l'obligation de rembourser les améliorations trouvent sa cause dans l'annulation de la vente, ne peut peser sur le notaire, étant rappelé, au demeurant que les consorts Z...- A... ne prouvent pas l'insolvabilité de M. Y... ; qu'en outre, bien qu'informés en octobre 2006 du rejet de la publication de la vente, les consorts Z...- A... n'ont libéré les lieux que le 31 mars 2009 ; qu'il s'en déduit que le retard d'information n'est pas la cause du maintien dans les lieux des intimés ;
1°/ ALORS QUE le notaire est tenu d'un devoir de conseil destiné à assurer la validité et l'efficacité des actes auxquels il a apporté son concours ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que M. X... a attendu sans raison particulière le 9 juin 2005 pour déposer une demande de la publication de l'acte authentique de vente instrumenté le 18 avril 2005 ; qu'il ressortait encore des constatations de la cour d'appel que la publication du jugement d'adjudication au profit de Mme B... n'a été publié que le 1er juin 2005, d'où il s'évinçait que si le notaire avait publié la vente faite aux consorts Z...- A... entre le 18 avril 2005 et le 1er juin 2005, soit près d'un mois et demi, l'acquisition faite par les exposants n'aurait pas été privée d'efficacité juridique ; qu'en jugeant néanmoins qu'aucune faute ne pouvait être imputée au notaire, au motif inopérant que ce dernier n'ayant pas connaissance du litige opposant son client à Mme B..., n'avait pas de raison de procéder à une publication plus rapide, quand, tout au contraire, compte tenu de la connaissance que doit avoir le notaire des effets juridiques d'antériorité s'attachant à la publication de la vente, l'on est en droit d'attendre de sa part qu'il fasse diligence pour procéder à cette publication une fois l'acte signé, afin d'en assurer au mieux l'efficacité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations dont il ressortait que M. X... n'avait pas pris toutes dispositions utiles pour assurer la validité et l'efficacité de l'acte de vente auquel il a apporté son concours, et a ainsi violé l'article 1382 du code civil ;
2°/ ALORS QUE lorsqu'il prête son concours à la rédaction d'un acte, le notaire est tenu d'une obligation de prudence et de diligence ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que M. X... a distribué au vendeur les fonds provenant de la vente de son immeuble, le jour même de la signature de l'acte authentique de vente, avant donc de s'assurer de l'opposabilité aux tiers du droit de propriété des consorts Z...- A... par l'accomplissement des formalités de publicité foncière ; que, dès lors, en jugeant qu'aucune faute ne peut être imputée au notaire, quand il résulte de ses propres constatations que le notaire n'a pas satisfait à son devoir de prudence et de diligence, la cour d'appel n'a pas déduit de ses constatations les conséquences légales qui en découlaient, et a ainsi violé l'article 1382 du code civil ;
3°/ ALORS QUE chacun des coauteurs d'un même dommage, conséquence de leurs fautes respectives, doit être condamné in solidum à la réparation de l'entier dommage, chacune de ces fautes ayant concouru à le causer tout entier ; qu'en subordonnant la condamnation du notaire à garantir la restitution due par M. Y... consorts Z...- A... à la preuve de l'insolvabilité avérée de M. Y... au jour où le juge statue, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qui n'y figure pas, et a ainsi violé l'article 1382 du code civil ;
4°/ ALORS QUE le notaire doit réparer le dommage qui est la conséquence directe et certaine de sa faute ; que l'acheteur victime d'une éviction totale ayant réalisé des améliorations sur le bien dont il est évincé subit un dommage qui résulte directement de la carence fautive du notaire à l'informer tardivement de cette éviction ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que M. X... n'a informé les consorts Z... qu'en octobre 2006 de la décision de rejet de la publication de la vente rendue survenue pourtant le 25 juillet 2005, soit 15 mois plus tôt ; qu'en écartant cependant la demande en réparation du coût des travaux d'amélioration réalisés par les consorts Z...- A... dans l'intervalle sur le bien dont ils ont été évincés par Mme B..., au motif erroné que ce préjudice n'aurait pas été la conséquence de la tardiveté fautive du notaire à les informer, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil."