Le retour du général de Gaulle au pouvoir en 1958 a-t-il été le fruit d'un
complot ? Il faut distinguer la « journée » insurrectionnelle du 13 Mai elle-même de ses conséquences.
II n'y a pas eu préméditation ni préparation de complot gaulliste à Alger. L'ancien responsable du RPF Léon Delbecque a su utiliser les circonstances favorables et canaliser le
mouvement insurrectionnel en rejoignant le comité de salut public constitué à Alger par les généraux.
Par la suite, les gaullistes ont entrepris une opération de destabilisation du pouvoir légal, dirigé par Pierre Pflimlin, chef d'un
gouvernement massivement soutenu par le Parlement. Pour y parvenir, ils ont alimenté la rumeur d'une menace de coup d'Etat fomenté par les officiers supérieurs d'Algérie pressés d'en finir avec
un gouvernement trop modéré.
Au lendemain du 13 Mai, l'armée a en effet largement basculé dans une entreprise putschiste. Une
opération militaire a été mise en train, qui prit le nom de « Résurrection ». Elle deviendrait effective dans les trois cas suivants : soit le refus de l'Assemblée d'investir de
Gaulle, soit des troubles sérieux occasionnés par cette investiture, soit un coup de force du Parti communiste.
Les chefs gaullistes entendaient se servir de cette menace pour forcer la main aux députés récalcitrants. L'intox a donc joué un rôle
considérable dans la résignation des parlementaires, d'abord décidés à résister, puis de plus en plus convaincus qu'investir de Gaulle était la meilleure chance d'éviter une guerre civile.
De Gaulle, parfaitement au courant, sans avoir été mêlé directement à l'opération Résurrection, a su user de cet épouvantail pour faire basculer la situation en sa
faveur.Le coup de force militaire a ainsi été évité.
Source: d'après M.Winock, Le 13 mai 1958, un coup d'Etat, article paru dans l'Histoire, 1999