Les puristes m'excuseront du barbarisme anglo-saxon que revêt le titre de cet article, toutefois je n'en ai pas trouvé d'autres qui rassemble et ramasse toutes les fonctionnalités et tous les usages du phénomène qui, tour à tour depuis plusieurs années, a pu être décrit comme le "web 2.0", l'âge du "collaboratif", les "réseaux sociaux", etc..
Social média me paraissait un bon compromis pour, au delà du titre, interroger le concept au regard du premier axiome, la communication. Car l'actualité récente vient de démontrer une nouvelle fois combien ces nouveaux médias, dit sociaux, ont pris une influence importante dans la manière de concevoir une stratégie de communication, et de la déployer.
Cette actualité, chaude, est en effet la mise en examen prononcée au printemps par le juge Gentil de l'ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy, puis l'invalidation de ses comptes de campagnes par le Conseil Constitutionnel à l'orée de l'été, décision qui a donné lieu au "Sarkothon", collecte de fonds assez inédite sous la Vème République et enfin sa relaxe récente par le non-lieu du 7 octobre 2013 sur l'affaire Bettencourt.
Abondamment commentés à grand renfort d'éléments de langage par le camp et le clan de l'ancien Président qui n'en finit pas de faire son deuil d'une défaite qui n'a pas encore ouvert de droit, nécessaire, d'inventaire ; ces faits majeurs de la vie politique ont amené l'ancien Président à sortir de la demi-réserve, ou plutôt de la diète médiatique imposée par sa situation et à laquelle il avait de plus en plus de mal à se tenir.
Pour ce faire, alors que beaucoup de journalistes attendaient dès la première péripétie (la mise en examen) le sacro-saint communiqué, alors même qu'il se bruisse que l'hyperactif voulait se faire inviter sur un grand plateau de TV afin de se défendre, il aura suffit à l'ancien Président de poster sa déclaration sur sa page Facebook, alors inactive depuis dix mois (à l'exception d'un message pour Noël fin 2012), p our que ses fans fassent le travail de percolation "sociale", puisque l'outil en question à pour but de viraliser les contenus à forte propension médiatique.
816.000 fans en jachère et quelques heures plus tard, plus de 50.000 "like", prés de 6.500 partages, et les médias traditionnels (print, radio, TV) qui répercutent puisque, pour ma part, c'est à la lecture du Monde en ligne que j'ai découvert l'information de la mise en examen. Ayant réussi le tour de force de faire passer un message sans avoir pris la parole devant les médias traditionnels, la stratégie, sans doute jugée payante par ses conseillers, fut reprise par Nicolas Sarkozy lors de l'invalidation de ses comptes de campagne (cf le livetweet semi-officiel sur son compte lors de son discours aux cadres de l'UMP en juillet 2013) puis par un dernier tweet de remerciement pour la fin de la souscription et enfin, à l'occasion du non-lieu sur l'affaire Bettencourt, par une nouvelle déclaration sur Facebook.
Analyse en vidéo :
En novembre 2012, le Président Obama s'était contenté d'un tweet en guise de communiqué de presse pour annoncer sa victoire et son sentiment sur celle-ci. Jusqu'à aujourd'hui, pour qui s'interresse et s'interroge sur la communication publique et politique, peu d'exemples pouvaient être cités sur une pratique nouvelle, celle de la relation publique donnant la priorité, le "scoop", aux réseaux sociaux.
A double visée, tant pour informer les médias que pour rassembler son camp, cette pratique atteste non seulement des potentialités des outils à notre disposition qui révolutionnent la communication que de leur puissance, les conseillers de l'ancien Président de la République n'ont sans doute pas oublié que Facebook rassemble prés de la moitié des français (27 millions de comptes en 2012).
Par ailleurs, au terme de ces péripéties juridiques, force est d'admettre que la communication ayant été maîtrisée, la notoriété de l'ancien Président sur ces médias sociaux est également renforcée puisqu'il a gagné par moins de 44.000 fans en l'espace de quelques mois, passant, entre sa première déclaration au printemps 2013, de 816.000 fans sur Facebook à plus de 860.000 désormais ; une force de frappe d'envergure pour qui attend à présent le moment propice pour rejoindre, de nouveau, l'arène politique.
Dernier avantage et non des moindres, ces nouveaux médias permettent de franchir la médiation journalistique, c'est-à-dire éviter l'intermédiation des questions fâcheuses ! Bref, un média par essence horizontal et qui permet de faire de la communication descendante, quel rêve pour la communication politique ! Vous avez dit " social média" ?