Alan Quatermann, Indiana Jones, Benjamin Gates... sont les plus connus des archéologues. Qui n'a rêvé de leurs aventures, de percer secrets et mystères enfouis dans les profondeurs de la mémoire humaine et dans les méandres les plus sombres de l'histoire ? Pourtant, si je vous disais que leurs exploits, fictifs, sont d'une extrême pauvreté face aux véritables enquêtes que mènent, au quotidien, des historiens inconnus et qui résolvent des énigmes encore plus passionnantes ? Vous en doutez ?
Tout commence par un rapport du Comité du Salut Public à la Convention Nationale du 30 juillet 1793. Le député conventionnel Barère propose, depuis la tribune et sous les acclamations populaires, d'offrir à la République, à l'occasion du 10 août, jour de son premier anniversaire, la destruction des tombeaux des rois et reines de la basilique Saint-Denis. La machine en branle, deux étapes en août et en octobre 1793 se succèdent où s'opèrent la destruction et le pillage des tombeaux, la profanation des restes, souvent momifiés, des cadavres de la dynastie capétienne déchue, et surtout, un immense marché noir de reliques vendues à l'encan ou tout simplement volées pour conserver un souvenir de ce geste mémorable. Dents, cheveux, os, doigts, ongles, poils de barbes, têtes, tout y passe..
1919. Un brocanteur achète une tête aux enchères pour trois francs. Toute sa vie durant, il n'aura de cesse d'essayer de prouver qu'il s'agit de la tête momifiée du bon roi Henri IV qui aurait été soustraite à son cadavre, découvert presqu'intact, lors des pillages révolutionnaires. Sans succès. Dans les années cinquante, un couple de passionnés anonymes reprend le flambeau, acquiert la relique, puis, sans résultats malgré des années de recherches, la passion s'étiolant, remise la tête dans un grenier. Jusqu'au jour où le journaliste Stéphane Gabet et le docteur Philippe Charlier, maître de conférences en médecine légale et auteur de nombreux livres dont " Les secrets des grands crimes de l'Histoire ", accompagnés d'historiens et de scientifiques, décident, à la manière des séries " cold case " ou " bones ", d'authentifier cette tête selon les techniques de la science moderne.
Test ADN, datation au carbone 14, reconstitution faciale, course aux archives oubliées ou méconnues, lectures des autopsies d'époque afin de reconstituer les procédés d'embaumement de la fin de la Renaissance, voyages dans les collections de vraies-fausses reliques des rois de France disséminées dans les musées publics et collections privées d'Europe, reconstitution des étapes du vol de la tête et de ses pérégrinations tout au long des XIXème et XXème siècle où l'on découvre que l'inventeur de la muséographie, Alexandre Lenoir, n'a pas seulement usé de son talent pour sauver de la destruction des révolutionnaires les plus beaux chefs d'œuvre de l'histoire de l'art mais se constituait, secrètement, un cabinet, macabre, de curiosités.. L'enquête, menée tambour battant, jalonnée de rebondissements et de découvertes scientifiques et historiques majeures, lève le voile sur les secousses et les conséquences d'un fait méconnu : que sont devenues les dépouilles de la nécropole royale de Saint-Denis que la Révolution Française a soustrait au repos éternel ?
Si, durant la Restauration et la Monarchie de Juillet, une fois la royauté revenue, beaucoup d'anciens révolutionnaires ou leurs héritiers ont rendu à l'Etat ce qu'ils avaient volés ou achetés sous le manteau en 1793 et après ; tels les restes de la Sainte Croix qui pullulent dans de nombreuses cathédrales de la Chrétienté, demeurent encore des mystères cachés quant aux reliques des Rois de France. Ainsi, pour ce qui est du chef d'Henri IV, sans dévoiler le résultat de l'enquête, je vous conseille la lecture du livre pour savoir ce qu'il advint de sa tête !
Pour aller plus loin :
Henri IV, L'énigme du Roi sans tête de Stéphane Gabet et Philippe Charlier.